toujours frappé surtout en lui, ce sont les défauts de son esprit. Jamais auteur n’a mieux conservé dans les affaires les habitudes et les travers de ce métier-là. Quand il avait établi un certain rapport entre les différentes dispositions d’une loi et donné un certain tour ingénieux et frappant à la rédaction, il croyait avoir tout fait ; la forme, l’enchaînement, la symétrie l’absorbaient. Mais, ce qu’il lui fallait surtout, c’était le neuf. Les institutions, déjà essayées ailleurs ou dans d’autres temps, lui paraissaient aussi haïssables que les lieux communs et le premier mérite d’une loi, à ses yeux, était de ne ressembler en rien à ce qui l’avait précédée. On sait que la loi d’après laquelle la constituante avait été nommée était son ouvrage. Au moment des élections générales, je le rencontrai, et il me dit avec une certaine complaisance : « A-t-on jamais vu dans le monde rien de semblable à ce qui se voit aujourd’hui ? Où est le pays où l’on a jamais été jusqu’à faire voter les domestiques, les pauvres, les soldats ? Avouez que cela n’avait jamais été imaginé jusqu’ici. » Et il ajouta en se frottant les mains : « Il sera bien curieux de voir ce que tout cela va produire. » Il en parlait comme d’une expérience de chimie.