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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.djvu/550

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1049 AMÉRICANISME — AMERIQUE (ETATS-UNIS D’). SITUAT. RELIG. 10EO

çaise sur la Vie du P. Hecker, Paris, 1898 ; Delassus, L’américanisme et la conjuration antichrétienne, Paris, 1899 ; Lambertini, L’américanisme, Paris, 1899 ; Saint-Clément, Cuique suum : La liquidation du consortium américaniste, Paris, 1899, : G. Périès, L’Américanisme à la Bévue des Deux Mondes, Paris, 1899 ; .1. Tardivcl, La situation religieuse aux États-Unis, Paris, 1900.

F. Deshayes.

AMÉRIQUE. Réservant pour le mot Canada ce qui regarde ce pays, nous consacrons au reste de l’Amérique quatre articles :
I. Amérique (États-Unis d’) : situation religieuse générale ;
II. Amérique (États-Unis d’) : catholicisme ;
III. Amérique (Étals-Unis d’) : protestantisme ;
IV. Amérique latine.

I.AMÉRIQUE(États-Unis d’). Situation religieuse générale.


I. Coup d’œil historique.
II. Relations actuelles entre les Églises et l’État.

I. Coup d’œil historique. —

L’Amérique, qui avait été découverte et évangélisée par les catholiques, ne devait pas tarder à être envahie par les protestants. Les épiscopaux d’Angleterre, les puritains d’Ecosse, les réformés des Pays-Bas et les huguenots de France, sans parler d’une foule d’autres sectes moins importantes, vinrent tour à tour s’établir ou se réfugier dans le nord de l’Amérique, et donner au protestantisme en ce pays un caractère essentiellement cosmopolite. On peut distinguer deux périodes dans l’histoire religieuse des États-Unis : l’une antérieure, l’autre postérieure à la Révolution.

Avant la Révolution.


Ce qui distingue cette période, c’est l’esprit d’intolérance qui anime presque toutes les sectes. Dans le sud, en Virginie, les épiscopaux d’Angleterre, venus dès 1607, firent déclarer l’anglicanisme religion officielle de la colonie et interdire la prédication à quiconque n’avait pas reçu l’ordination des mains d’un évêque anglican : les quakers et les puritains furent frappés de peines sévères et même expulsés du pays. Dans une province voisine, le Maryland, les catholiques avaient en 1634, sous la conduite de lord Baltimore, proclamé une liberté religieuse complète pour tous ceux qui croyaient en Jésus-Christ ; mais les protestants, épiscopaux et puritains, étant venus s’y établir en grand nombre, supprimèrent cette liberté, et persécutèrent les catholiques, en les privant de leurs droits politiques et en donnant une prime aux apostats. Il semble que les puritains d’Angleterre, qui, après s’être réfugiés d’abord en Hollande, s’embarquèrent sur le petit navire le May/Iower, et fondèrent en 1620, dans le Nord, à New-Plymouth, une colonie devenue si célèbre, eussent dû se montrer plus libéraux, puisque eux-mêmes fuyaient leur patrie pour trouver dans un monde nouveau la liberté religieuse ; il n’en fut rien, le gouvernement des pères pèlerins fut un gouvernement théocratique, excluant tous ceux qui ne pensaient pas comme eux en matière religieuse. Aussi l’un d’eux, Roger Williams, qui avait quitté les épiscopaux pour avoir plus de liberté, et qui trouvait mauvais qu’on traînât au temple un homme malgré lui, fut banni de la colonie, et dut se réfugier chez les indiens Narragansetts, au milieu desquels il fonda en 1636 la ville de Providence, dont il fit un asile ouvert à toutes les consciences. Au centre, les réformés hollandais, qui colonisèrent l’État actuel de NewYork, avaient d’abord pratiqué une certaine tolérance ; mais, quand les Anglais se furent emparés de cette colonie, ils ne tardèrent pas à persécuter les catholiques (1683). William Penn, qui introduisit les quakers en Pensylvanie et fonda Philadelphie, la ville de l’amitié fraternelle, imita lord Baltimore et convia sur son territoire les chrétiens de toute religion. Ainsi, à part linéiques exceptions, l’esprit d’intolérance domina dans les diverses communautés protestantes à l’origine. — Au moment où éclata la guerre de l’indépendance, il y avait environ 3 millions d habitants aux États-Unis, la plupart protestants ; comme il n’y avait point alors de recensement officiel, on ne connaît que d’une façon approximative la statistique des différentes sectes. Nous donnons, d’après R. Baird, Religion in A nierica, New-York, 1856, p. 209-210, et d’après P. Schaff, Religious Encyrlopwdia, NewYork, 1888, p. 2127, le nombre des ministres et des églises des diverses communions :

SECTES MINISTRES ÉGLISES

Épiscopaux 250 300

Baptistes 350 380

Congrégationalistes 575 700

Presbytériens 140 300

Luthériens 25 60

Réformés allemands 25 60

Réformés hollandais 25 60

Moraves 12 8

Méthodistes 24 ?

Quakers ou Amis 400 500

Après la Révolution.


Différentes causes amenèrent successivement un régime de tolérance et de séparation complète entre les Églises et l’État. Les ministres épiscopaux, dont les sympathies étaient pour l’Angleterre, ne soutinrent que mollement ou même combattirent la cause de l’indépendance : ce qui leur fit perdre leur situation privilégiée. Au contraire les sectes non conformistes et les catholiques soutinrent vaillamment la cause nationale : ce qui disposa le gouvernement à leur donner pleine liberté. D’ailleurs il fallait ménager la France catholique, dont l’alliance était si utile au succès des armes américaines. Enfin, il faut bien le dire, plusieurs des législateurs, comme Thomas Jeflerson, é’taient imbus de principes rationalistes, et voulaient la liberté à cause de leur indifférence en matière de religion. L’article 6, § 3, de la Constitution déclare « qu’aucun test religieux ne pourra jamais être exigé comme condition d’aptitude pour aucune fonction ou charge publique des États-Unis ». De plus le premier des amendements à la Constitution, proposés en 1789 et ratifiés en 1791, ajoute que a le Congrès ne pourra établir une religion d’Etat, ni défendre le libre exercice d’une religion ». Ces deux articles suffisaient pour assurer la liberté religieuse de la part du gouvernement fédéral ; mais chaque État particulier demeurait libre de se donner une Église nationale. Pendant plusieurs années en effet, une union assez étroite persévéra, dans plusieurs provinces, entre l’Église et l’État. La Virginie, mécontente des ministres épiscopaux, fut la première à rompre cette union (1784) ; le Maryland et le New-York suivirent bientôt cet exemple ; la Nouvelle-Angleterre n’entra dans cette voie qu’en 1816, et ce ne fut même qu’en 1833 que fut abolie la taxe obligatoire destinée à supporter le culte. Chose étrange, le test religieux ne disparut que lentement et successivement des différents États, et les catholiques continuèrent à être exclus des fonctions publiques jusqu’en 1806 dans l’État de NewYork, en 1830 dans la Virginie, en 1844 dans le New-Jersey et en 1882 dans le New-IIampshire. Il y a même de temps en temps une recrudescence de l’esprit sectaire ; vers 1855 le parti des know-nothing (réponse donnée par les membres du parti quand ils étaient interrogés par des profanes), et tout dernièrement Y Association protectrice américaine, connue vulgairement sous le nom d’A. P. A., ont essayé de rallumer les vieux préjugés protestants et d’exclure les catholiques de toute fonction publique. Leur succès n’a été que local et passager, des ministres protestants eux-mêmes ont pris ouvertement parti pour le droit et la justice, et le bon sens public ne s’est pas laissé aveugler par les odieuses et ridicules calomnies sur lesquelles ces partis extrêmes ont voulu étayer leur politique étroite. Ce régime de liberté a été favorable à la diffusion du protestantisme : les ministres, cessant d’être supportés par l’État, ont dû déployer plus de zèle, ne fut-ce que pour obtenir un salaire suffisant ; du reste le