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    1. PÉCHÉ ORIGINEL##


PÉCHÉ ORIGINEL. DOCTRINK DE S. AUGUSTIN

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lemment la négation « le la coulpe et de la peine due au péché originel chez les enfants : non seulement les hérétiques n’admettaient point que les enfants morts sans baptême fussent damnés, c’est-à-dire exclus du royaume des eieux, mais ils affirmaient leur entrée temporaire dans la félicité du paradis du bon larron en attendant la félicité du royaume des cieux après la résurrection. Voilà ce qu’Augustin déclarait aller contre la foi la mieux fondée : Non siilum non eunt in damnationem parvuli, etsi nullum eos christianæ fidei lavacrum a vinculo originalis peecati absolvat, verum etiam felicitate paradisi post mortem intérim perfruun-Inr, posi resurrectionem vero etiam regni cwlorum felicilatein possidebunt. Hssc iste contra catholicam fundatissimam ftdem dicere (ausus est). De anima, ibid., col. 506. Voilà ce que condamne le concile quand il rejette dans son canon 3 l’affirmation pélagienne d’un lieu intermédiaire de bonheur entre l’enfer et le ciel.

De ce fait, l’on établit à la fin du canon une association entre le démon et les enfants morts sans baptême : « Dès lors quel catholique hésiterait à dire cohéritier du démon celui qui n’a point mérité d’être cohéritier du Christ ? Celui qui ne sera pas à la droite de celui-ci sera inévitablement à la gauche. » En cela le concile est sans doute d’abord l’écho de saint Augustin, mais aussi de la tradition antérieure qui place l’homme déchu sous l’empire du démon aussi longtemps qu’il n’est pas régénéré dans le Christ : n’est-ce point la tradition de l’Ambrosiaster, qu’Augustin citait sous le nom d’Hilaire, et qui place les âmes coupables du seul péché originel dans l’enfer supérieur (et non dans la géhenne), sous l’empire du démon aussi longtemps qu’elles ne sont pas marquées du signe de la croix ? Ci-dessus, col. 370.

Selon la vraisemblance historique, les Pères de Carthage se représentaient sans doute les enfants morts sans baptême sous le même aspect que l’évêque d’Hippone, et cet aspect était plus sévère que celui sous lequel l’Ambrosiaster les voyait. Mais il faut remarquer aussi que, dans sa teneur objective, leur texte ne parle ni de tourments, ni de flammes, ni de douleur. Aussi, la théologie postérieure ne croira pas aller contre ce texte et rééditer la fable pélagienne en affirmant l’existence des Limbes. Ceux qu’elle y place ne sont exempts ni de coulpe, ni de peine : sans connaître les peines sensibles de la géhenne, ils sont pourtant exclus pour l’éternité de l’héritage du Christ, associés, du moins en ce sens privatif, au malheur des damnés, et d’une certaine façon sous l’empire du démon. Cf. art. Limbes, t. ix, col. 7(il.

Les derniers canons, tout en traitant directement de la nature de la grâce et de l’impossibilité d’être sans péché, précisent indirectement les limites des forces de la nature déchue. Le 6e anathématise quiconque « déclare que la grâce de justification nous est donnée pour que nous puissions faire avec plus de facilité ce que nous pouvons faire par notre libre arbitre, si bien que, sans la grâce, nous pourrions accomplir, quoiqu’avec plus de difficulté, les commandements divins », C’est l’affirmation de l’incapacité absolue, non relative, du libre arbitre déchu à accomplir les commandements divins : « Le Seigneur n’a pas dit : sans moi vous n’agirez que difficilement, mais : sans moi vous ne pouvez rien faire. »

Les trois derniers canons sont dirigés contre ceux qui soutiennent que c’est par humilité seulement et non en vérité que chacun doit se déclarer pécheur.

Ainsi, dès 418, grâce à l’activité de saint Augustin, les pélagiens étaient condamnés par l’autorité des conciles et des papes ; par les canons de Carthage, de précieuses précisions doctrinales étaient acquises et, vers la fin (le l’année, dans une lettre au piètre Xyste, futur pape, l’évêque d’Hippone pouvait dire sa joie

du triomphe de la vérité et de la condamnation de l’hérésie par le Siège apostolique. Au grand docteur il

restait a justifier, a commenter, a défendre les vérités acquises. C’est encore dans ses enivres que la postérité trouve aujourd’hui fimeilleur commentaire aux décisions doctrinales qu’il axait inspirées.

II. la doctrine CATHOLIQUE. 1° Les preuves du péché originel. - Augustin les emprunte à l’Écriture, à la tradition, aux pratiques liturgiques, enfin a l’expérience même.

1. L’Écriture. Augustin, avec la tradition, a toujours appuyé la doctrine de la chute et du péché héréditaire sur l’Écriture. Déjà, par une exégèse allégorique, a la façon d’Ambroise et d’Origène, le De denesi contra manichœos montre cette doctrine révélée aux premières pages de la Genèse. D’une façon plus littérale, le De lienesi ad littéraux (110-115) en dégage le sens. Dans la controverse pélagienne, Augustin utilisa aussi le psaume l (Enarr. in psatm. L, P/), le livre de Job (Serm., ei.xx. 2) et le passage de l’épître aux Lphésicns, ii, 3 (ibid.), mais ses deux sources principales furent le texte de l’épître aux Romains, v, 12, et celui de saint Jean, ni, 5.

a) Le texte de saint Paul (Rom., v, 12), comme il convient, tient la première place dans son argumentation. Il le lisait ainsi : Per unum hominem peccatum intravit in mundum, et per peccatum mors, efita in omnes homines pcrlransiit, in quo omnes peccaverunt. Serm., ccxciv, 15, t. xxxviii, col. 1344.

De ce texte, il tire deux arguments : l’un fondé sur l’exégèse du per hominem, l’autre sur le sens de in quo omnes peccaverunt. Tandis que les pélagiens, appuyés sur la première expression, faisaient d’Adam le simple introducteur du péché dans le monde, par l’entraînement de son mauvais exemple, Augustin répliquait que le premier entraîneur au mal, c’était le démon et non pas Adam. « C’est d’un péché de propagation, et non pas d’un péché d’imitation, que veut parler l’Apôtre ; car, s’il avait voulu parler d’un péché d’imitation, il aurait dit que le péché est entré dans le monde par le diable. » Serm. cité ; De pecc. mer., i, ix, 9, 10, t. xliv. col. 114 sq. ; Op. imperf., II, 47, t. xlv, col. 1161.

Il tire son second argument de la formule in quo omnes peccaverunt, qu’il traduit, dit-il, à la façon d’Hilaire (Ambrosiaster). Durant toute la controverse, il accorde une importance exceptionnelle à cette incise pour la démonstration du péché originel. Après avoir fait d’abord rapporter le relatif in quo au péché, pour une bonne raison grammaticale, il le fait ensuite s’accorder avec « homme » ; ainsi ce terme désigne-t-il Adam et implique-t-il que tous les hommes ont péché en lui. De pecc. mer., i, x, 11, t. xliv, col. 115 : Contra duas epist. pelag., iv, 7, t. xliv, col. 614.

Julien objectait que la particule était causative et devait être traduite : parce que tous ont péché, (.ont. Jul., VI, xxiv, 75, t. xliv, col. 868. Augustin repoussera toujours cette explication, sans doute parce qu’il la voyait liée chez ses adversaires à la négation du péché originel : il la trouvait « nouvelle, défectueuse et fausse ». Cf. ibid.

Cependant, l’exégèse catholique moderne traduit aujourd’hui avec Julien : « la mort a passé dans tous les hommes, parce que tous ont péché. » Mais, si elle donne raison à l’adversaire d’Augustin pour la grammaire, elle lui donne tort pour le fond. Le péché originel est bien contenu dans la traduction admise par Julien. Ci-dessus, col. 308,

Augustin montre ensuite que des f. suivants (v, 1219) se dégage organiquement la même idée de propagation du péché. Entre autres le ꝟ. 16 attire son attention spéciale : il est question du péché unique qui entraîne la condamnation de tous : « Si la condamnation ns venait pas d’un péché originel, mais seulement