Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.2.djvu/5

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
1505
1506
APOLLINAIRE DE SAINT-THOMAS — APOLLINAIRE LE JEUNE

2. APOLLINAIRE DE SAINT-THOMAS, de l’ordre des carmes ; on a de lui un Enchiridion polemicum dugmaticæ theologiæ juxta mentem angelici doctoris et P. P. Salmanticensium doctrinam, in-4°, Naples 1736.

Hurter, Nomenclator literarius, t. ii, Inspruck, 1893, col. 1302.

V. Oblet.

3. APOLLINAIRE L’ANCIEN, au ive siècle, grammairien à Béryte, puis à Laodicée en Syrie, fut fait prêtre de cette église et compta parmi les tenants les plus fermes de saint Athanase et du concile de Nicée. Lorsqu’en 362 Julien l’Apostat, jaloux d’écarter le christianisme des écoles, défendit aux professeurs chrétiens de lire dans leurs classes et de commenter les poètes ou les philosophes grecs, les deux Apollinaire, le père et le fils, esprits très cultivés et très faciles, s’évertuèrent à remplacer par des livres nouveaux les chefs-d’œuvre de l’art antique, et à rendre ainsi l’enseignement possible aux fidèles. Suivant Socrate, Hist. eccl., III, c. xvi, P. G., t. lxvii, col. 417, Apollinaire l’Ancien traduisit le Pentateuque en vers hexamètres, puisa dans les deux premiers livres des Rois un poème épique en vingt-quatre chants, fit des tragédies sur le modèle d’Euripide, des comédies à la façon de Ménandre, des odes imitées de Pindare. Cette littérature grecque improvisée, que n’animait point le souffle du génie, ne survécut pas à l’édit de Julien. Dès que Valentinien Ier l’eut révoqué, partout on en revint à l’étude des grands écrivains classiques, et de la tentative des Apollinaire il n’est resté qu’un souvenir.

Bardenhewer, Les Pères de l’Église, leur vie et leurs œuvres, traduction française, in-8°, Paris, 1899, t. ii, p. 16.

P. Godet.

4. APOLLINAIRE LE JEUNE et les APOLLINARISTES.—

I. Apollinaire le Jeune.

Fils du précédent, il monta sur le siège de Laodicée en 362 et mourut après 390. Théologien, polémiste, exégète, littérateur, il a été, dans l’Eglise grecque du ive siècle, un des personnages les plus en vue. Comme son père, il s’efforça de paralyser l’édit de Julien et de sauver les écoles chrétiennes. Selon Socrate, Hist. eccl., III, c. xvi, P. G., t. lxvii, col. 417, il mit pour sa part le Nouveau Testament en dialogues calqués sur ceux de Platon, et qui tous ont péri. En revanche, on a souvent imprimé sous son nom une paraphrase du psautier en vers hexamètres, P. G., t. xxxiii, col. 1313-1538 ; mais, devant le silence de l’antiquité, l’authenticité de l’ouvrage n’est rien moins que sûre. V. la littérature du sujet dans Krumbacher, Geschichte der byzantinisclien Lileratur, in-8°, Munich, 1891, p. 306, note 2. La paraphrase versifiée de l’Évangile de saint Jean, que l’on attribue communément à Nonnus de Panopolis, P. G., t. mil, col. 7494228, serait, d’après M. Dræseke, l’œuvre d’Apollinaire le Jeune. Pure hypothèse, qui présentement n’a point de base solide. La paraphrase du psautier et celle de saint Jean n’ont pas encore été comparées entre elles d’assez près. Quant à la tragédie du Christ souffrant, XpinTÔ ; Tvàaxwv, un centon du xr siècle, M. Dræseke seul en fait honneur à l’évoque de Laodicée.

Exégète (’minent, Apollinaire, dit saint Jérôme, De vir. ill., civ, P. L., t. xxiii, col. 7’t2, composa « d’innombrables volumes sur les saintes Écritures » . Et de fait, les chaînes nous ont conservé de lui nombre de fragments sur les Proverbes, sur Ézécbiel, sur Isaïe, sur I I pitre aux Romains. Mai, Nova Patrum biblioth., Home, 1851, t. vii, pars II, p. 76-80, 82-91, 128-190. Mais h critique ne les a pas encore tous recueillis et passés à son crible.

Des travaux du polémiste, il ne nous est presque rien resté : ni les trente livres contre Porphyre, œuvre d’un rire mérite, au dire de saint Jérôme, op. cit., ibid., ni l’apologie contre Julien et les philosophes grecs, intitulée De la vérité, el que M. Dræseke s est avisé sans raisons suffisantes d’identifier avec l’Exhortation aux gentils du pseudo-Justin ; ni peut-être Y Anlirrheticus contra Eunomium, que M. Dræseke croit retrouver dans les deux derniers livres du traité de saint Basile contre Eunomius.

Les ouvrages théologiques d’Apollinaire, écrits après sa chute et pour soutenir ses erreurs, ne nous ont été longtemps connus que par les citations qu’en ont faites les Pères dans leurs répliques, notamment saint Grégoire de Nysse et Théodoret. On lisait toutefois dans l’opuscule Adversus fraudes apollinaristarum que, pour tromper les simples, apollinaristes et monophysites avaient fait circuler des écrits d’Apollinaire sous les noms de saint Grégoire le Thaumaturge, de saint Athanase, du pape saint Jules. P. G., t. lxxxvi, col. 1918. Lequien, au xviiie siècle, et de nos jours M. Caspari, Aile und neue Quellen zur Geschichle des Taufsymbols, 1879, p. 65 sq., ont restitué à l’évêque de Laodicée la Fidei expositio, ’H —/ara népo ; itlaziç, à laquelle on attache d’ordinaire le nom du Thaumaturge, et le traité du pseudo-Athanase Sur l’incarnation du Verbe, Ilsp’t tri ; 6e£aç <rapy.(ôiEu> ;, etc. Tous les deux ont aussi reconnu la main soit d’Apollinaire lui-même, soit de l’un des premiers apollinaristes, dans quatre lettrée on dissertations grecques attribuées au pape saint Jules. P. L., t. viii, col. 873-877, 929-936, 953-961. M. Dræseke va plus loin, et réclame pour Apollinaire, après une enquête trop hâtive, YExposilio rectæ fidei d pseudo-Justin dans la recension brève, trois homélie* sous le nom du Thaumaturge, P. G., t. X, col. 1145 sq., -6t les trois premiers d’entre les dialogues De la Trinité, sous le nom de Théodoret, P. G., t. xxviii, col. 1115-1338.

Apollinaire le jeune avait commencé par être un des champions du concile de Nicée, un des frères d’armes de saint Athanase. Mais son ardeur à combattre l’arianisme l’entraîna dans l’erreur opposée. Comme il tenait pour impossible, d’une part, qu’une seule et même personne contint en elle deux natures parfaites, de l’autre, que l’impeccabilité fût l’apanage d’une volonté libre, il s’imagina qu’on ne pouvait pas sauver la nature divine de Jésus-Christ, sans mutiler sa nature humaine ; et s appuyant, en hellène raffiné qu’il était, sur la trichotomie platonicienne, il dénia au rédempteur, sinon un corps humain avec l’âme sensible qui l’anime, du moins une âme raisonnable, voO ; ou r.ve0|i.a, puisque aussi bien, selon Apollinaire, la divinité même lui en tient lieu. C’était frayer les voies au monophysisme. Pour défendre contre l’erreur d’Apollinaire l’intégrité de la nature humaine du Verbe et replacer sur sa hase le dogme de la rédemption, les Pères en appelèrent à l’envi au grand principe traditionnel : Quod non est assumptum, non est sanatum. Parmi eux on remarque saint Athanase, saint Grégoire de Nazianza, saint Grégoire de Nysse, saint Épiphane, Diodore de Tarse, Théodore de Mopsueste et Théodoret. Dès 362, un concile d’Alexandrie condamna le novateur, en déclarant que le Verbe n’a pas pris un corps inanimé, un corps privé de sentiment ou de raison. Trois conciles romains, en 374, 376, 380, et le deuxième concile général de Constantinople, en 381, le frappèrent à leur tour d’anathème.

II. Les apollinaristes.

Apollinaire ne rompit avec l’Église qu’en 375. La secte qui emprunta de lui son nom, compta dans Constantinople au ive siècle une foule d’adhérents et se répandit surtout à travers la Syrie et la Phénicie. Elle eut, avec ses Églises propres, ses évêques à elle, personnages graves, éloquents et savants pour la plupart, entre autres Vilalis dans Anlioche, l’historien Timothée dans Béryte, et adopta des rites à part, et Sozomène, II. E., vi, 25, P. G., t. lxvii, col. 1357, assure notamment qu’aux psaumes on substituait des cantiques composés par Apollinaire, aujourd’hui totalement perdus.

Peu après la mort d’Apollinaire, la secte se divisa en deux partis : l’un plus prudent ou plus timide, dont