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Page:Alfieri - De la Tyrannie.djvu/62

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grandes vertus, le courage et la fidélité. L’ambition de s’enrichir est plus universelle sous la tyrannie. Plus elle est riche et étendue, plus on a de moyens de satisfaire cette vile passion par des voies illégitimes, sur-tout ceux qui ont la direction du trésor public. Outre ce moyen là, il y en a beaucoup d’autres, et ils doivent être aussi nombreux que les vices du tyran et du favori qui le gouverne.

Le but que les hommes se proposent en accumulant d’immenses trésors, est vicieux dans l’un et l’autre gouvernement ; et il l’est plus encore dans les républiques que sous la tyrannie, parce que dans celles-là on ne les amasse que pour corrompre, acheter les citoyens et détruire l’égalité ; et dans celle-ci, pour en jouir dans le luxe et tous les vices. Avec tout cela, le désir d’acquérir des richesses me semble plus excusable dans les gouvernemens où les moyens de les obtenir sont moins vils, où la possession en est plus assurée, et où enfin le but, tout criminel qu’il est, peut être plus élevé ; au lieu que dans les gouvernemens absolus, ces richesses qui sont le fruit de mille intrigues, de mille iniquités et de mille lâchetés, peuvent être enlevées par le caprice d’un seul, par les