Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 11.1.djvu/143

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

271

NESTORIENNE (L'ÉGLISE), LITTÉRATURE

henaniens et les partisans de Joseph Hazzayâ. Son œuvre aurait compris 83 ouvrages, mais il n’en reste qu’un petit nombre. Le plus important est son Livre de l’union des deux natures en Jésus-Christ, qui est une défense de la théologie nestorienne, ci-dessous, col. 289, éd. A. A. Vaschalde, dans Corpus scriptorum christianorum orienlalium. sér. II, t. lxi. Il ne reste rien du commentaire sur toute l'Écriture que lui attribue Ébedjésus. Son activité littéraire semble s'être exercée surtout au bénéfice de ses moines, c’est pour eux qu’il composa un recueil inédit de maximes destinées aux débutants de la vie monastique, un commentaire aux Centuries d'Évagre le Politique, éd. W. Frankenberg, Evagrius Pondais, dans Abhandlungen der Gôtlingischen Gesellschaft der Wissenschaften, neue Folge.t. xiii, fasc. 2, p. 8-471. et un autre aux traités spirituels de Marc le moine. W. Wright, op. cit., p. 1(38. Nombreux sont les récits hagiographiques qu’il composa pour fournir aux moines des lectures édifiantes : récits de martyres, dont celui de GeorgesMihramgusnasp, mort en 612, et surtout vies d’ascètes, dont un ouvrage général surtous les moines morts en odeur de sainteté au couvent du mont Izalâ. Liste de ces biographies dans A. Baumstark, op. cit., p. 138. Il écrivit aussi des hymnes, dont une sur les trois docteurs grecs, peut-être identique à l’histoire des partisans de Diodore, citée par Ébedjésus. Il composa un recueil de canons pour les moines, plusieurs traités sur différentes fêtes. W. Wright, toc. cit. Il est probablement l’auteur du mémoire adressé au Roi des rois en 612 par les évêques nestoriens, éd. J.-B. Chabot, Synod. orient., p. 562-598.

Les sections consacrées aux auteurs nestoriens de cette période dans A. Baumstark, op. cit., se trouvent aux pages 100-139. Dans les ouvrages de R. Duval et W. Wright, les auteurs nestoriens et monophysites sont mélangés.

3° La littérature nestorienne sous la domination arabe (637-1258). — La conquête arabe, qui réunit sous une même autorité politique les deux parties du monde chrétien de langue syriaque, divisées auparavant entre les deux empires, byzantin et sassanide, n’amena aucun rapprochement entre elles. Au contraire, tandis que le type d'écriture avait été commun jusqu’alors aux syriens orientaux et occidentaux, il se modifia rapidement pour aboutir à deux types n’ayant pour ainsi dire plus de ressemblance dans l’expression des consonnes, et qui furent complétés par deux systèmes différents de vocalisation : combinaisons de points chez les nestoriens, usage des voyelles grecques chez les jacobites. Tant était grand l’odium theologicum ! Cette séparation eut lieu, il faut le noter, malgré l’accentuation du mélange qui se fit alors, des jacobites et des nestoriens, surtout dans les villes importantes de la Mésopotamie, Bagdad, Mossoul, Takrit, Nisibe, etc.

L’activité littéraire des nestoriens pendant cette période est entraînée suivant deux courants bien distincts, sinon indépendants : d’une part, elle produit une abondante littérature ascétique — sentences, récils édifiants, histoire monastique — destinée aux nombreux habitants des monastères ; de l’autre, elle donne naissance à des écrits originaux dans les sciences les plus variées, exégèse, théologie, histoire, philosophie, et aussi mathématiques et médecine. Laproduc-" tion des monastères est entièrement de langue syriaque, l’autre est en partie de langue arabe. L’arabe, langue religieuse de tous les musulmans, langue officielle du califat, devint très rapidement la langue usuelle des deux provinces à vie sédentaire et culture raffinée qui bordaient à l’Est et à l’Ouest le grand désert, Mésopotamie et Syrie, habituées depuis longtemps déjà au contact des Bédouins de langue arabe. Il était donc naturel d'écrire en arabe tout ce qui pouvait

intéresser les non-chrétiens — et les lettrés de Badgad s’intéressaient à de multiples disciplines, — histoire droit, philosophie ; les écrits apologétiques furent de même rédigés en arabe ; enfin les professeurs des écoles musulmanes provoquèrent les chrétiens à leur fournir des traductions de tout ce qu’ils connaissaient d’ouvrages grecs, surtout en médecine, sciences naturelles et mathématiques. Ayant pour centre ecclésiastique la capitale des califes, les nestoriens furent intimement mêlés, surtout pendant les viip et IXe siècles, au magnifique mouvement intellectuel, dont Bagdad fut le centre.

Le monachisme en Perse a été, dès son origine, profondément influencé par celui d’Egypte et de Syrie ; ce n’est pas sans fondement que les traditions signalées plus haut, col. 184, font venir d’Egypte Eugène, l’initiateur du monachisme dans le Tour Abdin. Les visites aux monastères occidentaux avaient été assez fréquentes dès la période sassanide, elles le furent sans doute davantage, une fois que l’unité politique du monde musulman eut rendu les communications plus aisées. Il était tout naturel que l’on rendît en syriaque ces dicta Palrum, qui avaient un tel succès dans les couvents où on lisait le grec. L’n nestorien fut l’agent de cette traduction. Le Paradis des Pères de 'Enaniso' comprend les vies écrites par Palladius dans les deux premières parties de l’Histoire lausiaque, et celles de YHisloria monachorum mise sous le nom de Jérôme, les apophtegmes (627 numéros), les questions et réponses sur toutes sortes de vertus, et les démonstrations pour les indifférents qui n’ont pas souci de leur salut. R. Duval, La littérature syriaque, p. 144. Il faut noter cependant que 'Enaniso' avait eu des devanciers parmi les jacobites, probablement parmi les moines de Sainte-Marie des Syriens, puisque le Musée Britannique contient des fragments de plusieurs traductions. Avant de devenir moine au monastère de Beit 'Abê, 'Enaniso' avait étudié à l'école de Nisibe et à celle du mont Izalâ, puis avait voyagé en Palestine et en Egypte. Il était bon philologue, ayant composé un dictionnaire des mots ayant les mêmes consonnes et des voyelles différentes, ainsi qu’un ouvrage sur les paroles et les expressions obscures dans les ouvrages des Pères. A. Baumstark, Gesch. der syr. Lit., p. 201 sq. Il avait écrit également un traité de définitions et distinctions philosophiques, d’où il ressort qu’il s'était familiarisé avec la pensée grecque

L'œuvre de 'Enaniso' fut commentée par Dadiso' du Beit Qatarâyê, dans un ouvrage en forme de dialogue entre le maître et ses disciples, dont un abrégé eut la fortune d'être adopté par les jacobites, placé par eux sous le nom de Philoxène, et traduit par eux en arabe et en éthiopien. Ibid., p. 226.

Mais aucune vie monastique ne pouvait être attrayante pour les moines nestoriens comme celles des fondateurs de leurs couvents et des moines qui les avaient illustrés. Au Paradis de 'Enaniso' firent pendants deux ouvrages synthétiques sur les moines orientaux, dont aucun n’est parvenu jusqu'à nous : le Petit paradis par David, d’abord moine de Beit 'Abë, puis évêque des Kurdes, et le Paradis des Orientaux par Joseph Hazzayâ. Ces deux ouvrages avaient été précédés et furent suivis d’une quantité de biographies, en grande partie perdues et connues seulement par leur titre ou quelque citation, pour la plupart composées de 650 à 850. On peut citer parmi les auteurs de biographies : Jean le Perse, élève de Bar’Idtâ, qui écrivit une vie de son maître ; Jean du Beit Garmaï, auteur d’une vie et d’un éloge en vers de Kudahwi de Beit Halë ; Sargis.du Beit Garmaï également, qui avait écrit sous le titre, Le destructeur des puissants, une histoire des moines de sa province ; Apnimaran, moine du monastère de Beit’Abê, puis fondateur dans le Beit