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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.djvu/299

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AGAPES — AGAPET I"

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gnant les hospices pour étrangers et supposant que ces hospices pourront, en cas de besoin, recourir à l’église. Passé le ive siècle, il n’est plus fait mention d’agapes, à notre connaissance.

Il est à supposer que les agapes, exclues de l’intérieur des basiliques, durent se fondre dans les services charitables de l’Église, diaconies, xenodochia ou hospices, orphanotrophia, etc., qui répondaient aux exigences d’une administration sociale plus compliquée et plus économique.

Mais il faut signaler quelques derniers faits où les agapes du temps de Tertullien et de saint Hippolyte pensèrent trouver une survie, promptement arrêtée par l’autorité ecclésiastique. Exclues des basiliques urbaines, elles avaient trouvé un refuge dans les églises cimitériales, et là elles s’associèrent au culte des défunts. Saint Paulin, Epist., xiii, 11-16, P. L., t. lxi, col. 213217, rapporte que Pammachius, le riche proconsulaire, donna un repas aux pauvres de Rome, dans la basilique de Saint-Pierre. Saint Paulin fait de ce banquet une peinture pathétique ; il décrit la foule inondant la basilique et l’atrium, s’asseyant à terre par groupes auxquels on distribue les vivres et des aumônes en argent. Cette lettre de saint Paulin date de 397. Mais ce qu’il faut relever c’est que ce repas était donné par Pammachius en l’honneur de sa défunte femme, Paulina : c’est un repas funèbre. Et si saint Paulin s’applique à bien montrer que pareil repas funèbre est une aumône et une prière pour le soulagement de l’âme de la morte, c’est que le danger était grand de confondre ces repas cimitériaux avec les parental ta des païens. Saint Augustin, Conf., vi, 2, P. L., t. xxxii, col. 719, nous montre sa mère, à son arrivée à Milan, se disposant à visiter les « mémoires des saints » ou les « mémoires des défunts » ; elle s’y rendit, « comme elle avait coutume de faire en Afrique, » portant dans un panier les provisions de rigueur à manger et à distribuer, canistrum cum soleninibus epulis preegustandis atque largiendis, du viii, du pain, de la bouillie de farine. Mais Yosliarius lui interdit d’en rien faire, en lui représentant que l’évêque, saint Ambroise, a interdit ces dévotions, pour cette raison que ces distributions de vivres donnaient lieu à des intempérances et qu’elles ressemblaient trop aux parentalia : Quia Ma quasi parentalia superslitioni gentilium essent simiUima. Saint Augustin devait entrer dans les vues de saint Ambroise, car un de ses premiers actes à son retour en Afrique fut de promouvoir la suppression de l’usage qu’il avait vu supprimer à Milan. En 392, il écrit à Aurélien, évêque de Carthage, pour dénoncer l’usage existant de célébrer dans les cimetières des ébriétés et des banquets : Istae in cœmeteriis ebrietates et luxurtosa convivia. Saint Augustin presse l’évêque de Carthage de couper court à l’abus en supprimant ces repas, qui, dit-il, « dans l’Italie presque entière et dans toutes les églises transmarines ou peu s’en faut, ou n’ont jamais été admis, ou ont été supprimés par le zèle des évêques. » Si l’on veut procurer quelque soulagement aux défunts, que l’on fasse des oblaliones pro spirilibus dormientvwm super ipsas memorias, sans toutes ces dépenses. Et si l’on veut donner aux pauvres, qu’on leur donne un peu d’argent. Epist., xxii, P. L., t. xxxiii. col. 90. Saint Jérôme, dans une lettre à Eustochiurn qui date de 381, raconte en termes mordants que les veuves chrétiennes de Rome ne savaient pas faire l’aumône discrètement : Citm ad agapem vocaverint, prseco conducitur. Et il signale à ce propos « la plus noble des dames romaines », distribuant de sa main des nummi un à un aux pauvres dans la basilique de Saint-Pierre, quo religiosior putaretur. F.jist., xxii, 32, P. L., I. xxii, col. 418. Agape était désormais synonyme d’aumône. Ducange cite maint exemple pris à des textes du moyen âge, où faire l’agape, demander l’agape, signifie faire l’aumône et demander l’aumône.

On a cru retrouver les agapes dans un texte où l’historien Socrate, H. E., v, 22, P. G., t. lxvii, col. 636, passant en revue les diversités liturgiques des églises de son temps (circa 4M)), signale, chez « les Égyptiens voisins d’Alexandrie et chez les habitants de la Thébaïde », l’usage d’avoir une synaxe le samedi et « d’y participer aux mystères non comme le veut la coutume des chrétiens » : car « après avoir fait leur repas et s’être repus de toute espèce de nourriture, le soir venu ils font l’oblation et participent aux mystères ». On a voulu voir là une survivance de l’agape primitive ; mais c’est mal comprendre Socrate, qui veut seulement signaler l’usage singulier consistant à célébrer l’eucharistie le samedi soir et à communier sans être à jeun. Et c’est bien ainsi que l’a compris Sozomène, H. E., vii, 19, P. G., t. lxvii, col. 1477, lorsque, démarquant le passage ci-dessus de Socrate, il le rédige ainsi : « Chez les Égyptiens en beaucoup de villes et de villages, contrairement à la loi universelle, on se réunit le soir du samedi après le repas pour participer aux mystères. » Rien des agapes.

II. Conclusions.

Nous pouvons maintenant conclure. Les agapes ont été des repas offerts aux pauvres par l’Église ou par quelque membre riche de l’Eglise. Cet usage fut pratiqué’à Rome, à Alexandrie, à Carthage, en Orient, au temps de Tertullien, de Clément, de saint Hippolyte. Antérieurement on n’en trouve pas trace. Passé le IIIe siècle, les institutions charitables le supplantent ; il n’en reste de vestige que dans les distributions de viii, de pain, qui se faisaient aux pauvres sur les sépultures des familles riches, distributions qui furent supprimées en Italie et en Afrique à la fin du ive siècle, à cause des abus qu’elles entraînaient et du caractère païen qu’on leur prêtait. C’est à ces quelques faits précis que se ramène l’histoire des agapes. Nous voilà loin du rôle que, de Bingham à Renan, on leur attribuait ! Institution apostolique, sinon même divine, reproduction de la cène même du Sauveur, l’agape aurait été le rite primitif de l’eucharistie ; puis, à un moment impossible à déterminer, l’agape aurait été dissociée de la fraction du pain, la fraction du pain serait devenue la messe, l’agape aurait été abandonnée. C’est là un système qui n’a qu’un tort, celui de ne se vérifier pas dans les textes, pour peu qu’on les étudie sans illusion préalable.

Pour la théorie traditionnelle voyez F. X. Kraus, art. Agapen do la Realencyclopâdie der çhristlichen Alterthùmer ; i. Thomas, art. Agapes du Dictionnaire de Ut Bible ; T. Zahn, art. Agapen de la Realencyclopâdie fur protestantische Théologie taid Kirche, 3e édit. ; W. M. Ramsay, The church in the roman Empire, Londres, 1894 ; F. E. Warren, The Liturgy ami ritual of the antenicene Church, Londres, 1897 ; A. Allen, Christian Institutions, Edimbourg, 1898 ; Dictionnaire d’archéologie chrétienne, t. I, col. 775-848.

P. Batiffol.


1. AGAPET I er , pape, sacré le 13 mai 535, mort à Constantinople, le 22 avril 536, d’où son corps fut ramené à Rome et enseveli à Saint-Pierre.

Agapet était fils du prêtre Gordien, du titre de Pammachius, ou des Saints-Jean et Paul ; lui-même était archidiacre de l’Église romaine ; il avait établi une bibliothèque dans sa maison, celle-là même qui, passée plus tard aux mains de saint Grégoire, devint le monastère ad clivurn Scauri. Il ordonna à Rome quatre diacres et onze évêques. Il fut envoyé auprès de l’empereur Justinien par le roi goth Théodat, qui avait fait périr la reine Amalasonte, à laquelle il devait son royaume, et se voyait, pour ce motif, menacé par les armes de Bélisaire. Agapet fut très bien reçu par.lustinien. Il s’occupa des affaires de l’Eglise de Constantinople et réussit à faire descendre de son siège l’évêque Anthime, dont l’élection illégale avait été l’œuvre du parti monophysite. Il le remplaça parle prêtre Mennas qu’il sacra lui-même.

Nous possédons d’Agapet I" huit lettres authentiques. Mansi, Concil. collect, , l. viii, col.846 sq. ; P. L., t. i.xvi, col. 37 sq. ; Jallé Watlenbach, Begesta pontt/icttnt