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ALOGES — ALPHA ET OMÉGA

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les représentants officiels de la tradition ecclésiastique. Les vrais représentants de cette tradition, Irénée et Jipiphane, n’auraient pas manqué de l’invoquer, dans l’espèce, s’il s’était agi d’une question traditionnelle ; car ils en connaissent toute la valeur ; ils y font appel dans leurs écrits comme à un argument décisif. Quant à la contradiction, si complaisamment relevée dans le témoignage d’Épiphane, nous préférerions la regarder comme plus apparente que réelle. Épiphane, en effet, a d’abord traité d’hérétiques des adversaires de la divinité du Logos ; les trouvant sans nom, il propose de les désigner sous le nom d’aloges. A titre d’adversaires du Logos, il sait qu’ils repoussent nécessairement les écrits johanniques ; car, à les admettre, ils se condamneraient eux-mêmes. Mais ce motif d’ordre doctrinal n’exclut pas des motifs d’une autre espèce. Et il se rencontre que certains aloges, des aloges d’Asie, ayant à se plaindre d’avoir été chassés de Thyatire par des montanistes entreprenants, s’efforcent de prendre une revanche, en leur déniant le droit d’appuyer leurs prétentions sur des écrits qui, au lieu d’appartenir à l’apôtre Jean, sont l’œuvre d’un hérétique notoire et ne sont dus qu’à la plume de Cérinthe. Aussi, loin de voir dans la réfutation d’Épiphane une contradiction qui doit seule entrer en ligne de compte, sommes-nous plutôt porté à y voir un supplément d’information, qui nous révèle les arguments nouveaux que les aloges d’Asie font valoir contre les montanistes. Sans doute, à l’époque des grandes controverses trinitaires si vivement débattues, à la fin du 11e siècle et au commencement du iiie, entre monarchiens et trinitaires, cela peut être considéré, comme le dit M. Duchesne, « comme un simple incident de controverse, » Les orig. chrét., 2e édit. lith., p. 258 ; mais cet incident se rattache d’autre part à une question d’ordre dogmatique.

En résumé, les aloges ne sont ni des montanistes (contre Tillemont et Dollinger), ni des traditionnalistes sur la question canonique (contre Harnack), mais de vrais hérétiques, des monarchiens (contre Corssen), qui méritent le nom que leur a donné Épiphane et qui mériteraient encore, à cause de leur opposition au montanisme, en Asie, celui de apneumatiques.

Irénée, Cont. hser., III, xi, 9, P. G., t. vu ; Philastrius, Hxr., P. L., t. XII, col. 1174 ; Épiphane, Hser., LI, P. G., t. xli ; Harnack, Gescliicltte cler allclir. Lit., 1. 1, Leipzig, 1897 ; Dogmengeschiclite, t. i, Fribourg, 1890 ; Corssen, Monarcliianisciie Prologe zu denvier Evangelien, Texte, etc., t. xv, fasc.l", 1896 ; Rose, O. P., Aloges asiates et romains, dans la Revue biblique, 1897 ; Camerlynck, De quarli Evangelii auctore, 1899, p. 145-189.

G. BAREILLE.


ALOZ Marc-Antoine, théologien espagnol de l’ordre de la Trinité pour la rédemption des captifs, naquit à Valence. Il enseigna d’abord l’exégèse et fit paraître successivement un Commentaire in Genesim, in-fol., Valence, et une Dissertation sur les divers sens de la sainte Écriture, in-8°. Devenu dans la suite professeur <le théologie, il rédigea un résumé de ses leçons qui fut imprimé à Valence, 1612, in-4°, sous le titre de Selecturam disputationum theologicarum scholasticarumi. On place généralement l’année de sa mort aux environs de 1656.

Hurter, Nomenclator literarius, Inspruck, 1892, t. i, p. 381.

C. Toussaint.


ALPHA ET OMÉGA, noms de la première et de la dernière lettre de l’alphabet grec, qui ont servi à désigner symboliquement Jésus-Christ. —
I. Dans l’Apocalypse.
II. Chez les Pères.
III. Chez les gnostiques.
IV. Sur les anciens monuments chrétiens.

I. Dans l’Apocalypse, ils sont employés trois fois et la formule dont ils font partie est destinée à attester la certitude d’une annonce prophétique. « Le Seigneur Dieu qui est, qui a été et qui sera, le Tout-Puissant » dit de lui-même : « Je suis l’alpha et l’oméga, le commencement et la fin. » Apoc, i, 8. Les commentateurs ne sont pas d’accord pour déterminer la personne qui parle, si c’est Dieu le Père, ou Jésus-Christ. Le Père est expressément désigné comme l’éternel et le tout-puissant. Apoc, i, 4 ; iv, 8. Calmet, Commentaire littéral sur l’Apocalypse, 2e édit., Paris, 1724, t. viii, p. 925. Si c’est Dieu le Père qui parle ainsi, la divinité de Jésus-Christ ressortira davantage, quand le Sauveur lui-même se nommera l’alpha et l’oméga. Or il le fait certainement, Apoc, xxi, 6 ; xxii, 13, et il explique la signification de ce nom symbolique, quand il ajoute : « le principe et la fin, » le principe de qui tout dérive, et la fin à laquelle tout doit être rapporté, « l’auteur des grâces et le distributeur des couronnes, le premier objet de votre culte et de vos espérances, et la fin de vos actions. » Calmet, op. cit., p. 1024. Il ajoute encore : « le premier et le dernier. » Apoc, xxii, 13. Ces expressions, déjà appliquées à Jésus-Christ, Apoc, i, 17 ; ii, 8, se lisent dans Isaïe, xli, 4 ; xliv, 6 ; xlviii, 12, où elles signifient que Dieu est l’auteur et le créateur de tous les êtres et qu’à ce titre, il sera le même à la fin des temps, qu’il est donc éternel et immuable, et le seul Dieu. Knabenbauer, Comment, in Isaiam, t. H, Paris, 1887, p. 87, 150, 221. En s’appliquant les attributs divins, Jésus-Christ affirme sa divinité et son égalité avec celui qu’ailleurs il a appelé son Père. On rapproche souvent ce nom symbolique d’A et Q des explications que les rabbins ont données des lettres hébraïques n et ii, sans qu’il y ait nécessairement parallélisme et dépendance. Talmud de Jérusalem, Haghiga, ii, 1 ; trad. Schwab, t. vi, p. 275 ; Schœttgen, Horse liebr. ettalmud., p. 1086 ; Schuhl, Sentences et proverbes du Talmud, 1878, p. 206, 280-281.

II. Chez les Pères. —

Les anciens écrivains ecclésiastiques ont adopté le nom symbolique A ii, donné par l’Apocalypse à Jésus-Christ, mais ils y ont attaché des significations différentes. —
1° Les uns ont conservé le sens primitif, exposé plus haut. Clément d’Alexandrie ne l’a pas seulement accepté, Strom., vi, 16, P. G., t. ix, col. 369, il l’a expliqué. Le Logos ainsi dénommé, a-t-il dit, Strom., iv, 25, P. G., t. viii, col. 1365, est infini ; c’est un cercle dans lequel toutes les puissances s’enroulent et s’unissent ; son commencement et sa fin se confondent et ne laissent entre eux ni distance ni intervalle. Le Verbe montre bien qu’il est A et Q, lui qui donne du lait, en se donnant lui-même aux chrétiens icibas et au lieu du repos éternel. Pœdagag., i, 6, P. G., t. viii, col. 292. Pour Tertullien, Liber de monogamia, b, P. L., t. ii, col. 935, Jésus-Christ se nomme A et Q afin de montrer que tout se ramène à lui et se réunit en lui d’à en « et d’u> en a. Origène, Comment, in Joan., i, n. 22, 23, P. G., t. xiv, col. 57, 61, en conclut que le Fils de Dieu est le principe de tous les êtres. Saint Jérôme, Cont. Jovinian., i, n. 18, P. L., t. xxiii, col. 247248, constate que Jésus, venu à la fin des temps, a ramené toute chose à son commencement et a rattaché en cercle o> à a. Saint Isidore de Séville, Elym., i, 9, P. L., t. lxxxii, col. 76-77, répète la même doctrine. L’auteur de VExpositio in vu visiones, i, 8, parmi les Œuvres de saint Ambroise, P. L., t. xvii, col. 768-769, reconnaît en Jésus-Christ l’a, le créateur du genre humain et l’auteur du salut, et l’a, la fin de la mort, de la loi et de tout péché. Prudence, Calliemerinon, ix, 10-12, P. L., t. lix, col. 863, l’a chanté en ces termes :

Corde natus ex parentis ante mundi exordium Alpha et Q. cognominatus : ipse fons et clausula Omnium qua ; sunt, fuerunt, quœque post futura sunt.

Saint Paulin de Noie, I’oema xxxi, v. 89-96, P. L., t. lxi, col. 673, célèbre aussi en vers latins l’a et l’a> et il y voit le triomphe de Jésus-Christ qui, après être descendu dans les limbes, est remonté au ciel. Primasius, Comment, in Apoc, i et v, P. L., t. lxviii, col. 799, 922, reconnaît que par là Jésus-Christ se dit Dieu, éternel,