Page:Alfieri - De la Tyrannie.djvu/129

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

partie de l’Asie), néanmoins, chez les Mahométans, les principaux instrumens de la tyrannie sont, comme chez les Chrétiens, les prêtres, les chefs de la milice, les gouverneurs de province, et les grands de la cour ; et quoique ces hommes ne soient pas nés nobles, ils n’en doivent pas moins être regardés comme une classe plus puissante que le peuple, plus faible que le tyran qui, recevant de lui tout son lustre et son autorité, se trouve occuper la même place dans les tyrannies asiatiques que la noblesse dans les tyrannies européennes. Je conviens que ces nobles d’Asie, soit qu’ils meurent de mort naturelle ou de mort violente, ne transmettent point leur noblesse à leurs fils ; mais qu’en résulte-t-il ? D’autres leur succèdent dans les places qu’ils occupaient, et tous ceux qui viennent après eux, quoique d’origine plébéienne, ne manquent pas de prendre l’esprit des nobles, qui n’est autre chose que d’opprimer le peuple et de faire cause commune avec le tyran. Il y a plus, ces nobles de nouvelle fabrique seront d’autant plus féroces, qu’ils sont nés dans un état plus vil, qu’ils ont été plus opprimés, et qu’ils ont connu plus d’égaux. Comment ne seraient-ils pas plus orgueilleux et plus