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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.2.djvu/147

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ARTANISME (PÉRIODE ORIGINAIRE DE L')

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généra lion éternelle et la divinité du Verbe ou sa procession ex ipsa Dei subslanlia, comme on le lit dans un fragment de commentaire, In Hcbr., P. G., t. xvii, col. 581 ; c'étaient divers points réellement sujets à caution et qu’on retrouve, en tout ou en partie, dans un certain nombre d’auteurs ecclésiastiques avant le concile de Nicée. Élucubrations de philosophes philonisant sur le Logos ÊvSiâôeTo ; ou Ttpoçoptxô ;, Verbe interne ou proféré, et semblant établir une connexion entre la création du monde et la génération du Verbe ; passages où la génération du Fils par le Père est représentée comme un acte volontaire ; textes qui expriment une idée de subordinalianisme, sans que rien n’indique clairement une distinction entre la subordination essentielle ou de nature et la subordination personnelle du Fils au Père, par exemple, quand Origène montre dans le Fils l’image de li bonté de Dieu, mais non la bonté même, ou Œdç, mais non ô (-)eô :, ni a-JTrfŒoç ; enfin, doctrine des théophanies dans l’Ancien Testament, où la visibilité du Fils mise en r igard de l’invisibilité du Père semblerait témoigner d’une nature différente et inférieure. Tout cela nous permet de comprendre aisément pourquoi Arius et ses partisans pouvaient invoquer les Pères, sinon pour l’ensemble de leur doctrine, du moins pour divers éléments constitutifs de leur synthèse dogmatique et philosophique. Mais là, comme sur le terrain scripturaire, les ariens procédaient à l’arbitraire et d’une façon incomplète, ne prenant chez les écrivains antérieurs que des passages isolés, pour en tirer des conclusions opposées à l’ensemble de leur doctrine ou à leur foi commune touchant la génération du Fils ex substantiel Patris et sa vraie divinité, ou son unité de nature avec le Père. Voirentre autres llefele, Ilisl. des conciles, trad. H. Leclerq, 1. 1, §18, p. 335 ; Scheeben, La dogmatique, trad. Bélet, Paris 1880, t. il, n. 840 ; sur le rapport de l’origénisme à l’arianisme, article de L.Wollf, dans la Zeitsclirift fur hither. Théologie und Kirche, Leipzig, 1842, 3° fasc, p. 33-55.

Les citations d’Arius qui ont été faites montrent suffisamment quel était le genre de ses arguments rationnels. L’opposition entre l'ày£vvr|To ; et le y £vv '1 t ^î en était comme le point de départ et le résumé ; les termes s’opposent, par conséquent Yinengendré et Yengendré oe sauraient être de même nature, ni posséder les mêmes propriétés essentielles ; Yengendré n’ayant pas en luimême la raison de son existence, n’est pas Dieu, l'être [nvinier, l'être nécessaire. Puis venaient toutes les difficultés qu’entraînait dans l’esprit d’Arius l’identification des concepts de génération et de production con nte : comment le Fils engendré serait-il co-éternel au l'ère inengendré? car celui qui engendre doit précéder celui qui est engendré. De là ces questions caps qui déconcertaient les simples. Aux femmes on

' : « Avicz-vous un (ils avant de le mettre au monde ?

rément non ; de même Dieu n’en avait pas avant d’avoir engendré. » Aux jeunes gens on demandait :

lui qui existe a-t-il fait celui qui n’est pas ou celui

qui est ? L’a-t-il fait comme quelqu’un qui n'était pas

i ncore ou comme quelqu’un qui était déjà? » Les ariens

ncore : le Fils existe ou par la volonté du

I' re, ou sans sa volonté ; dans la première supposition,

il pourrait n'être pas ; dans la seconde, on impose au

Père une contrainte, et on le prive de sa liberté. Enfin,

il - i que, pour admettre la consubstantialité

du Verbe, il fallait sacrifier ou la trinité des personnes

en retombant dans le sabellianisme, ou l’unité et la

implicite de Dieu. Objections graves assurément, et en

quelque sorte nécessairement, puisqu’elles touchent au

ie de la vie divine.

S. Genèse de la doctrine arienne. — On a jugé 1res di rclations philosophiques de l’arianisme.

ns l’ont rattache au platonisme, par exemple Pctau,

De Trinilale, l. I, c.vill, §3j et IVMcr, Histoire de la phi losophie chrétienne, trad. de l’allemand par J. Trullard, Paris, 1814, I. V, c. il, sect. I. Les autres l’ont rattaché à l’aristotélisme ; tel, en particulier, Baur qui, en revanche, voit le platonisme dans saint Athanase, Die christlic.he Lehre von der Dreieinigkeit und Menschwerdung Gotles, Tubingue, 1841, t. i, p. 388-394. Quoi qu’il en soit de l’assertion relative à saint Athanase, on ne saurait, sans exagération, trancher les camps d’une façon si absolue, qu’on ait d’un côté l’aristotélisme, de l’autre le platonisme. Il est vrai que saint Fpiphane donne aux ariens l’appellation de « nouveaux aristotéliciens » ; mais, quand on examine de près sa pensée et celle des Pères invoqués par Baur, on voit qu’il ne s’agit pas du fond même de la doctrine philosophique, mais de la méthode d’argumentation arienne, surtout chez Aétius et Eunomius. Les Pères leur reprochent, en effet, l’abus de la terminologie péripatéticienne ; ils s’en prennent à leur « art fallacieux et sophistique » , en d’autres termes, à ce dialecticisme rationaliste et ergoteur qui prétendait mesurer la trinité divine et ses actes immanents d’après les conceptions tout humaines que fournissent les catégories d’Aristote. Ct. S. Épiphane, Hær., lxix, 69, et lxxvi, réfutation de la neuvième proposition d’Aétius, P. G., I. xlii, col. 315, 570 ; S. Basile, Adv. Eimom., I, 9, P. G., t. xxix, col. 531 ; S. Grégoire de Nysse, Contr. Eunom., . I, XII, P. G., t. xlv, col. 266, '906, 907 ; Socrate, II. E., H, 35, P. G., t. lxvii, col. 300 ; Théodoret, Hseret. fabul., iv, 3, P. G., t. lxxxiii, col. 420. Parmi les auteurs modernes qui ont rattaché l’arianisme à l'école d’Antioche, plusieurs ne semblent avoir eu en vue que ce dialecticisme aristotélicien ; tel Newnian dans The Arians of the fourth century, c. I, sect. I et ii, 4e édit., Londres, 1876.

En fait, il y a dans la doctrine arienne des infiltrations platoniciennes, mais par l’intermédiaire de Philon ; ainsi en est-il, en particulier, de la théorie du Logosdémiurge, sous la forme judéo-gnostiqne qu’elle a reçue du philosophe alexandrin. Pour s’en convaincre, il suffit de comparer avec la doctrine arienne du Logos celle de Philon, étudiée dans quelques travaux récents. Schwane, Histoire des dogmes, trad. par l’abbé P. Bélet, Paris, 1886, t. i, p. 87, 88 ; James Drummond, Philo judœus, c. vi, Londres, 1888, t. il ; Anathon Aall, Gescliichtc der Logosidce in der grieeltiachen Philosophie, c. viii, et Geschichle der Logosidee in der christlichen Philoso^ phie, Leipzig, 1896 et 1899, p. 464, 465. Du reste, les points de contact entre les deux doctrines ont été souvent signalés. Hefele, Hisl. des conciles, trad. Leclercq, t. i, p.335. Stôckl, Geschichte der christlichen Philosophie zur Zeit der Kirchenvàter, Mayence, 1891, p. 205-209. Saint Grégoire de Nysse suppose même qu’en soutenant leur conception fondamentale de Dieu le Père, seul à.yiwr- : o :, seul avapy/j ;, les ariens prétendaient s’appuyer sur un passage de Platon dans Phèdre, 245 d, où on lit : àpyr os àféwviTov. Contra Eunom., 1. IX, P. G., t. xi.v, col. 813 ; Th. de Régnon, op. cit., 3 « série a, p. 200, 201.

Par ailleurs, il est impossible de ramener la genèse de l’arianisme au seul philonisme, même en y comprenant les éléments d’ordre composite qui s’y rencontrent, et ceux qu’Origène a pu surajouter ; une part d’influence revient, en dehors même du dialecticisme aristotélicien, à l'école de Lucien d’Antioche. Qu’il y ait entre celui-ci et l’arianismeun lien historique, cela parait indéniable. Arius s’est réclamé avec succès auprès d’Lusèbe de Nicomédie du titre de « conlucianiste » . Beaucoup d’autres disciples de Lucien se groupèrent dès la première heure autour de l’hérésiarque, et restèrent ses dévoués partisans ; après Eusèbe, Maris de Chalcédoine, Théognis de Nicée, Léonce, futur évêque d’Antioche, Ménophante d'Éphèse, Eudoxe, qui montera sur les sièges d’Antioche et de Constanlinople, Asléiius de (Vippadoce, tels sont les principaux noms que relève l’histoire de ecte, Philostorge, II, 1 i, P. G., t. i w, col. 478.