Page:Alexis de Tocqueville - L'Ancien Régime et la Révolution, Lévy, 1866.djvu/24

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lui-même, si sa nation lui paraissait avoir les vertus nécessaires pour faire un bon usage de la liberté ? Je pense qu’il n’y en a point. Les despotes eux-mêmes ne nient pas que la liberté ne soit excellente ; seulement ils ne la veulent que pour eux-mêmes, et ils soutiennent que tous les autres en sont tout à fait indignes. Ainsi, ce n’est pas sur l’opinion qu’on doit avoir de la liberté qu’on diffère, mais sur l’estime plus au moins grande qu’on fait des hommes ; et c’est ainsi qu’on peut dire d’une façon rigoureuse que le goût qu’on montre pour le gouvernement absolu est dans le rapport exact du mépris qu’on professe pour son pays. Je demande qu’on me permette d’attendre encore un peu avant de me convertir à ce sentiment-là.

Je puis dire, je crois, sans trop me vanter, que le livre que je publie en ce moment est le produit d’un très-grand travail. Il y a tel chapitre assez court qui m’a coûté plus d’un an de recherches. J’aurais pu surcharger de notes le bas de mes pages ; j’ai mieux aimé n’insérer ces dernières qu’en petit nombre et les placer à la fin du volume, avec un renvoi aux pages du texte auquel elles se rapportent. On trouvera là des exemples et des preuves. Je pourrais en fournir bien d’autres, si ce livre paraissait à quelqu’un valoir la peine de les demander.