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ÉTAT ACTUEL ET AVENIR DES TROIS RACES.

rement fiscale[1]. Pour dissimuler sa défaite, le gouvernement de l’Union eut recours à un expédient qui est fort à l’usage des gouvernements faibles : en cédant sur les faits, il se montra inflexible sur les principes. En même temps que le congrès changeait la législation du tarif, il passait une autre loi en vertu de laquelle le président était investi d’un pouvoir extraordinaire pour surmonter par la force les résistances qui dès lors n’étaient plus à craindre.

La Caroline du Sud ne consentit même pas à laisser à l’Union ces faibles apparences de la victoire ; la même convention nationale qui avait frappé de nullité la loi du tarif s’étant assemblée de nouveau, accepta la concession qui lui était offerte ; mais en même temps, elle déclara n’en persister qu’avec plus de force dans la doctrine des nullificateurs, et pour le prouver, elle annula la loi qui conférait des pouvoirs extraordinaires au président, quoiqu’il fût bien certain qu’on n’en ferait point usage.

Presque tous les actes dont je viens de parler ont eu lieu sous la présidence du général Jackson. On ne saurait nier que, dans l’affaire du tarif, ce dernier n’ait soutenu avec habileté et vigueur les droits de l’Union. Je crois cependant qu’il faut mettre au nombre des dangers que court aujourd’hui le pouvoir fédéral la conduite même de celui qui le représente.

Quelques personnes se sont formé en Europe, sur l’influence que peut exercer le général Jackson dans les affaires de son pays, une opinion qui paraît fort extravagante à ceux qui ont vu les choses de près.

  1. Cette loi fut suggérée par M. Clay et passa en quatre jours, dans les deux chambres du congrès, à une immense majorité.