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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.djvu/140

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ABSOLUTION DES PÈCHES SOUS FORME DEPRECATOIRE


forme déprécatoire a été en usage drns l’Église latine jusqu’au xiiie siècle ; elle est encore employée par les grecs unis et non-unis, parles coptes unis et non-unis, par les nestoriens. — Les formules des jacobites peuvent être considérées comme indicatives ou comme déprécatoires, suivant l’interprétation qu’on leur donne.

Décisions des conciles et du Saint-Siège.

1. Los unes semblent exclure la forme déprécatoire. Telle est la déclaration du concile de Florence dans le décret aux arméniens (1441) : « La forme de ce sacrement (de pénitence ) sont les paroles de l’absolution que le prêtre prononce lorsqu’il dit : Je t’absous, etc. » Forma hujus sacramenti sunt verba absolutionis quæ sacerdos profert, cum dicit : Ego te absolvo, etc. Denzinger, Enchiridion symbolorum, n. 591. Telle est encore la déclaration du concile de Trente, au chapitre m de la XIVe session (1651) :

Docet præterea sancta synoLe saint concile enseigne en

dus sacramenti p ; enitentiae foroutre que la forme du sacremam, in qua præcipue ipsius ment de pénitence, en laquelle vissita est, in illis ministri verest placée principalement sa bis positam esse, Er/o te absolvertu, se trouve dans ces pavo, etc., quibus quidem de Ecrôles du ministre : Je fabsous, clesiæ sancUe more preces quæetc., auxquelles sont jointes dam laudabiliter adjunguntur : d’une façon louable quelques ad ipsius tamen formée essenprières, d’après l’usage de la tiam nequaquam spectant, nesainte Église ; cependant ces que ad hujus sacramenti admiprières n’appartiennent pas à nistrationem sunt necessarise. l’essence de la forme elle-même, et elles ne sont pas nécessaires

pour l’administration de ce sa crement.

Le concile distingue clairement entre la formule indicative Ego te absolvo et les prières ou formules déprécatoires Misereatur, Indulgentiam, Passio Domini qui la précèdent ou qui la suivent. Il enseigne dogmatiquement, docet, que la forme du sacrement consiste dans lu première formule, et que les prières qui y sont jointes n’entrent pas dans l’essence de cette forme, ni ne sont nécessaires. Il ne leur reconnaît donc aucune efficacité pour l’absolution elle-même.

On peut regarder aussi comme défavorables à la forme déprécatoire les prescriptions faites aux syriens unis de se servir de la forme latine, bien que les anciens rituels syriaques expriment l’absolution par des formules déprécatoires. Voir IX Absolution chez les syriens, col. 210.

2. D’autres actes de l’autorité ecclésiastique reconnaissent au contraire la validité des formules déprécatoires. Ces formules sont en effet autorisées par le Saint-Siège pour les grecs unis et les coptes unis. Elles sont conservées dans les rituels imprimés à Rome, à la Propagande, pour leur usage.

3. On peut regarder comme favorables et défavorables â la validité de la forme déprécatoire, les prescriptions données aux prêtres grecs unis par Clément VIII et Benoit XIV d’employer la formule indicative pour l’absolution des latins, en y ajoutant ou non les formules déprécatoires dont ils se servent pour l’absolution des grecs. Voir VII Absolution chez les Grecs, col. 202. Le Saint-Siège ne peut en effet autoriser l’usage des formules déprécatoires, pour l’absolution des grecs, si elles sont invalides, et il semble que si elles étaient valides pour absoudre les latins, on ne devrait pas, lorsqu’il s’agit de ces derniers, imposer l’absolution indicative aux prêtres grecs.

Raisons théologiques.

D’après les paroles du Christ, le prêtre qui absout, au sacrement de pénitence, prononce une sentence que Dieu ratifie. Qusecumque solveris super terram erant soluta et in cselo. Matth., xiv, 19 ; XVIII, 18. Quorum remiserilis peccala remittuntur’eis. Joa., xx, 21. Il n’est donc pas seulement ministre et instrument de Dieu dans ce sacrement, comme dans le baptême. Il y est encore juge pour remettre les péchés. Aussi le concile de Trente a-t-il défini que l’absolution

sacramentelle est un jugement : Si quis dixerit dbsolw tionem sacramentalem sacerdolis non esse action judvcialetn ; analhema sit. Sess. XIV, can. 9. Puisque la forme du sacrement doit en exprimer la nature et les ellets, l’absolution ne saurait donc être une simple prière à Dieu ; il faut qu’elle ait le caractère de sentence portée par le prêtre. C’est pourquoi une forme purement déprécatoire ne paraît point valide, tandis que la forme indicative et absolue l’est certainement, si elle remplit, d’ailleurs, les autres conditions requises.

Cependant, c’est Dieu qui exécute la sentence du prêtre. Car c’est Dieu qui donne la grâce sanctifiante par laquelle les péchés sont effacés. Aussi l’absolution semble-t-elle pouvoir revêtir la forme d’une prière à Dieu, pourvu qu’elle manifeste clairement que cette prière est faite pour l’exécution d’une sentence portée par le prêtre, comme ministre du sacrement.

Telles sont les principales raisons invoquées, la première contre la validité’de la forme déprécatoire, la seconde en faveur de cette validité.

iv. uisTijiUE de la question. — I" Avant le co-ncile de Trente. — La question de la validité de l’absolution déprécatoire est posée depuis le XIIIe siècle. Nous avons dit dans un article précédent (voir IV Absolution, Sentiments des anciens scolastiqites, § 4, col. 190) que saint Thomas d’Aquin s’était prononcé contre la validité de cette absolution et que son opinion avait été généralement suivie par les auteurs du XIVe et du xve siècle.

2° Du concile de Trente au. milieu du xvie siècle. — En déclarant que la formule : Ego te absolvo, est la forme du sacrement de pénitence, les conciles de Florence et de Trente apportèrent à cette opinion une nouvelle autorité. Saint Thomas et les auteurs antérieurs au XVIe siècle s’étaient surtout appuyés sur les textes de l’Ecriture pour contester la validité de la forme déprécatoire ; les auteurs qui écrivirent après les déclarations du concile de Trente s’appuyèrent surtout sur ces déclarations. Cependant, comme nous le dirons, ils admirent en général que certaines formules déprécatoires sont valides, parce qu’elles équivalent à la forme indicative. Jusque dans la dernière moitié du XVIIe siècle, ils se préoccupèrent peu des difficultés que leur thèse rencontrait dans les liturgies anciennes ou orientales. Dominique Soto(† 1560), / VSent., l. IV, disp. III, a. 5, Douai, 1612 ; Vasquez(fl604), /n lll àm partem, q. lxxxiv, a. 5. Lyon, 1620, t. iv, p. 14 ; Estius († 1613), IV Sent., l. IV, disp. XV, § 3, Paris, 1696, t. ii, p. 186 ; Suarez († 1617), In lll* m partem, q. lxxxvi, disp. XIX, sect. I, n. 25. Opéra, Paris, 1872, t. xxii, p. 408 ; Jean de Saint-Thomas († 1644), In J77 am partem, disp. XXIII, a. 3, n. 14, Opéra, Paris, 1886, t. ix, p.593, et Sylvius (-J-1649), In III am partem, q. lxxxvi, a. 3, Opéra, Anvers, 1695, t. iv, p. 414, n’en parlent point. De Lugo († 1660), De virtute et sacramento pœnitentise, disp. XIII, sect. iv, n. 105, Lyon, 1644, p. 211, en dit seulement quelques mots d’après Arcudius. C’est pourquoi les solutions proposées à cette époque étaient surtout de celles qui s’appliquent à des hypothèses et que nous avons appelées théoriques. Il en est résulté que les auteurs que nous venons de citer sont relativement brefs sur la question. Ces auteurs admettent tous expressément la validité de certaines formules déprécatoires, à l’exception de Vasquez et de Jean de Saint-Thomas, qui semblent les exclure toutes, sans pourtant le dire nettement.

3° Au milieu du xvw siècle, des renseignements nouveaux à plus d’un égard sur les liturgies anciennes ou orientales vinrent augmenter l’intérêt de la question et y ajouter du développement. Le Grec Arcudius († 1632) fut le premier à entrer dans cette voie, en publiant en 1619 son ouvrage De concordia Ecclesix occidentiilis et orientons in septem sacramentorum administralione. Il nous apprend lui-même qu’aucun Latin ne l’avait fait avant lui, op. cit., l. IV, c. iii, édition de