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Page:Alexis - La Fin de Lucie Pellegrin, etc, 1880.djvu/74

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L’INFORTUNE DE MONSIEUR FRAQUE

qu’ils préparent l’avènement de la bourgeoisie au pouvoir, moi, ici, je suis en train de rouler la noblesse… »

M. Fraque avait affaire à forte partie. Deux mois s’écoulèrent. Noël approchait. Le marquis vint, un matin, inviter Hector au « Réveillon ». M. Fraque arriva à six heures et demie, assez maussade. Il s’était fait inscrire dans la journée au barreau de Noirfond. Le calme plat et l’inertie de ces premières semaines de vie de province lui pesaient. Il était déjà blasé sur la comédie que lui donnait le marquis. Avant qu’on se mît à table, mademoiselle de Grandval lui montra l’aquarelle commencée au couvent, complètement terminée. Hector témoigna si peu d’admiration qu’il en fut impoli. Zoé alla chercher son album, ne lui fit grâce d’aucun dessin, lui donna même une sépia, que M. Fraque fourra brusquement dans sa poche. Zoé n’eut pas l’air de s’en apercevoir ; elle était toute heureuse et toute souriante en prenant le bras d’Hector pour aller dans la salle à manger.

M. Fraque la regarda plusieurs fois du coin de l’œil. Il était surpris : Zoé n’était plus laide. Son grand nez ne le choquait plus. Elle était bien coiffée. Ses yeux noirs lançaient un feu surprenant : on ne voyait plus qu’eux ! Son costume de satin noir, démodé de forme, étrange, porté à la diable, avait un caractère. Une énorme bûche de Noël flambant dans la cheminée, tachait de rose le plafond. La table était bien servie, avec quelques débris d’un vieux