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Page:Alexis - Madame Meuriot : mœurs parisiennes.djvu/18

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MADAME MEURIOT

de la lampe d’imperceptibles poils follets, tout blancs, luisaient sur son menton carré.

― Je te dis que c’est elle !… Dans quelques minutes, elle se mettra au piano.

Et elle regardait fixement le parquet, comme si elle eut pu voir au travers.

― En effet ! fit madame Camoin.

Ce furent les vibrations de quelques grands accords, plaqués par des mains agiles, nerveuses.

― Elle est très forte, dit avec conviction madame Honorat.

Puis, soit qu’une porte eût été fermée ou que la pianiste jouât tout à coup doucement, ce ne fut plus qu’un murmure lointain. Le salon du quatrième étage donnait d’ailleurs sur la rue, tandis qu’au cinquième, dédoublé en deux, la famille Honorat n’occupait que l’appartement sur la cour. Voici qu’elles comparaient maintenant les loyers. Les trois mille quatre cents francs payés par les Meuriot, n’était-ce pas, relativement, bien moins cher que les quinze cents francs de l’appartement sur la cour ? Ici, avec une froideur où perçait de l’envie, madame Camoin ne manqua point de rappeler qu’elle et son mari, rue d’Argout, ne payaient que six cent cinquante francs, encore dans une vieille maison enfumée, sujette à toutes sortes d’inconvénients. Le rez-de-chaussée était loué à un serrurier. A partir de cinq heures du matin, un vacarme ! Elle ne dormait plus. C’était triste tout de même, à son âge, par suite de mauvaises affaires, d’en être réduite… Et, n’en disant pas davantage, elle continuait l’expression de sa pensée par des hochements de tête. La mère Ho-