Page:Alexis de Tocqueville - L'Ancien Régime et la Révolution, Lévy, 1866.djvu/155

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cette espèce se furent multipliés sous mille noms et sous mille formes, qu’à la taille eurent été assimilées quatre autres taxes ; que des charges inconnues au moyen-âge, telles que la corvée royale appliquée à tous les travaux ou services publics, la milice, etc., eurent été ajoutées à la taille et à ses accessoires, et aussi inégalement imposées, l’exemption du gentilhomme parut immense. L’inégalité, quoique grande, était, il est vrai, plus apparente encore que réelle ; car le noble était souvent atteint dans son fermier par l’impôt auquel il échappait lui-même ; mais en cette matière l’inégalité qu’on voit nuit plus que celle qu’on ressent.

Louis XIV, pressé par les nécessités financières qui l’accablèrent à la fin de son règne, avait établi deux taxe communes, la capitation et les vingtièmes. Mais, comme si l’exemption d’impôts avait été en soi un privilège si respectable qu’il fallût le consacrer dans le fait même qui lui portait atteinte, on eut soin de rendre la perception différente là où la taxe était commune. Pour les uns, elle resta dégradante et dure ; pour les autres, indulgente et honorable.

Quoique l’inégalité, en fait d’impôts, se fût établie sur tout le continent de l’Europe, il y avait très-peu de pays où elle fût devenue aussi visible et aussi constamment sentie qu’en France. Dans une grande partie de l’Allemagne, la plupart des taxes étaient indirectes. Dans l’impôt direct lui-même, le privilège du gentilhomme consistait souvent dans une participation moins grande à une charge commune. Il y avait, de plus, certaines