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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.djvu/663

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ANGE DANS LES CONCILES

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non cependant qu’ils sont absolument incorporels et invisibles ; car ils ont des corps subtils, aériens, ignés, selon ce qui est écrit, Ps. ciii, 3 : Celui qui fait ses anges esprits et ses minisires un feu bridant. Et nous trouvons ce sentiment dans plusieurs saints Pères, parmi lesquels Basile le Grand, saint Athanase, Méthode le Grand et d’autres. Et en vérité, il n’y a que la divinité seule qui soit incorporelle et sans limite ; pour les créatures intelligibles, elles ne sont pas tout à fait incorporelles et invisibles ; c’est pourquoi elles sont dans le lieu et circonscrites. Si on lit que les anges, les démons ou les âmes sont appelés incorporels, c’est parce qu’ils ne sont ni composés des quatre éléments matériels, ni des corps épais et semblables à ceux qui nous environnent. Bien qu’en réalité ils soient invisibles pour nous, cependant ils ont été vus par plusieurs dans la forme de leurs propres corps ; ils ont été vus en effet par ceux à qui Dieu a ouvert les yeux, et puisqu’ils sont circonscrits dans un lieu, cela montre qu’ils ne sont pas tout à fait incorporels, comme la nature divine. Nous ne péchons donc point en les représentant et les honorant non comme des dieux, mais comme des créatures spirituelles et des serviteurs de Dieu qui ne sont pas à proprement parler incorporels. Si nous les représentons sous une forme humaine, c’est parce que fréquemment ils ont été vus sous cette forme par ceux à qui ils ont été envoyés par le Dieu unique. » Après cette lecture le très saint patriarche Taraise dit : « Entendez ce que dit ce Père… Le Père montre qu’il faut représenter les anges parce qu’ils sont circonscrits, ou to’j ; àyYi).0’j ; Set ypcïçeaOai, ètciSï) TteptypocTiTO ! ei’Tt, et comme ils ont apparu à plusieurs hommes. » Et le saint concile dit : « Oui, Seigneur. » Mansi, t. xiii, col. 164, 165. L’édition de Mansi que nous venons de traduire et les autres éditions qu’elle reproduit portent en marge que Jean, patriarche de Thessalonique, exprimait son sentiment particulier. Il est vrai que la doctrine qu’il attribue à l’Église, c’est que les anges sont des êtres spirituels. Qu’ils aient des corps éthérés, ce n’est donc pas, selon lui, un dogme de l’Église, mais son opinion à lui Jean. Cependant, à la suite du patriarche Taraise, le concile semble se ranger à cette opinion. Il ne l’a point définie ; mais elle a été pour lui une preuve en faveur du culte des images des anges. Le concile ne prêtait pas non plus aux anges un corps charnel comme celui de l’homme ; car dans un décret promulgué à la quatrième session et signé de tous les Pères, il avait appelé les anges incorporels. Mansi, t. xiii, col. 132. Cette dénomination ne se concilierait guère avec l’accueil fait à l’écrit de Jean de Thessalonique, si les Pères du sixième concile avaient eu une notion aussi nette que la nôtre sur la spiritualité des anges. Mais nous avons déjà remarqué, col. 1199, que tout en affirmant I’incorporéité de ces esprits supérieurs, divers Pères grecs leur attribuaient un corps aérien. C’est la même opinion qu’exprimait Jean de Thessalonique, en invoquant l’autorité de ces mêmes Pères. Bien n’empêche de penser que plusieurs des évéques qui siégeaient au sixième concile étaient aussi dans ce sentiment. Toutefois ils ne l’ont exprimé dans aucun de leurs décrets sur la légitimité du culte des images. Comme nous l’avons dit, ils ont au contraire affirmé I’incorporéité des anges dans un décret de la quatrième session.

V. Synode humain de 745 et concile d’Aix-la-Chapelle de 789 : Noms des anges. — En 745, à la demande de saint Boniface, le pape Zacharie condamna dans un synode romain un certain Adelbert ou Adalbert (voir ce mot). D’après les actes de cette assemblée, il avait composé une prière aux anges Uriel, Baguel, Tubuel, Michel, Inéas, Tubuas, Sabaoc, Simiel. Le synode considérant que nous ne connaissons par l’Ecriture que trois noms d’anges, Michel, Gabriel et Raphaël, pensa que c’étaient des démons qu’Adalbert invoquait dans sa

prière, Mansi. t. xii, col. 379, 380. — L T n siècle plus tard, en 789, un capitulaire de Charlemagne, adressé au concile d’Aix-la-Chapelle, défendait encore de fabriquer des noms d’anges en dehors des noms de Michel, Gabriel, Raphaël. Il s’appuyait sur le canon 35 du concile de Laodicée. Le canon défendait en effet d’honorer les anges en ces termes : ôvo^âÇeiv àyréXo-jç, que le capitulaire de Charlemagne traduisait par angelos nominare. Labbe et Cossart, Concilia, Paris, 1671, t. vii, col. 973, 974. Cf. Hefele, Histoire des conciles, § 93, traduction Leclercq, Paris, 1907, t. i, p. 1017.

VI. Douzième concile œcuménique, quatrième de Latran (1215) et concile du Vatican (1870). — 1. Ce qu’ils disent sur les anges. — Les manichéens admettaient deux principes : l’un bon qui avait créé les anges, l’autre mauvais qui avait créé le monde matériel. Contrairement à cette erreur, le symbole de Nicée appelait Dieu l’auteur de toutes les choses visibles et invisibles. Il déclarait ainsi expressément que les anges ont Dieu pour auteur. Les albigeois (voir ce mot, col. 678) adoptèrent au moyen âge le dualisme des manichéens, avec la théorie des transmigrations des âmes d’Origène. Ils furent condamnés par le quatrième concile de Latran dans le célèbre décret Firntiler, dont nous avons déjà donné le texte et la traduction, col. 683 sq. Ce décret affirmait que tous les êtres spirituels et corporels ont le même Dieu pour créateur, et qu’ils ont été faits de rien, de nihilo condidit ; il déclarait en outre que Dieu a fait les créatures spirituelles et corporelles au commencement du temps, et qu’ensuite il a fait la créature humaine, ce qui suppose qu’aucune des créatures n’a été produite de toute éternité.

Plus tard dans sa constitution Dei Filins, c. I, le concile du Vatican renouvela ce décret, en le complétant sur divers points relatifs à la manière dont s’est faite la création (voir ce mot). Il définit même dans un canon correspondant (can. 3) que « le monde et toutes les choses qui y sont contenues, les spirituelles et les matérielles, ont été produites de rien par Dieu dans la totalité de leur substance ».

2. Création des anges. — Il résulte de ce canon que la création des anges est un dogme de foi catholique. Il est également de foi, que toutes les créatures ont été produites par Dieu.

Voyons maintenant ce que nous pouvons conclure du décret Firtniter du quatrième concile de Latran, et de la constitution Dei Filius du concile du Vatican, relativement à la spiritualité des anges et à l’époque de leur création. Ce qui regarde ces deux points est exprimé par ce texte qui se trouve dans les deux conciles : simul ab initio temporis utramque de nihilo condidit creaturam, spirilualem et eorporalem, angelicam videlicet et munda 71am, ac deinde humanani quasi communcm ex spiritu et corpore constitutam.

3. Spiritualité des anges. — Il y est clairement marqué que les anges sont des esprits sans corps. En effet, non seulement ils sont appelés esprits ; mais ils sont encore présentés comme des créatures différentes soit des corps matériels, soit aussi des êtres composés d’esprit et de corps, à la manière de l’homme. C’est donc que les anges ne sont ni des corps, ni des esprits unis à des corps, mais des esprits sans corps. Aussi avons-nous remarqué (art. Angélologie depuis le temps des Pères jusqu’à saint Thomas d’Aquin, col. 1227) qu’à partir de l’époque du quatrième concile de Latran l’opinion qui attribuait un corps éthéré aux anges resta à peu près sans partisans. Elle diffère en effet absolument du sentiment adopté dans l’école franciscaine que les anges sont composés de matière et de forme ; car cette composition de matière et de forme constitue, suivant ce sentiment, des esprits sans corps.

Après le quatrième concile de Latran et celui du Vatican, on ne pourrait donc plus soutenir sans erreur