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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 10.2.djvu/13

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MESSE EN ORIENT, DU IV* AU I X « SIÈCLE


met en vive lumière le sacrifice mystique de la cène « Le Sauveur, dit-il, voulant montrer que c'était bien volontairement et de son plein gré qu’il sacrifiait sa vie pour notre salut, et que la malice des Juifs aurait été impuissante contre lui sans sa permission, devança leur agression par une invention de sa sagesse : Il recourut à une manière de sacrifice ineffable et invisible aux hommes, et s’oflrit lui-même en oblalion et en victime, étant à la fois le prêtre et l’agneau de Dieu qui enlève le péché du monde, xaTa tov apprjTOv ttjç Lepoupytaç -vpô-ov xal toïç àvGpcÔ7roiç àôpaTOv, xal éauTÔv -poarjveyxs TTpoaçopàv xal Ouaîav Ù7ïèp yjjjuov. » Quand fit-il cela ? Lorsqu’il donna à manger son corps réduit à l'état de nourriture, montrant clairement que l’immolation de l’agneau avait déjà été consommée ; car le corps de la victime n’aurait pas été propre à être mangé, s’il avait été vivant. Ainsi, lorsqu’il donna à ses disciples à manger de son corps et à boire de son sang, déjà par le dessein bien arrêté de celui qui réglait ce mystère par sa puissance, le corps avait été immolé d’une manière ineffable et invisible, ^Sv) xaxà to 8eXr)TÔv T7J È ; ooala toû to ji.uaTYjpi.ov oîxovojxoûvtoç àpprjTcoç ts xal àopâTcoç to <jô[ia stéQuto. L'âme cependant restait là où la puissance de l’auteur du mystère l’avait placée avec la vertu divine qui lui était unie, ne désertant pas la région du cœur. Aussi peut-on, sans se tromper, compter les jours [où Jésus est resté enseveli ], à partir du moment où fut offerte à Dieu la victime par le grand-prêtre qui avait sacrifié pour le péché de tous son propre agneau, c’està-dire lui-même, d’une manière invisible et ineffable, àcp’ou TtpoarjyÔrj tg> 0ew tj Guala Ttapà toû [leyâXoo àpytepéciiç, toû tov éauToû àfi.vôv ÙTrèp ttjç xoivrjç â[i.apTÏaç àpprjTcoç ts xal àopaTOÇ lepoupy/iaavTOç. D’après l'évêque de Nysse, le sacrifice de la cène, la première messe, fut donc un sacrifice parfait et complet, mais l’immolation en était mystique et invisible. La mort sur la croix devait la manifester.

Dans son homélie In mysticam cœnam, P. G., t. lxxvii, col. 1017 A, saint Cyrille d’Alexandrie exprime plus brièvement la même idée que saint Grégoire de Nysse : « A la dernière cène, l’Agneau de Dieu, qui ôte le péché du monde, est égorgé, atpayiâÇeTai ; le Père se réjouit, le Fils est sacrifié volontairement non par les adversaires de Dieu, mais par luimême, afin de montrer que sa passion salutaire est volontaire, ô Ylôç éxouctîcûç lepoupyEÏTa !. où/ Ù7ro twv Geo[j.âywv ayjnepov, àXX'ûcp' èaOToû. »

Vn des auteurs qui insistent le plus sur l’immolation mystique de Jésus à la dernière cène est le prêtre Hésychius, dans son Commentaire du Lévitique : Prœveniens semetipsum in ccena apostolorum immolavit, quod sciunt qui mysteriorum percipiunt virtutem. Hune sacerdolem Septuaginta non solum unelum sed et consummalum manibus appellarunt. Consummatus est enim manibus prius in mystica ccena, accipiens panem et frangeas ; deinde per crucem, quando affixus est. In LcviL, t. I, c. iv, P. G., t. xem, col. 821-822. De même, In Levit., t. V, c. xvi, col. 993 B : Ipse propriam carnem immolavit ; ipse sui sacrificii pontifex in Sion factus est, quando sanguinis Novi Testamenti dabal calicem. Cf. In Levit., t. II, c. viii, col. 882 B, 883 A ; Fragmentum in ps. cix, 2, col. 1324, où se lit l’expression : 'Ev Stwv (au cénacle) éauTÔv ô Movoyevrjç ëOuæv.

Des expressions d’I Iésychius il faut rapprocher celle qu’emploie Eutychius, patriarche de Constantinople, dans son sermon De paschale, 2, P. G., t. lxxxvi b, col. 2393 B : Avant de mourir, il mangea la Pâque, la Pâque mystique j’entends ; car, sans la passion, cette cène n’aurait pas reçu le nom de Pâque. Il s’immola donc mystiquement, lorsque, après le repas, prenant le pain dans ses mains, il rendit grâces, l’offrit et le rompit, s'étant introduit lui-même dans l’antitype,

fjwaTixôiç oùv saoTov èQuasv… èy.[j.l^aç éauTÔv tcù

àvTITÛTCW. »

D’après Théodoret, In ps. CIZ, 4, P. G., t. lxxx, col. 1772 C, Jésus inaugura son sacerdoce dans la nuit qui précéda sa passion, lorsque, prenant du pain, il rendit grâces et le rompit, en disant : Prenez et mangez-en : ceci est mon corps, etc.

Le Syrien saint Éphrem est d’accord avec les Pères grecs : il parle plus d’une fois, dans ses discours métriques, du sacrifice de la cène. Voir, par exemple, le IIe discours pour la semaine sainte, 6-10,.1. Lamy, S. Ephrœm Syri hymni et sermones, t. i, Malines, 1882, p. 380-390 pass., où le saint docteur dit qu'à la cène fut offerte la véritable Pâque du véritable agneau : Jésus fut l’oblation et l’offrant, les disciples mangèrent la victime.

2° La messe est un vrai sacrifice, reproduction du sacrifice de la cène. — La messe n’est pas autre chose que la répétition du sacrifice offert par Jésus à la dernière cène.

Les Pères grecs affirment clairement cette identité : identité par rapport au rite extérieur et au mode d’immolation : c’est un sacrifice non sanglant, dcvaîfxaxToç Goala, expression qui revient constamment dans les écrits patristiques comme dans les documents liturgiques : Voir, par exemple, saint Nil, Epist., ii, P. G., t. lxxix, col. 345 ; saint Isidore de Péluse, Epist., m, 75, P. G., t. lxxviii, col. 784 ; identité par rapport à la victime, qui est le corps et le sang de Jésus et Jésus lui-même tout entier sous les espèces du pain et du viii, avec cette différence qu'à la dernière cène, Jésus était passible et mortel dans son humanité, tandis qu'à la messe il se trouve dans son état glorieux et immortel ; identité aussi par rapport au prêtre principal, qui reste Jésus lui-même opérant invisiblement le changement du pain et du vin en son corps et en son sang, continuant à s’offrir à son Père dans son état de victime tandis que les prêtres de l'Église tiennent visiblement sa place et répètent les paroles et les gestes qu’il fit alors.

De tous les Pères de l'Église orientale saint Jean Chrysostome est celui qui expose avec le plus d’abondance et de précision les divers aspects de cette doctrine. Ainsi il écrit, In II Tim., nom. ii, 45, P. G. y t. lxii, col. 612 : « L’oblation que font maintenant les prêtres, quel que soit l’offrant, que ce soit Paul ou Pierre, est la même que celle que le Christ donna à ses disciples ; celle-là n’est pas inférieure à celle-ci, parce que ce ne sont pas les hommes qui la consacrent mais celui-là même qui consacra celle de la cène. De même, en effet, que les paroles que Dieu prononça alors sont les mêmes que les prêtres disent maintenant, de même l’oblation est la même, rj îrpoatpopà tj aÙTr) èaTiv, r]v ô XpiaTÔç toïç (i.aGrjTaîç ÊScoxs, xal rjv vûv ol îepetç ttoioûchv. » Le saint docteur insiste souvent sur l'état d’immolation mystique dans lequel Jésus est placé dans le sacrifice eucharistique : « Lorsque vous voyez, dit-il, le Seigneur immolé et gisant, et le prêtre incliné sur la victime et abîmé dans la prière, et tous les assistants les lèvres rougies de ce sang précieux, pensez-vous être encore parmi les hommes et habiter la terre ? Ne vous semblc-t-il pas être transporté subitement dans les cieux ? "ÛTav ÏSrjç tov Kûpiov teOu[j.sv(jv xal xelfi-evov, xal tov lepéa ècpeaTWTa tg> Oô|j.aTi xal È7ceÙ3(0(i.evov. » De sacerd., ni, 4, t. xlvii, col. 642. Cf. In Rom., nom. viii, 8, t. i.x, col. 465 : tôv Si' rj(xâç açaysvTa XpiaTÔv, to Oû(i.a to èTr’aÙTTJç xel|i.evov ; Il omit, de cœmelerio et cruce, 3, t. xlix. col. 397 : « Puisque ce soir nous allons voir, nous aussi, celui qui a été cloué à la croix, égorgé et immolé comme un agneau, wç à(i.vôv èacpay[i.évov xal TeGujiivov, approchons-nous, je vous en supplie, avec tremblement et grande révérence. »