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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.djvu/574

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AMÉRIQUE LATIxNE

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tien de l’esprit religieux. L’orgueil bien connu des populations de couleur paraît être le principal obstacle à la formation d’un clergé indigène. C’est pour ce motif que le dessein qu’avait formé le délégué actuel de fonder dans sa ville métropolitaine un séminaire pour un clergé qui serait national, projet qui était chaudement patronné par le gouvernement de la république, impatient de se sentir sous une tutelle étrangère, n’a pu aboutir. Le séminaire d’Haïti à Vannes fournit assez de prêtres pour maintenir le clergé existant, mais point assez pour évangéliser les peuples qui lui sont confiés.

VI. Cuba et îles voisines.

Cette province ecclésiastique compte deux suffragants : l’un est la Havane, dans l’île même de Cuba ; l’autre Porto-Rico, dans l’île de ce nom. Cette île, qui fut découverte par Christophe Colomb, reçut la foi chrétienne aux premiers jours de l’occupation et devint la propriété des Espagnols qui la gardèrent jusqu’en 1762, époque où les Anglais s’en emparèrent. Mais ils la rendirent par le traité de 1763 et î’ile revint sous la domination espagnole jusqu’en 1899, où la guerre hispano-américaine la fit passer, avec Porto-Rico, sous la domination des États-Unis d’Amérique.

Le budget ecclésiastique de l’île de Cuba, soldé jadis par le gouvernement espagnol, était considérable. La dotation du clergé tant régulier que séculier s’élevait à 2 329 244 francs, les tribunaux ecclésiastiques absorbaient à eux seuls 176166 francs. L’archevêque de Santiago et l’évêque de la Havane touchaient chacun 88200 francs ; les 15 chanoines de Santiago ensemble, 203840 francs ; ceux de la Havane 181 700 francs. Certaines cures valaient de 8 à 10000 francs et le nombre total des cures et vicairies dans le diocèse de l’île de Cuba était de 325. Depuis la conquête des États-Unis, le gouvernement américain a traité cette partie de l’île comme les autres Etats de l’Amérique et a supprimé le budget des cultes. Mais en dehors de la dotation régulière du gouvernement espagnol, qui était surabondante pour les besoins normaux de ces populations, le clergé avait pu se constituer des fonds de réserve, acheter des immeubles de rapport, se créer enfin des rentes ; il en résulte que prêtres et évéques sont dans une situation relativement aisée.

VIL Mexique. — L’histoire de ce riche pays peut se diviser en trois époques bien distinctes : 1° le Mexique avant la conquête par Ferdinand Cortez qui entra à Mexico en 1521 : c’est la période indienne ou si l’on veut archéologique ; 2° la domination espagnole depuis la conquête jusqu’en 1810 ; et 3° la période d’indépendance qui a commencé à cette date et se prolonge jusqu’à nos jours.

La religion catholique pénétra dans ces contrées avec les Espagnols, mais la cupidité de quelques Européens les réduisit à une bien triste situation. Des marchands de Cadix obtinrent le monopole du commerce et pour assurer un débouché à leurs produits firent défendre toute industrie similaire à celle dont ils pouvaient exporter des échantillons. De plus l’avidité conduisit les Espagnols à user souvent de violences envers les Indiens et toute l’éloquence du vénérable Las Casas ne suffit pas à les défendre et à les protéger. L’Église cependant était matériellement florissante. Les Indiens étaient convertis ; mais la crainte des Espagnols entrait pour beaucoup dans ces conversions, et les Indiens pouvaient difficilement se figurer, comme infiniment bon, un Dieu dont les serviteurs étaient si méchants.

La troisième partie de l’histoire du Mexique, c’est-à-dire la période de son indépendance, a été funeste à ce pays. L’ambition des hommes politiques se substituant au bien public, les guerres civiles conséquences de cette ambition, les ruines qui en ont été la suite ont exercé la plus malheureuse influence. De plus sous les gouvernements républicains qui se sont succédé, et en particulier sous la présidence de Comonl’ort et de Juarez,

l’Eglise a été dépouillée de ses biens, elle est réduite à vivre maintenant de son casuel et des aumônes des fidèles. Mais les fidèles sont généreux pour leurs églises et pour leurs prêtres : la basilique de Notre-Dame de Guadeloupe a coûté des millions ; la grande église de San Francisco, rachetée aux protestants, a revêtu une splendeur inouïe, grâce aux Pères jésuites qui en ont soin. La cathédrale de Saint-Louis de Potosi a été richement décorée par Mo^ Montes de Oca, celle de Guadalaxara s’est recouverte de peintures et d’or, celle de Puebla s’embellit encore tous les jours grâce au zèle de son évêque ; la cathédrale de Mexico a des richesses fabuleuses et n’est égalée sous ce rapport par aucune basilique de Rome ou du monde catholique.

Les communautés religieuses ont été dépossédées et chassées par la révolution, mais la guerre religieuse a pris depuis longtemps fin et la sage administration du président actuel, Porfirio Diaz, l’auteur de la constitution qui régit ce pays, leur a permis de revenir, non pas comme communautés avec lès droits qu’elles avaient jadis, mais sous le bénéfice du droit commun. Ainsi on trouve en plusieurs villes du Mexique les ordres suivants : les franciscains, qui se reconstituent rapidement ; les jésuites qui ont de florissants collèges ; les augustins mexicains. Par contre, les dominicains et les carmes, jadis très nombreux, ne sont presque plus représentés. Les congrégations nouvelles donnent un contingent important, et en première ligne il convient de nommer une congrégation mexicaine, celle des joséphisles ou missionnaires de Saint-Joseph, dont les statuts ont été approuvés en 1897 par le Saint-Siège. Les lazaristes dirigent trois grands séminaires ; les maristes ont à Mexico la charge de la paroisse française ; les missionnaires du Cœur-Immaculé de Marie, fondés par le vénérable Antoine Claret, archevêque de Cuba, ont des collèges et des missions. Citons encore les dames du Sacré-Cœur, les ursulines, les sœurs de l’Immaculée-Conception de Guadalupe, ces dernières s’occupant d’ouvroirs et d’orphelinats.

Il n’y a pas de concordat entre le Saint-Siège et le Mexique. Cependant M’J r Averardi a été envoyé récemment dans ce pays pour essayer précisément d’arriver à une entente et faire cesser légalement une persécution qui n’est plus qu’un souvenir, mais qui, vivant encore dans les lois et les règlements de police, pourrait éclater de nouveau. On ne dit pas que sa mission ait réussi sous ce rapport : il n’y a pas encore un diplomate accrédité près le Saint-Siège, pour représenter le gouvernement du Mexique.

Au point de vue de l’instruction, le Mexique a quatre facultés de théologie et de droit canon, elles sont établies à Mexico, à Guadalaxara, Puebla et Merida. Celle de Guadalaxara est la plus renommée et par le nombre de ses étudiants et par la science de ses professeurs. L’enseignement primaire est au contraire assez délaissé et c’est une des questions qui préoccupent le plus les évêques. Les biens du clergé ayant été pris par la révolution, celui-ci n’a que les ressources indispensables pour son ministère et ne peut, faute, d’argent, créer des écoles. Or au Mexique, comme dans tous les pays soumis au régime maçonnique, l’école est gratuite, obligatoire, neutre et laïque. L’enseignement que les parents peuvent donner à la maison ne saurait contre-balancer celui du maître d’école. Les évoques réunis en différents conciles provinciaux qui se sont tenus en 1896, ont unanimement résolu la fondation d’écoles catholiques ; mais les difficultés étant avant tout d’ordre financier, la question n’a été résolue que pour les paroisses riches, c’est-à-dire pour une faible minorité.

La presse religieuse s’est développée au Mexique. On y trouve le Pais, journal à cinq centimes, qui imite le genre de la Croix et obtient le même succès. Le Tiempo est à Mexico ce que l’Univers et la Vérité sont à Paris.

DICT. DE THEOL. CATII.