Page:Alfieri - De la Tyrannie.djvu/33

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nous soyons tout-à-fait différens de ces hommes là ; mais aucun d’eux ne nous veut apprendre de quelle manière on pourrait dominer le hasard et les circonstances, ni jusqu’à quel point on doit concevoir et tolérer une aussi grande diversité. D’un autre côté, les tyrans et le nombre immense de leurs suppôts, plus lâches encore qu’eux, s’efforcent de nous persuader que nous ne sommes plus de cette race antique et généreuse. Oui, certes, tant que nous supporterons leur joug en silence, il y a pour nous moins d’infamie à croire ce que nous disent les tyrans, que ce que veulent nous persuader les écrivains modernes.

Tous ensemble donc, ou bons, ou méchans, ou savans, ou vulgaires, ou penseurs, ou stupides, ou lâches, ou courageux, tous apprennent à trembler plus ou moins sous la tyrannie, et cette crainte est évidemment le véritable, l’universel, et le plus puissant ressort d’un tel gouvernement ; elle est enfin le lien unique qui enchaîne les sujets au pied du trône.

Examinons à présent si la crainte qu’éprouve le tyran, est également le ressort de son régime, et le lien qui l’unit aux sujets. Il appercoit souvent les abus sans