Page:Alfieri - De la Tyrannie.djvu/70

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plantés dans la personne d’un sujet, parce qu’il se trouve forcé d’employer cette puissance pour défendre et le tyran héréditaire et lui-même. Une personne de plus à défendre demande nécessairement plus de moyens de défense, et une autorité plus illégitime exige des moyens plus illégitimes encore. C’est pourquoi on doit regarder la création et l’introduction de ce funeste personnage dans la tyrannie, comme la perfection la plus sublime de la puissance arbitraire.

En voici la preuve en bref. Le tyran qui n’a jamais vu, et qui ne croit pas qu’il y ait quelqu’un d’égal à lui, déteste, par une crainte innée, l’universalité de ses sujets ; mais il ne hait pas les individus, parce qu’il n’a reçu d’eux aucune injure personnelle. Le glaive donc reste suspendu dans la main d’un homme qui, n’ayant reçu aucune offense particulière, ne sait pas sur qui il doit le laisser tomber.

Mais aussitôt qu’il confie ce précieux et terrible emblème de l’autorité à un sujet, à un homme qui a eu des supérieurs et des égaux, à un homme qui, parce qu’il est injuste au suprême degré, doit être au suprême degré détesté par plusieurs et par la