Page:Alfieri - De la Tyrannie.djvu/41

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en seraient offensés les premiers : aucun d’eux ne licenciait ses soldats, ou ne les mettait sous les ordres d’une autorité autre que la sienne propre, parce qu’il était persuadé que sa personne n’était pas assez en sûreté sans la force ; ils étaient donc bien certains eux-mêmes que leur autorité était illimitée, puisqu’ils ne voulaient pas la soumettre aux lois, et qu’elle était illégitime, puisqu’elle ne pouvait se maintenir que par la terreur des armées. Je demande si un tyran, si parfait, mérite que les hommes lui accordent le nom de bon ? Quel droit a réellement à ce titre celui qui, ayant dans ses mains un pouvoir qu’il reconnaît vicieux, illégal, très-dangereux, non-seulement n’y renonce pas pour lui-même, mais n’entreprend pas au moins d’en dépouiller ceux qui viendront après lui, et sur-tout lorsqu’il sait que cette grande action peut le couvrir de gloire et lui mériter les applaudissemens du monde entier ? Observons en outre, que cette abdication, en empêchant l’usurpation, n’otait rien à ceux qui n’étaient pas encore en possession du pouvoir, d’autant plus que ces mêmes tyrans ne laissaient pas d’enfans pour successeurs. La peur des sujets ne cessa donc pas sous