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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.1.djvu/190

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PÉCHÉ ORIGINEL. LES LATINS DU IVe SIÈCLE


première faute personnelle, il ne le jugeait désirable pour l’enfant souillé par la seule corruption originelle. Réservant sans doute, comme certains Pères grecs, le titre de pécheur, au sens plein du mot, à ceux qui étaient capables de fautes personnelles, il pouvait parler de l’innocence de l’enfant relativement à l’état des adultes pécheurs. Ce langage, quoi qu’il en soit, était équivoque. Cyprien l’a bien senti, et il ne s’est tenu ni au langage, ni à l’attitude de son maître en ce qui concerne la question du baptême des enfants.

En résumé, Tertullien est un témoin de la coutume de baptiser les enfants, quoiqu’il ait discuté de l’opportunité de cette coutume. Dans leur ensemble, ses affirmations ébauchent une théologie du péché originel que développera plus tard saint Augustin. Celle-ci se place au point de vue concret et historique pour envisager l’homme à l’état d’innocence et l’homme déchu. De ce chef, la vraie nature est celle qui vient de Dieu ; c’est celle d’Adam avant le péché. Celle que transmet Adam déchu est corrompue. Sans se préoccuper de distinguer nettement la coulpe et l’inclination pénale au péché, Tertullien se contente d’affirmer que, par le baptême, l’âme qui a reçu l’Esprit passe de l’état de souillure à l’état de sainteté. A la solidarité en Adam pécheur, succède la solidarité dans le Christ, source de vie. La première entraînait la communication par génération de la tache originelle à toute la race, la seconde introduit en celle-ci le principe de vie qui est l’Esprit.

2° Saint Cyprien (210-258) a moins traité dans ses écrits de la faute originelle que Tertullien. Cependant, deux textes méritent d’être signalés. L’un emploie pour désigner les suites du péché originel une métaphore qui deviendra classique, celle de blessure, vulnera : le Sauveur est venu pour guérir les blessures reçues par Adam, et le venin de l’ancien serpent. De opère ci elem., i, P. L., t. iv, col. 603 A ; éd. Hartel, t. iii, pars 1, p. 373.

L’autre, d’accord avec un concile d’évêques, soutient l’opportunité du baptême des enfants immédiatement après leur naissance. Personne ne doit être écarté de la grâce du salut : « Si l’on n’écarte point ceux qui sont chargés de nombreux péchés, à plus forte raison ne faudrait-il pas écarter l’enfant qui n’a commis aucun péché, nihil peccaoit, si ce n’est qu’il a, comme descendant d’Adam, contracté la mort héréditaire. Il peut d’autant plus facilement recevoir la rémission des péchés qu’il n’a point à se faire remettre de péchés propres, mais seulement des péchés étrangers, non propria sc<l aliéna pcccalu. EpisL, i.xv, 5, Hartel, p. 720.

II. La doctrine des Pères latins sue le péché

    1. ORIGINEL AU IV SIÈCLE##


ORIGINEL AU IV SIÈCLE, WSQU’A LA CONTROVERSE

péi.aoikvne. — Comme Tertullien et Cyprien, les Pères latins du iv° siècle enseignent l’existence en l’homme d’une i ache héréditaire consécul ive à la faute d’Adam. Cette faute, d’après Zenon de Vérone, aurait été une faute de luxure, t. I, tr. XIII.." », P. L., I. i, Col. 348 ; selon saint Ambroise, elle cul pour cause l’orgueil : minimum peccalum in Imminc suprrbia est ;

quandoquidem inde manavit noslri origo delictL. In psabn., cxviii, serin, vii, 8, P. L. (éd. L845), I. xv, col. 1283 A : EpisL, lxxiii, ô. i. xvi, col. 1252 li. Elle entraîna poui l’homme la déchéance île son état angélique. De paradiso, 12. t. i. col..">i CD. Tous les Pères enseignent alors notre déchéance morale et physique en Vdam. Cf. Tixeront, "/<. cit., t. ii, p. 277 sq. Mais, .i cette déchéance, s’ajoute I il une véritable faute ? La souillure que tous s’entendent.> proclamer implique i elle en l’homme déchu une véritable culpa bilité héréditaire ? El laquelle ? H est Lntéreasanl d’in terroger, à ce point de vue, les principaux témoins de la doctrine courante a la veille do l’hérésie pélaglenne.

Saint Ambroise.

1. Solidarité de la race humaine

avec Adam. — L’évêque de Milan, comme Irénée, reconnaît la solidarité et l’enveloppement de toute la race en Adam : Fuit Adam et in illo Juimus omnes, periit Adam et in illo omnes perierunl. In Lue., t. VII, n. 234, t. xv, col. 1762 B.

Plus explicite encore sur l’étendue de cette solidarité est le texte suivant : Lapsus sum in Adam, de paradiso ejectus in Adam, mortuus in Adam ; quomodo revocet, nisi me in Adam inveneril, ut in illo culpse obnoxium, morti debilum, ila in Christo justificalum ? De excès. Sali/ri, ii, (i, t. xvi, col. 1317 A. Ici, remarque .justement Tixeront, t. n. p. 27’.), la solidarité de tout homme avec Adam n’est plus seulement dans la peine ; elle est dans la faute : lapsus sum, culpse obnoxium.

2. Conséquences de cette solidarité.

Jusqu’où va cette solidarité dans le péché d’Adam ? Elle implique la transmission d’un péché héréditaire qui, lors des cérémonies de l’initiation chrétienne, est détruit par le lavement des pieds : « Pierre était pur. mais il devait avoir néanmoins les pieds lavés : il tenait, en effet, par voie de succession du premier homme, le péché que celui-ci apporta au monde quand le serpent le blessa au talon, supplantavit, en le persuadant par sa tromperie. Il faut donc que la plante de ses pieds soit lavée pour que les péchés héréditaires soient effacés ; quant aux péchés propres, ils sont c/Jacés par le baptême. » De nu/st., vi, 32, t. xvi, col. 398 C.

Même affirmation relative au mal héréditaire guéri par le lavement des pieds, In psalm., xlviii, 8 et 0, t. xiv, col. 1 158 CD. Ambroise l’oppose plus nettement encore à nos fautes personnelles, au point de vue de son origine et de ses conséquences. C’est là l’iniquité d’Adam, non la mienne ; elle ne peut me causer aucune terreur ; au jour du jugement, nos péchés personnels seuls, non ceux qui viennent d’autrui, seront punis en nous. Aussi je pense que cette iniquitas calcanei est plutôt un entraînement à pécher, lubricum delinquendi, que quelque culpabilité proprement dite de notre délit, quam realum ediquem noslri esse delicti. Aussi le Seigneur a-t-il dit : « Lavons-nous donc les pieds », pour enlever le « glissant du talon », lubricum calcanei.

Dans le même sens, l’auteur du De sacramentis, m, 5-7, t. xvi, col. 433 C, défend la légitimité du lavement des pieds après le baptême en commentant ainsi le texte : Qfii se lavit non necesse habet itrrtim lavare nisi ut solos pedes lavet. « Pourquoi cela ? parce que toute faute est lavée dans le baptême. Toute faute est donc écartée. Mais, parce qu’Adam a été supplanté par le démon et que le venin du serpent a été répandu sur les pieds d’Adam, c’est pour cela que tu laves les pieds, afin que, dans la partie à laquelle le serpent s’est attaqué, tu possèdes un plus grand secours de sanctification pour qu’il ne puisse plus te supplanter. Tu laves les pieds, afin de laver le venin du serpent. »

Si nous comprenons bien ce langage, qui n’est plus tout à fait le nôtre, les peccata hæreditaria, Viniquitas calcanei impliquent plutôt un entraînement au péché qu’une culpabilité assimilable à celle de nos péchés personnels. Entre la tendance au péché et la culpabilité personnelle, saint Ambroise n’a point encore d’expression comme peccatum nature pour exprimer l’idée d’une culpabilité héréditaire. Quoi qu’il en soit, il tend à distinguer nettement entre les Conséquences des fautes personnelles et celles des péchés héréditaires. I.a tache héréditaire n’ent i.iin. nullement, pour les enfants, les mêmes conséquences

que les péchés personnels. Ceux-ci appellent une puni

tion positive : celle là ne la comporte point. On n’en conclura pas que l’enfant mort s ; ms baptême peut aller au ciel ; lnbrojse affirme le continue.Vffli’i