Page:Alexis de Tocqueville - L'Ancien Régime et la Révolution, Lévy, 1866.djvu/363

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et services qui sont inhérents à la possession de certaines terres, mais s’étendent, ainsi que nous l’avons vu, jusqu’à la personne du possesseur.

La plupart des privilèges des propriétaires de sol sont de nouveau consacrés par le code ; on peut même dire qu’ils le sont contre le code ; puisqu’il est dit que, dans les cas où la coutume locale et la nouvelle législation différaient, la première doit être suivie. On déclare formellement que l’État ne peut détruire aucun de ces privilèges qu’en les rachetant et en suivant les formes de la justice.

Le code assure, il est vrai, que le servage proprement dit (Leibeigenschaft), en tant qu’il établit la servitude personnelle, est aboli ; mais la subjection héréditaire qui le remplace (Erbunterthænigkeit) est encore une sorte de servitude, comme on a pu le juger en lisant le texte.

Dans ce même code, le bourgeois reste soigneusement séparé du paysan ; entre la bourgeoisie et la noblesse, on y reconnaît une sorte de classe intermédiaire : elle se compose de hauts fonctionnaires qui ne sont pas nobles, des ecclésiastiques, des professeurs des écoles savantes, gymnases et universités.

Pour être à part du reste de la bourgeoisie, ces bourgeois n’étaient pas, du reste, confondus avec les nobles ; ils restaient, au contraire, dans un état d’infériorité vis-à-vis de ceux-ci. Ils ne pouvaient pas, en général, acheter des biens équestres, ni obtenir les places les plus élevées dans le service civil. Ils n’étaient pas non plus hoffahig, c’est-à-dire qu’ils ne pouvaient se présenter à la cour, sinon dans des cas rares, et jamais avec leurs familles. Comme en France, cette infériorité blessait d’autant plus que chaque jour cette classe devenait plus éclairée et plus influente, et que les fonctionnaires bourgeois de l’État, s’ils n’occupaient pas les postes les plus brillants, remplissaient