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Page:Alfieri - De la Tyrannie.djvu/121

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l’autorité. Les grands tyrans se servirent d’abord du peuple lui-même pour abaisser les petits seigneurs ; et le peuple qui avait tant d’injures à venger, servait volontiers l’animosité de ce seul tyran contre le grand nombre de tyrans inférieurs. Alors tel de ces tyrans subalternes se rendit au tyran par capitulation, et tel autre tourna ses armes contre lui ; mais, soit qu’ils aient capitulé, soit qu’ils aient été vaincus, tous ou au moins la plus grande partie furent subjugués avec le temps. Le mal qui résultait de cette tyrannie féodale et secondaire ne cessa pas : la servitude du peuple ne fut point diminuée ; la seule force du tyran s’accrut avec son autorité. Les tyrans alors sentirent la nécessité de conserver, entre eux et le peuple, une classe qui parut un peu plus puissante que le peuple, et beaucoup moins puissante qu’eux. Ils s’aperçurent très-bien qu’en distribuant à ces tyrans dépouillés tous les honneurs et toutes les charges, ils deviendraient, avec le temps, les soutiens les plus sûrs et les plus féroces de leur tyrannie.

Les tyrans ne se trompèrent pas dans leur espérance. Les nobles dépouillés de toute leur force et de leur autorité, sans