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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.1.djvu/145

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PÉCHÉ — PÉCHÉ ORIGINEL

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ton, De pcccalo ventait, dans Collai innés Gandavenses, 1928, p. 31-42, 134-142 ; P. Galtier, op. ull. cit., toc. rii. ; L’Ami du clergé, 3 janvier 1929, p. 0-8 ; F, Blanche, Une théorie de l’analogie, dans Revue de philosophie, 1932, p. 37-38 ; J. de tilic, Vie morale et connaissance de Dieu d’après Fr. de Victoria, dans Revue de philosophie, 1931, p, 581-010.

Denzinger, n. 775, 804, 833, 835, 1020.

IX. Péché PHILOSOPHIQUE.

Aux ouvrages et aux documents cités au cours de ce chapitre, on peut ajouter : Recueil historique des huiles… concernant les erreurs de ces deux derniers siècles. Mous, 1098, in-8°, p. 374-380 ; Histoire ecclésiastique du XVI/e siècle, 4 vol., t. iv, Paris, 171 4, p. 391 ; D’Avrigny, Mémoires, t. iii, p. 336-342.

Th. DEMAN.


PÉCHÉ ORIGINEL.

L’Église enseigne que chaque homme, en vertu d’une solidarité mystérieuse qui le relie au premier couple dont il descend, naît dans un état de déchéance et de culpabilité, causé en lui par la faute du chef du genre humain. L’expression de « péché originel » exprime cette croyance : on l’emploie pour signifier, soit la faute même de nos premiers parents, soit l’état de déchéance et de péché consécutif à cette faute et qui s’étend à la nature humaine tout entière.

L’Église ne rattache ce dogme ni à l’expérience humaine, ni à la spéculation philosophique ; en l’enseignant, elle a conscience d’être l’interprète de l’Écriture, de la tradition et des conciles. Aussi, le théologien doit-il tout d’abord établir les fondements révélés de cette doctrine, en préciser la formule dogmatique, en montrer enfin la cohérence rationnelle avec l’ensemble de nos connaissances religieuses, morales et historiques. C’est ce que l’on fera dans les grandes divisions suivantes :
I. Le péché originel dans l’Écriture.
II. La tradition ecclésiastique avant la controverse pélagienne : Les Pères grecs (col. 317).
III. La tradition ecclésiastique avant la controverse pélagienne : Les Pères latins (col. 363).
IV. La controverse pélagienne (col. 382).
V. La doctrine entre le concile d’Éphèse et la fin du VIIIe siècle (col. 406).
VI. Les premières spéculations théologiques en Occident (col. 432).
VII. Le développement de la théologie, de saint Thomas aux controverses doctrinales du xvie siècle (col. 462).
VIII. Les réactions doctrinales de l’Église et des théologiens en face de l’erreur, du XVIe au XVIIIe siècle (col. 510).
IX. Les affirmations de l’Église et des théologiens en face du naturalisme contemporain (col. 556).
X. La théologie orientale (col. 606).

I. LE PÉCHÉ ORIGINEL DANS L’ÉCRITURE.

La doctrine complète du péché originel ne se trouve explicitement révélée que dans saint Paul, Rom., v, 12-21. C’est ce texte surtout que citent les conciles. .Mais aucun doute que l’Apôtre, dans ce passage, ne se réfère au texte de la Genèse. Aussi, pour une juste appréciation de sa pensée, ainsi que pour l’intelligence du développement de la révélation, sera-t-il utile d’envisager successivement :


1° L’idée de la chute et de la corruption humaine dans la Genèse ; —
2° Le silence relatif des documents révélés postérieurs jusqu’au ir 2 siècle avant notre ère (col. 287) ; —
3° Le témoignage des livres canoniques et extra-canoniques à la fin du judaïsme (col. 289) ; —
4° La révélation de l’origine du péché dans l’Évangile et dans saint Paul (col. 305).

I. L’idée de la chute et de la corruption humaine dans la Genèse.

On étudiera d’abord le texte capital, Gen., ii, 8-nr, 24 ; puis d’autres textes accessoires.

I. LE TEXTE CAPITAL (Genèse, ii. 8-iii, 24). —

L’idée de la chute se trouve inscrite dans l’une des pages les plus importantes, les plus poétiques et aussi les plus difficiles à interpréter de l’Ancien Testament. à la seconde page de la Genèse, en un passage que les critiques rapportent à la source jahwiste.

Le texte et son explication obvie.

L’auteur inspiré poursuit un but bien précis dans ce récit : après avoir expliqué la création de l’homme, c’est l’explication de l’état actuel, malheureux et durable, de celui-ci. qu’il veut nous faire entendre. Elle est dans la chute morale du premier couple humain.

1. L’état d’innocence et d’immortalité. Le premier homme avait été créé pour vivre heureux dans la familiarité de Jahweh. A cette fin, Dieu l’avait mis dans le « jardin d’Éden pour le cultiver et le garder, il, 16. C’était là un milieu favorable à son bonheur. Bien situé, le jardin était planté d’arbres agréables et bons à manger, sans compter l’arbre de vie au milieu du jardin, et l’arbre de la connaissance du bien et du mal. » II, 9.

L’homme s’y trouvait avec celle que Dieu venait de lui donner comme compagne ; il y était en pleine conscience de. sa ^supériorité sur les animaux, qu’il connaissait assez pour leur donner des noms convenables, ii, 18-20, en pleine connaissance de l’intimité originelle, de l’unité de nature qui l’unissait à sa compagne ; aussi la nomme-t-il d’un nom qui l’identifie avec lui en quelque sorte : « Celle-ci, cette fois, dit-il, est os de mes os et chair de ma chair. Celle-ci sera appelée « femme » (ischah), parce qu’elle a été prise de l’homme (z’sc/i) »… ii, 23. Il y était enfin dans une situation de naïve innocence : « Ils étaient nus tous deux, l’homme et la femme, sans en avoir honte. > il, 25. Car leurs yeux n’étaient point encore ouverts et « ils ne savaient point qu’ils étaient nus ». iii, 5-6. « Ils sont, remarque J.-M. Lagrange (L’innocence et le péché, dans Revue biblique, 1897, p. 350), comme des enfants qui n’ont pas éprouvé la concupiscence, et cependant ce ne sont pas des enfants, puisque l’homme et la femme qui est sa compagne jouissent d’une intelligence si sûre. »

Ce bonheur de l’innocence dans l’amitié de Dieu était fait pour durer : la façon dont la menace de mort est formulée, ii, 17, rappelée, ni, 17, sanctionnée, m, 24, indique que l’homme était gratifié du privilège de ne pas mourir aussi longtemps qu’il mériterait d’être librement admis à se nourrir de l’arbre de vie. Son état d’innocence et d’immortalité était conditionné par une épreuve.

2. L’épreuve.

En voici l’objet : « Tu peux manger de tous les arbres du jardin ; mais tu ne mangeras pas de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, car le jour où tu en mangeras tu mourras certainement. » ii, 17. Ainsi, l’homme peut jouir en paix de son bonheur, à condition qu’il se soumette au commandement divin et renonce à cette connaissance du bien et du mal que peut lui procurer le fruit défendu.

L’homme va être tenté précisément dans son appétit de connaître ; il le sera du dehors par un être pervers. « Le serpent était le plus rusé des animaux des champs que Jahweh ait faits. » ni, 1. Cet être mystérieux, dont l’identité avec le démon nous apparaît mieux si nous lisons le texte à la lumière de la révélation postérieure, se conduit déjà nettement ici comme une puissance hostile à l’homme, consommée dans l’art de perdre la femme. Il lui dit : « Est-ce que Dieu aurait dit : vous ne mangerez pas de cet arbre du jardin ? » Et la femme de répondre, en rappelant l’ordre de Dieu : « Vous n’en mangerez pas. vous n’y toucherez pas sous peine de mort. » Mais le serpent continue : « Non. vous ne mourrez point ; mais Dieu sait que le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront et vous serez comme Dieu, connaissant le bien et le mal. » iii, 2-5.

Ainsi ébranle-t-il. remarque J.-M. Lagrange, loc. cit., p. 355, à la fois la confiance en Dieu et la foi en ses menaces. Dès lors, l’objet défendu exerce librement sa séduction. La femme est déjà vaincue ; elle achève de