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    1. ORIGÈNE##


ORIGÈNE. COSMOLOGIE

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III, v, 3. Saint Jérôme semble ici résumer exactement la pensée du maître lorsqu’il écrit : In secundo autem libro mundos asserit innumerabiles, non juxta Epicurum uno tempore plurimos et sui similes, sed posl allerius mundi fmem allerius esse principium. Et ante hune nostrum mundum alium fuisse mundum, et post hune alium rursum juturum, et posl illum alium rursumque ceteros post celeros ; et addubilat utrum fulurus sil mundus alleri mundo ita ex omni parte consimilis, ut nullo inler se distare videantur, an cerle nunquam mundus alleri mundo ex loto indiserelus et similis sit fulurus. Epist., cxxiv, 5, ad Avit., P. L., t. xxii, col. 1063 ; cf. De prine., II, ni, 1.

Qu'étaient donc les créatures de Dieu, j’entends les premières de toutes, celles qui sont sorties de ses mains aux jours d'éternité? que pouvons-nous en savoir ? C'étaient, semble-t-il, des créatures spirituelles, des voéç, car seuls des esprits peuvent être immédiatement produits par Dieu. Encore Origène se demande-t-il si ces esprits étaient incorporels au sens le plus strict du mot, ou s’ils avaient un corps éthéré, subtil, délicat, et il semble bien admettre cette seconde hypothèse, car la Trinité seule peut être dite réellement incorporelle. De prine., i, vii, 1 ; II. ii, 2 ; IV, vi, 27 ; In Joan., i, 27.

Tous les esprits ont été créés égaux par Dieu, car il répugne à l’idée que nous devons avoir de sa justice de penser que le Créateur a fait des créatures meilleures les unes que les autres. Telle n'était pas l’opinion des gnostiques, qui divisaient les esprits en pneumatiques, psychiques, et hyliques et dont Origène rapporte longuement les objections : « "Voyez, disaient-ils, combien la naissance de l’un est plus heureuse que celle de l’autre. Tel naît d’Abraham ; tel naît d’Isaac et de Rébecca ; encore dans le sein maternel, celui-ci supplante son frère, avant même que de naître, il est aimé de Dieu. L’un vient au monde parmi les Hébreux ; il a la ressource d'être instruit dans la loi divine ; l’autre voit le jour parmi les Grecs, homm, es sages et d’une condition non médiocre. Au contraire, voici un enfant qui naît parmi les Éthiopiens, lesquels ont coutume de se nourrir de chair humaine, ou chez les Scythes, pour qui le parricide est comme une chose légale ; soit enfin dans la Tauride, où l’on immole les étrangers. Eh bien ! d’où proviennent ces différences ? quelle peut être la cause des conditions si variées que la naissance nous assigne ? Assurément on ne saurait prétendre que le libre arbitre y ait quelque part. Car nul ne choisit son lieu de naissance, ni ses compatriotes, ni sa condition. Que si l’on n’admet pas que les âmes sont de différentes natures, que les unes, naturellement mauvaises, sont destinées à rejoindre une race mauvaise, les autres, naturellement bonnes, à faire partie d’une bonne race, il ne reste plus qu'à livrer au hasard tout le cours des choses humaines. Dès lors, il ne peut plus être question, ni d’un monde créé par Dieu et gouverné par sa Providence, ni d’un jugement de Dieu sur les actions de chacun. » De prine., II, ix, 5 ; cf. Contra Cels., V, 27, 34.

Origène ne dissimule pas la gravité de l’objection ; mais sa réponse est que tous les esprits, créés à l’origine libres et égaux, sont tombés par leur faute. De prine., II, 9, 6 ; Contra Cels, III, 69. On ne saurait trop insister sur la place qu’accorde Origène au libre arbitre. Nous y reviendrons en parlant de son anthropologie. Mais la liberté n’est pas une faculté propre à l’homme, elle appartient aussi bien à toutes les créatures, à tous les esprits ; elle fait partie de leur essence même : « En créant dans le principe ce qu’il a voulu créer, c’est-à-dire les natures raisonnables, Dieu n’a pas eu d’autre motif de créer, que lui-même, c’est-à-dire sa propre bonté. Puis donc que lui-même a été le motif de ce qui devait être créé, lui en qui il n’y avait ni variété, ni changement, ni impuissance, il a créé égaux et semblables tous ceux qu’il a créés, car il n’y avait pour lui aucune raison de les faire variés et divers. Seulement, comme les créatures raisonnables elles-mêmes étaient douées de la faculté du libre arbitre, la liberté a entraîné les unes au progrès par l’imitation de Dieu, les autres à la chute par la négligence. » De prine., II, ix, 6 ; cf. I, v, 3 ; vi, 3 ; viii, 3 ; II, i, 2 ; iii, 4 ; III, i.

Parmi les créatures, les unes se sont donc attachées avec plus ou moins de force au bien suprême, et, après avoir occupé la même place ou un rang égal dans le monde céleste, ont peu à peu formé une hiérarchie selon le degré de leur bonne volonté, depuis les archanges, les trônes et les dominations, qui résident dans les cieux des cieux, jusqu’aux anges inférieurs qui régissent les astres et qui sont attachés à des corps visibles, moins purs par conséquent que ceux des puissances supérieures. Les autres ont volontairement commis le mal ; elles se sont écartées de Dieu ; ce sont les démons et les hommes, et c’est leur chute, leur xaxaêoXY), qui est proprement la cause de l'état actuel de l’univers, celui-ci étant moins une création qu’une dégradation. De prine., i, vin ; II, ix, 6 ; III, v, 4 ; In Joan., xix, 22 ; In Mallh. comment ser., 71.

De tous ces esprits, celui qui nous intéresse le plus est évidemment l'âme, puisque c’est l'âme qui caractérise l’homme. Origène insiste longuement sur sa nature, bien qu’il semble parfois se perdre en des explications plus ou moins cohérentes. Après avoir défini l'âme : une substance douée d’imagination et de mouvement, çpavxaaxix ?] xal ôppnQxiXT), il déclare que les animaux eux-mêmes ont une âme, puis il se demande si les anges eux aussi ont des âmes et il conclut : « Bien que nous ne soyons autorisés par aucun texte des saintes Écritures à dire que les anges et les autres esprits qui servent Dieu soient des âmes ou aient des âmes, cependant la plupart pensent que ce sont des êtres animés. » De prine., II, viii, 1. Ces concessions faites à l’usage ou à la tradition, Origène semble ne plus envisager Pâme que chez l’homme, et c’est bien elle en effet qui sert à définir proprement la nature humaine. Celle-ci est un esprit refroidi, ainsi que le montre l'étymologie, mais elle n’en a pas perdu pour autant la faculté de reconquérir sa pureté primitive : tûv Se Xoyixcov rà àfxapTT ; aavxa xal 8 ta toùto èx7rsoôvTa xrç èv fj Tjaav xaxaaxàcjscjç xaxà TTjv àvaXoylav tûv otxeltov à[i.apxY]fj.d<.Ta>v -n.|i.cop[aç x a P tv a<*>u, aaiv èveêXyjOr), xal xaOaipôjxeva TràX'.v àvâyovxai èv ꝟ. 7rp6xepov vjaav xaxaaxâae !., roxvteXcoç Trjv y.axîav àTroTiGéjjieva xal xà ao)(i.axa" xal TràXiv sx Ssuxépou xal xptxou xal^Xeûvâxiç S'.açôpoiç è[i.6âXXovxai crwpiaai npbç xi.ji.wp [av. ( etxôç yàp)> Siaçôpouç xôcî[j.oijç auax7)val xs xal a’jvtaxaaOai, xoôxo (jlèv 7rapeXOôvxaç, xoùxo Se (iiXXovxaç… ratpà xt)v à7T07cxwaiv xal xy)v d>ûÇtv x ?)v àxô xoû Çîjv xtô 7tve0[xaxt. yéyovsv 7) vûv X£yo|j.£vr) ^X')' oùca xal Sexxtxr) tyjç È71av680u xîjç ècp’cmsp -/jv èv àpXYf ôrcep vojxlÇw XéyeaOai ùrco xoû irpoçyjxou èv xtô- èTÛaxpe^ov, ^X'Ô I^OU"e k ttjv àvàTwcualv aoucoaxe ôXov xoûxo eîvai voûç. De prine, II, viii, 3.

Nous voudrions en savoir davantage. En particulier le problème de l’origine de l'âme nous intéresse au plus haut point, et nous ne voyons pas comment Origène l’a au juste résolu. A première vue, on serait tenté de lui attribuer la théorie pythagoricienne de la métempsycose, et tel est, en effet, le grief que saint Jérôme articule contre lui, en résumant à grands traits la fin du premier livre du De principiis : Ad exlremum sermone lalissimo disputavit angelum sioe animam aut eerte dœmonem, quos unius asserit esse naturæ sed diversarum voluntatum, pro magniludine