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AUTHENTICITE


1° Sous la plume des anciens écrivains grecs, il a gardé sa signification étymologique : ocj-roév : /, :  ; il avait le même sens que aÙTÔyetp et désignait quelqu’un qui se tue ou tue autrui de sa propre main. Hézychius, Lexicon, Leyde, 1746, t. i, col. 612, 621. Il a ce sens, Sap., xii, G, et dans Clément d’Alexandrie, Strom., iv, 4, P. G., t. viii, col. 1229.

2° Mais dans les ouvrages des écrivains plus récents, il a été employé avec une autre signification et il a désigné quelqu’un qui a autorité, qui est maître, agent, auteur. Suidas, Lexicon, Genève, 1619, 1. 1, p. 489-490. AùŒvteÏv signifiait : avoir autorité, exercer autorité, I Tim., il, 12 ; a-J8evxia, autorité et volonté propre ; ocOŒvrixài ; Ttoisîv, agir librement. Qusest. ad Grsecos, iii, P. G., t. vi, col. 1436 ; Clément d’Alexandrie, Strom., I, 7, P. G., t. viii, col. 733.Aù6evTixbv et aulltenlicum, pris substantivement, désignaient l’original d’une pièce. S. Grégoire le Grand, Episl., 1. I, epist. xliv, P. L., t. lxxvii, col. 508 ; Digeste, 1. X, c. ii, 4, 8 ; 1. XXII, c iv, 2 ; 1. XXIX, c. iii, 12. Comme adjectif, aùflevttxdç, authenticus, signifiait « qui fait autorité » . Tertullien, Adv. valentin., c. IV, P. L., t. ii, col. 546, parle de la « règle authentique » de l’Église, dont Valentin s’est séparé. Durant tout le cours du moyen âge, soit en langage de droit, soit dans le style des théologiens, on a appelé authentiques des documents, des écrits qui faisaient foi par eux-mêmes et dont on ne pouvait récuser l’autorité en justice ou dans l’enseignement théologique. Mamert Claudien, écrivain du Ve siècle, De stalu animai, I. I, c. il ; 1. II, c. ix, n. 4, P. L., t. lui, col. 701, 753, parle des authenticorum plurimoruni traclatores, et recourt à leur autorité en passant a Iraclatoribus ad authenticus. Sidoine Apollinaire écrit à Perpétue, évêque de Tours, à qui tant per authenticus quam per disputatores bibliotheca fidei catholicse perfamiliaris est. Epist., 1. VII, epist. ix, P. L., t. i.vm, col. 575. Au xiie siècle, la faculté de droit de Bologne a pris comme texte officiel de son enseignement la version latine des Novelles de Justinien, qui a eu dès lors dans l’École les noms de Corpus authenticum, Aulhenticum, Authenlica (au pluriel), Liber authenticorum-. Hugues de Saint-Victor, Erudit. didascal., . IV, c. xiv, P. L., t. CLXXVI, col. 786-787, expose quels sont, parmi les chrétiens, les scriptural authenticse, et il énumère les principaux Pères grecs et latins, qui sont, comme nous dirions aujourd’hui, des « autorités » . Jean Iialbi, dit Jean de Gènes, dans son Catholicurn, composé en 1286, explique authenticus dans ce sens : A uctoritate plenus, vel fide dignus, eut primo credébatur ex sui dignilate. Pierre de Bergame, Tabula aurea, au mot magister, dans les Opéra de saint Thomas, Anvers, 1612, t. xviii, p. 164 verso, écrit : Magister Sententiarwm non est authenticus ; ideo in >nuliis mm tenetur. Ses Sentences n’ont pas une autorité décisive, et il n’est pas nécessaire de suivre en tout son sentiment. Pierre de Bergame cite ensuite plusieurs passages dans lesquels Saint Thomas s’écarte de Pierre Lombard. Honelli, Prodromus ad omniaoperaS. Bonaventurse, 1. V, indic. v, Bassano, 1767, p. 224, rapporte les paroles d’un moine de I ulda qui, au XIVe siècle ilisait du commentaire du docteur séraphique sur les Sentences : « Il est 1res approuve’par les docteurs en texte sacré et réputé quasi authentique. « Pierre d’Aillv, Tract, contra J.de Montesono, dans DupIessisd’Argentré, Collectio judiciorumdfinovis errordms, Paris, ~’.'.’, .. i b, p. 21, déclare que la doctrine de Baint Anselme et de Hugæs de SaintVictor a ne semble pas moins authentique que celle de saint Thomas, car ils sonl communément allégués comme des autorités dans les écoles ; ils ae doivent pas être contredits, mais il faut , ei exposer avec respect leurs paroles comme on > coutume de faire pour celles de s, mit Thomas » . Il montre encore que le Maître des Sentences est « plus authentique » que saint Thomas et.pie la doctrine du Décret de Gratien est expliquée par les docteurs eu

décrets « comme approuvée et authentique » . Les canonistes actuels appellent « authentique » tout document que l’autorité suprême de l’Église a reconnu officiellement et a imposé comme obligatoire. Les Congrégations romaines ont publié presque toutes des éditions « authentiques » des décrets qu’elles ont portés. Celle des Rites, par exemple, qui avait authentiqué la collection de ses décrets, faite par Gardellini, en a fait imprimer une autre, authentique et officielle, Décréta authenlica, 5 in-i » , Rome, 1898-1901.

Suicer, Thésauruse patribus gra>cis ordine alpliabctico concinnalus, 1682, t. I, p. 574-570 ; Du Gange, JSlossarium adscriptores médise et infimm latinitatis, 2’ériit., Paris, 1733. t. I, col. 879 ; Forcellini, Totius latinitatis lexicon, Padoue, 1827, 1. 1, p. 357 ; Kaulen, Geschichte der Vulgata. Mayence, 1868, p. 398400 ; Didiot, Logique surnaturelle subjective, 2’édit., Paris, LiUe, 1894, p. 118-122.

3° Les écrivains modernes ont donné au mot : authentique, un sens nouveau, inconnu des anciens et rattaché à la signification d’auteur. « Un écrit est authentique quand il est réellement sorti de la plume de celui à qui on l’attribue, ou, si l’auteur est inconnu, quand il date de l’époque à laquelle on rapporte sa composition. Ainsi l’Enéide est authentique parce qu’elle est réellement l’œuvre de Virgile ; la Salire Ménippée est aussi authentique, quels qu’en soient les auteurs, parce qu’elle date du temps de la Ligue » . F. Vigouroux, La Bible et la critique, Paris, 1883, p. 11. L’authenticité d’un livre consiste donc dans l’exactitude des attributions d’auteur et d’origine, de temps et de lieu, sous lesquelles un livre se présente communément aux lecteurs. Il est évident que l’authenticité, ainsi entendue au point de vue critique, diffère de l’authenticité de droit, conférée officiellement par l’autorité compétente à un document. La langue allemande a deux expressions distinctes pour désigner deux notions différentes que nous exprimons en français par le même mot d’authenticité. Elle appelle Authentie l’authenticité critique et Authenlicitât le caractère officiel conféré à un ouvrage. Kirclienle.rikon, -2e édit., Fribourg-en-Brisgau, 1882, t. i, col. 1730-1731. Cf. A. Tanquerey, Synopsis theologix dogmatiese. 3e édit., Tournai, 1899, t. i, p. 113, notel. Un livre qui certainement n’est pas de l’écrivain dont il porte le nom est dit apocryphe. Il est des ouvrages dont l’authenticité est seulement douteuse.

II. Significations i’sitkes dans le langage théologique. — Les nuits : authentique et authenticité, oui été employés par les écrivains ecclésiastiques et ils le sont encore par les théologiens dans leurs deux dernières acceptions.

p<> acception : qui fait autorité. — Cette acception a été appliquée aux Livres saints eux-mêmes et en particulier à la Vulgate latine.

1 » Authenticité des Livres saints. — Tertullien, De prsBScript., 36, P. /.., t. ii, col. 49, pour prouver la vérité de la foi catholique, fait appel au témoignage des Églises apostoliques, apud quas, dit-il, ipsæ authenticse litteræ eorum (des apôtres) recitantur, soutîntes vocem et représentantes faciem uniuscujusque. Quelques critiques ont soutenu que par ces authenticse litlerse Tertullien entendait la minute même des Épltres des apôtres. Mais celle explication est contestée, el on entend plus communément ces paroles des manuscrits grecs, sonantes vocem, écrits dans la langue même « pie parlaient les apôtres. Discutant ailleurs. De monogamia, II, /’. /.., 1. ii, col. 946, un texte de saint Paul, il dit : Sciamus plane mm suesse tu grseco authentico. Par les lettres authentiques des apôtres, il entendait donc le texte original. On comprend 1res bien que Tertullien recoure à l’autorité du texte grec, s’il est vrai, comme plusieurs critiques le pensent, qu’il n’y avait pas encore de version latine de toute l’Écriture. Le K^pwytia Elfrpov, cité par Clément d’Alexandrie, Strom., vi, 15, /’. G.,