Aller au contenu

Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.djvu/70

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
105
106
ABRAHAM (SACRIFICE D’) — ABRAHAM (PROMESSE FAITE À)

propre aux orantes. Le bélier lui-même élève sa tête, comme pour s’offrir. Un fagot de bois, appuyé contre un arbre, rappelle les circonstances historiques du sacrifice et ne permet pas de douter de la signification de la scène. Becker, Die Darstellung Jesu Christi unter dem Bilde des Fisches, Breslau, 1806, p. 118, a prétendu qu’elle représentait le sacrifice sanglant de Jésus sur la croix, sacrifice offert par Dieu le Père. Mais sa place au milieu des cubicula dits des sacrements et à côté d’autres symboles de l’eucharistie, oblige à reconnaître une représentation figurée du sacrifice non sanglant. Elle fait, en effet, pendant à la peinture du prêtre consacrant sur l’autel, « remplissant l’office du Christ, dit saint Cyprien, Epist., lxiii, n. 14, P. L., t. iv, col. 386, imitant ce que le Christ a fait, offrant un vrai et parfait sacrifice au nom de l’Église à Dieu le Père. » G. B. De Rossi, La Roma sotterranea cristiana, Rome, 1867, t. ii, p. 342-343. Cf. P. Allard, Rome souterraine, 2e édit., Paris, 1877, p. 386-387, 396-397. Dans l’hypogée anonyme qui est contigu au cimetière de Soteris, on a retrouvé les restes d’une peinture du sacrifice d’Isaac, du IVe siècle. Abraham tient la main gauche sur la tête d’Isaac, nu et à genoux ; la main droite levait sans doute le glaive pour frapper. On voit le bélier à droite, et à gauche un bûcher allumé. De Rossi, op. cit., 1877, t. iii, p. 346, et tav. xvii, n. 5. Des vestiges d’une autre peinture du cimetière de Generosa laissent reconnaître une autre représentation du même sacrifice. On voit encore un agneau et un homme vêtu d’une tunique. Les lettres AbrAHAM indiquent partiellement le nom du personnage. De Rossi, ibid., p. 669. L’abbé Martigny, Dictionnaire des antiquités chrétiennes, 2e édit., Paris, 1877, p. 4-6, a décrit ou reproduit un certain nombre de représentations de ce sacrifice. Au second concile de Nicée, tenu en 787, on a cité dans l’action quatrième, Mansi, Concil., Florence, 1767, t. xiii, col. 10, un passage d’un sermon de saint Grégoire de Nysse, De deitate Filii et Spiritus Sancti, P. G., t. xlvi, col.572.Le saint évêque raconte avoir jeté bien souvent les yeux sur une image, qui lui faisait toujours verser des larmes. On y voyait Isaac à genoux sur l’autel et les mains liées derrière le dos. Abraham, debout derrière son fils, posait sa main gauche sur la tête d’Isaac et dirigeait vers la victime la pointe du glaive qu’il tenait de la main droite. Cette citation, faite comme se rapportant à une image de la passion de Jésus, servit à réfuter les iconoclastes. Le même sujet était représenté dans quelques anciennes mosaïques et sur des carreaux de terre cuite. L’une de ces briques a été trouvée en 1893 dans les ruines d’une basilique à Hoad’jeb-el-Aïsun. M. Le Blant croit pouvoir l’assigner à une époque voisine du vie siècle. Voir Bulletin critique, 1893, t. xiv, p. 399. Un des médaillons de la patène de verre, trouvée à Cologne en 1864 et conservée au Vatican, reproduit le sacrifice d’Abraham. P. Allard, Rome souterraine, p. 422. Sur ces objets divers aussi bien que sur le sarcophage de Junius Bassus et sur celui qui est gardé dans la basilique de Sainte-Marie-Majeure, ces représentations font partie d’un cycle symbolique de sujets bibliques. Elles figurent ordinairement le Christ qui s’offre lui-même en holocauste sur le Calvaire. Cependant dans les mosaïques de Saint-Vital de Ravenno, qui sont du vie siècle, ainsi que sur différents objets d’une époque postérieure, elles sont unies aux sacrifices d’Abel et de Melchisédech et symbolisent manifestement le sacrifice eucharistique. Grimouard de Saint-Laurent, Guide de l’art chrétien, Paris, 1874, t. iv, p. 30-31, 53-55. Dans les verrières du moyen âge, le symbolisme du sacrifice d’Abraham est indiqué par ce vers latin : Signantem Christum puerum pater immolat islumtt. Une plaque niellée du xiie siècle rappelle que le bélier représente l’humanité du Sauveur : Hoc aries prefert quod homo Deus hostia defert. X. Barbier de Montault, Traité d’iconographie chrétienne, Paris, 1890, t. ii, p. 51, 91, 96. Cf. Dictionnaire d’archéologie chrétienne, t. i, col. 111-119. C’est ainsi que s’est transmis jusqu’à nous par la parole et par l’image l’enseignement de la double signification mystique du sacrifice d’Abraham, qui représente à la fois le sacrifice sanglant de Jésus-Christ sur la croix et son oblation non sanglante dans l’eucharistie. Cf. card. Meignan, L’Ancien Testament dans ses rapports avec le Nouveau. De l’Eden à Moïse, Paris, 1895, p. 341-350.

E. Mangenot.

III. ABRAHAM (Promesse du Messie faite à).
I. Première promesse à Abraham.
II. Renouvellement de cette promesse à Abraham, à Isaac et à Jacob.

I. Première promesse a Abraham.

Elle est le dernier terme d’un groupe de quatre promesses, faites par Dieu à Abraham pour le récompenser de son obéissance et de son abnégation à quitter sa patrie, sa famille et sa parenté. Étudions les paroles de Dieu qui les expriment. Elles sont formulées suivant une gradation ascendante. Gen., xii, 2, 3.

Promesse d’une nombreuse postérité.

« Je ferai sortir de toi un grand peuple, » grand par le nombre de ses membres, puisque Dieu, en renouvelant cette promesse, a assuré que la postérité d’Abraham serait multipliée comme la poussière de la terre, Gen., xiii, 16, et aussi nombreuse que les étoiles du ciel. Gen., xv, 5. En gage de la vérité de sa parole, Dieu changea le nom d’Abram, « père élevé, » en celui d’Abraham, « père d’une multitude. » Il le rendra chef de nations, et des rois seront issus de lui. Gen., xvii, 4-6. Cette nombreuse postérité descendra, non pas d’Ismaël, mais d’Isaac, le fils de Sara. Gen., xvii, 16 ; xviii, 10-15. Après le sacrifice, si généreux d’Isaac, Dieu renouvela une dernière fois à Abraham l’annonce d’une descendance égale aux étoiles des cieux et au sable du bord de la mer. Gen., xxii, 17. Cf. Hebr., xi, 12. La même promesse fut réitérée en des termes équivalents ou identiques à Isaac, Gen., xxvi, 4, et à Jacob. Gen., xxviii, 14. De fait, la postérité d’Abraham dans la seule lignée d’Isaac fut considérable, et le peuple juif eut des rois célèbres qui agrandirent sa domination. Mais plusieurs Pères ont pensé que la nombreuse descendance d’Abraham n’épuisait pas la fécondité de la promesse divine, si on ne considérait pas en elle son rejeton le plus illustre, Jésus-Christ, fils d’Abraham, Matth., i, 1, et les fils qu’il lui a engendrés par la foi. Rom., iv, 16, 17. D’après saint Irénée, Cont. hær., iv, 7, n. 1, 2, P. G., t. vii, col. 991-992, l’avènement du fils de Dieu fait homme a rendu la postérité d’Abraham aussi nombreuse que les étoiles du ciel, car Jésus a fait sortir des pierres des fils d’Abraham, lorsqu’il nous a arrachés à la religion des pierres, a changé nos pensées dures et stériles et nous a rendus semblables à Abraham par la foi. Pour saint Ambroise, De Abraham, I, iii, n. 20, 21, P. L., t. xiv, col. 428, Jésus-Christ est le véritable fils d’Abraham, qui a illustré la succession de son ancêtre ; c’est par lui qu’Abraham a contemplé les cieux et a compris que la splendeur de sa descendance ne serait pas moins brillante que l’éclatante clarté des étoiles. C’est par l’héritage de la foi que la race d’Abraham s’est propagée ; c’est par lui que nous sommes comparés au ciel, que nous avons des rapports avec les anges et que nous égalons les étoiles. Saint Cyrille d’Alexandrie, Glaphyr. in Genes., iii, n. 2, P. G., t. lxix, col. 113, dit que les Juifs n’ont pas le droit de se glorifier d’Abraham leur père selon la chair. Puisque Israël n’a formé qu’une seule nation, son patriarche n’a été nommé « père de beaucoup de nations », que parce qu’il a été le père des croyants, rassemblés pour ainsi dire de toutes les villes et de toutes les régions pour constituer un seul corps dans le Christ et être ainsi appelés à la fraternité spirituelle. On trouve les mêmes pensées exprimées par Raban Maur, Comment, in Gen., ii, 12-17, P. L., t. cvii, col. 533, 541, et par Rupert, De Trinitate et operibus ejus, xv, 10, 18 ; t. cxlvii,