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ARIANISME, RÉACTION ANTI-NICÉENNE


saint docteur, ses Orationes advenus arianos. Apostolat fécond pour l'Église de l’avenir, et bientôt même pour l'Église d’alors.

En attendant, les jours de deuil étaient venus à peu près partout. A Antioche, l'évêque Léonce, tout en évitant la persécution directe, minait lentement le parti des catholiques par une voie détournée ; il ne laissait entrer dans le clergé aucun sujet qu’il soupçonnât d’avoir des sentiments orthodoxes, et ne donnait les ordres sacrés qu'à des ariens. A Constantinople, Macédonius continuait ses violences contre les catholiques ; privés de toutes leurs églises, ceux-ci se virent réduits à assister aux offices chez les novatiens. Socrate, il, 38, P. G., t. lxvii, col. 324 sq. En Gaule, la lutte devenait ardente sous l’impulsion et la conduite d’un homme qui apparaît alors sur la scène dans toute la grandeur de son noble rôle, saint Hilaire de Poitiers, devenu depuis quelques années déjà le vrai chef et l’organe du parti nicéen dans les Gaules, l’Athanase de l’Occident. Vers la fin de 355 ou le début de 356, il compose sa première requête à l’empereur Constance, Ad Constanlium auguslum liber primus, où il le supplie de faire cesser la persécution dirigée contre l'Église catholique et réclame pour saint Athanase un tribunal libre et impartial. Bientôt après, il fait excommunier par un synode d'évêques gaulois les auteurs de la nouvelle persécution, Ursace, Valens et Saturnin, le primat arien d’Arles. Mais ce dernier, d’accord avec les deux autres, convoque à son tour un synode à Béziers. L'évêque de Poitiers, forcé d’y venir, essaie vainement de faire confirmer la sentence du concile de Sardique en faveur de saint Athanase ; il est luimême signalé, avec Rodane de Toulouse, à l’animosité de l’empereur Constance. Avant le mois de juin 356, tous deux partent pour l’exil en Phrygie, et peu après saint Rodane y meurt. Mais les évêques gaulois restèrent en communion avec Hilaire, et ne voulurent pas entrer dans celle de Saturnin.

Telle était la situation de l'Église après la nouvelle lutte dont la mort de Constant avait donné le signal ; situation déplorable, humainement parlant. Tous les grands sièges d’Orient étaient aux mains des eusébiens ou des ariens, Alexandrie, Antioche, Césarée, Constantinople. Saint Cyrille de Jérusalem, élu évêque vers 350 bous l’influence d’Acace de Césarée, n'était pas encore rallié au parti nicéen. En Occident, ni les évêques ni le peuple n'étaient ariens, Constance put s’en rendre compte pendant son voyagea Rome en 357 ; mais le pape et les membres les plus notables de l'épiscopat étaient en exil. Pourtant, dans ce triomphe extérieur de la coalition anti-nicéenne, il n’y avait qu’un résultat très superficiel, dû presque partout à la violence et reposant, même en Orient, sur une base factice. Les événements allaient se charger de le faire voir, en développant les germes de discorde que l’arianisme recelait en son

il. Fractionnement du parti anti-nicéen. — L’union

avait été' facile, tant que le parti anti-nicéen avait été un parti de combat, groupant dans ses rangs tous ceux qui, pour un motif quelconque, étaient opposés àl'âftoovBio( de Nicée ou gardaient des préventions contre saint Athanase et les autres chefs du parti nicéen. La victoire une fois remportée sur le terrain de la négation ou de l’opposition, les anti-nicéens de nuance conservatrice allaient B’apercevoir qu’ils étaient fort peu avancés et qu’il leur serait autrement difficile de devenir un parti doctrinal, en fixant un credo positif. Leurs attaques mêmes contre l’i|iooùato< ; avaient déjà produit un résultat que la plupart d’entre eux n’avaient certainement pas en vue, celui de faire renaître l’arianisme strict, peu à peu abandonné après le concile de Nicée. De la, un fractionnement du parti en trois groupes distincts. Hist. des concile » , trad. Leclercq, t. I, §77. A l’extrême gauche, l’arianisme primitif reparaît

avec Aétius et Eunomius, suivis de leurs disciples qui empruntent à leurs chefs leur dénomination d’aétiens ou eunomiens, et à la note caractéristique de leur erreur, l’appellation plus expressive d’anoméens. Reprenant en effet la doctrine hétérousiaste d’Arius, ils proclament ouvertement que le Fils est d’une autre substance que le Père, qu’il a été créé du néant, et qu’en cons ; quence il est en tout dissemblable d’avec le Père, àvô(ioioç y.a’i xarà navra xai xoct' oûfftav. Mais ils systématisent cette doctrine, en s’appuyant sur ce dialeeticisme aristotélicien qui, au rapport des anciens historiens, fit toute leur force dans la discussion. Les points où les anoméensse séparaient de l’arianisme primitif étaient secondaires par rapport au fond de la controverse, qui roulait sur la divinité du Verbe. Voir Anoméens, col. 1322-1325. Ce premier groupe d’anti-nicéens comprenait, en dehors des disciples personnels d’Aétius et d’Eunomius, les anciens partisans d’Arius, qui n’avaient pas approuvé les concessions faites pendant ou après la concile de Nicée, mais qui avaient compris que, pour vaincre les orthodoxes, il fallait se prêter aux circonstances, çt faire cause commune avec les eusébiens de toute nuance.

A l’opposé, se présentait le groupe de ceux qu’on désigne habituellement sous le nom de semi-ariens, rijviâpeiot, nom employé par saint Épiphane, Hxi, lxxiii, P. G., t. xlii, col. 400, et que nous retrouverons dans plusieurs conciles. Sous le rapport doctrinal, ils portent l’appellation plus expressive d’homéousiens, tirée du terme ôu.otojo-ioç, semblable en substance ou d’essence semblable, qu’ils voulaient substituer à l'ôu.ooJffio ;, de même substance. Quelle était exactement la portée de cette substitution, c’est un problème moins facile à résoudre d’une façon absolue ; car il y eut dans ce parti des nuances distinctes et, chez les individus eux-mêmes, des changements de position et de vues, en sorte qu’on ne peut pas les apprécier de la même manière suivant qu’on les regarde à tel ou tel moment de la controverse avec les nicéens. L'élément commun, c’est l’opposition ou la défiance à l’endroit du terme i(j.oQv<Tioç ; attitude dont nous avons déjà vu les raisons générales : pourquoi un terme nouveau qui n’est pas dans la sainte Écriture ? surtout quand il est de saveur sabellienne, ou du moins équivoque, comme n’indiquant pas assez nettement la différence personnelle entre le Père et le Fils ? L’affaire de Marcel d’Ancyre et de son disciple Photin de Sirmium n’avait fait que fortifier et, à leurs yeux, justifier ces préventions. Il y eut eerta'.iement dans les rangs des homéousiens des évêques qui n’allèrent pas plus loin ; orthodoxes en réalité, attachés à la foi de Nicée, mais se trouvant en dehors du parti nicéen par suite de diverses circonstances. Ceux-là ne méritaient pas, à proprement parler, le nom de semi-ariens. Tels furent, par exemple, saint Mélèce d’Antioche, et saint Cyrille de Jérusalem, qui, dans ses célèbres « Catéchèses » prononcées vers 348, avant son élévation à l'épiscopat, évite constamment d’emplover le mot àjvoo-JTtoc, tout en enseignant la divinité, l'éternité et la consubstantialité du Fils. Petau, De Trinilalc, 1. I, c. xi, n. 1 ; c. xiii, n. 7-11 ; Harnack, Lehrbucli der Dogmengeschichte, 3e édit., t. ii, p. 241, note 2.

D’autres évêques allèrent certainement plus loin, ne voulant pas de l’Aiiootatoc, parce qu’au fond ils n’admi tlaient pas la doctrine rendue par ce mol, ou ne l’admettaient pas pleinement. Sans nier la divinité du Verbe et tout en admettant la similitude d’essence ou la parfaite similitude entre le Père et le Fils, 8u, oio< xarà navra xa xarà tt)v oùaiav, ils soutenaient la subordination du Fils, et opposaient la similitude d’essence à l’identité de substance. De plus, leur conception de la génération divine comme acte libre du Père les amenait souvent.i ne pas sauvegarder dans le Fils I éternité essentielle, Ils se rattachaient incontestablement, sous le rapport « de