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    1. PÉCHÉ ORIGINEL##


PÉCHÉ ORIGINEL. LA THÉOLOGIE RUSSE

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vvj-i-ji ;. » Eùvo’j/iç TÎjç Ispôç (koXoYtaç, Zantc, 1802, p. 360-363.

Les autres théologiens considèrent le péché originel du point de vue subjectif et le présentent comme une corruption peccamineuse, un état peccamineux affectant la nature humaine en chacun des descendants d’Adam, corruption dont la cause est le péché personnel du premier père. Mais, quand il s’agit de définir en quoi consiste cette corruption, ils ne s’entendent pas entre eux. La plupart disent que cette corruption n’est autre que la concupiscence mauvaise, c’est-à-dire cette inclination positive au mal plus grande que l’inclination au bien, cette perversion des facultés supérieures et de la sensibilité qui constitue un véritable déséquilibre, une blessure de la nature considérée en elle-même. C’est la doctrine de Melèce Syrigos, qui écrit : « Le péché originel consiste dans la seule tendance et inclination au mal, à cause de laquelle les enfants nouveau-nés sont dits être impurs : tô Tcporca-Topixôv à[i.àpT7)|i.a ŒTSXETat, eîç [i.6vv]v tyjv porà]v xal xXtaiv Tcpôç ib xaxôv, Sià vrçv Ô7roTav xal xà v£OYévvr)T<x (3pé<pïj oa6àXXovTat, Troie ; slvou àxâOap-a. Kaxà tgjv KaX61vixcôv xsçocXaîcov, éd. cit., p. 81 ; cf. p. 31, 84-85. I. Mésoloras et C. Androutsos adoptent aussi ce point de vue, mais complètent la définition en disant que le péché originel consiste à la fois et dans la privation de la justice originelle et dans l’inclination positive au mal, ou la concupiscence. Androutsos fait judicieusement remarquer que la concupiscence ne présente un caractère peccamineux que dans les nonbaptisés. Sujj.60Xikyj, 2e éd., p. 180-187 ; Aoy^arixT), p. 152-162. Cette distinction, déjà faite par saint Augustin, s’impose nécessairement à quiconque place l’essence du péché originel dans la concupiscence et veut rester dans l’orthodoxie. D’autres théologiens, comme Dosithée, Confession de foi, c. vi, Kimmel, t. i, p. 432-433, comparent le péché originel à un poids qui pèse sur chacun de nous : ce poids, c’est l’ensemble des suites du péché d’Adam, que supportent tous ses descendants. D’autres, comme Damalas, Ilspi àpx<ï>v, p. 70, disent que c’est une souillure qui s’attache à l’âme et que Dieu seul peut faire disparaître : outoç ô [xoXuafxôç elvat ii, omp [isvsi. ziç, tyjv ^uxV xa’ô 7T£ P [lovoç ô ©eàç Suvaxai. va àçaipéarj. Tous ces théologiens, quelque critiquables que puissent être leurs explications, se maintiennent dans la doctrine définie par l’Église catholique, parce qu’ils affirment contre les protestants : 1. que la nature humaine, quoique blessée par le péché originel, n’a pas été totalement corrompue et reste capable de bien moral ; 2. que le baptême fait disparaître, efface le péché originel proprement dit et nous rend agréables à Dieu en nous donnant sa grâce.

III. Doctrine des théologiens russes.

Les Russes ne commencent à avoir une théologie à eux qu’à partir du xviie siècle, sous l’influence manifeste de la théologie latine. Cette théologie a son berceau à l’École de Kiev.

1° La théologie russe du xviie siècle. — Dès l’origine, les théologiens de Kiev se font les disciples de saint Thomas et ne s’écartent de sa doctrine que sur les deux points principaux de la primauté romaine et de la procession du Saint-Esprit, objets de controverses passionnées depuis le schisme. Pour ce qui regarde l’immaculée conception, ils restent fidèles à la tradition de l’Église byzantine, et enseignent comme un dogme de foi le privilège de la Mère de Dieu. Voir l’article Immaculée conception, loc. cit., col. 969971. Sur les effets et la nature du péché originel, ils professent la doctrine irréprochable de la Confession orthodoxe de Pierre Moghila, que nous avons exposée ci-dessus. Cf. D. Vichnevskii, Kievskaiia Akademiia v pervoï polovinie xrm stolietiia ( L’Académie de Kiev

dans la première moitié du xviiie siècle), Kiev, 1903, p. 232. L’un d’eux, le célèbre Etienne Javorskii († 1722), dans son grand ouvrage polémique contre les protestants Intitulé : Kumen viery (La pierre de la foi), réfute la doctrine luthérienne sur le péché en général et le péché originel en particulier. Il enseigne que la concupiscence, considérée en elle-même, n’est pas un péché mais quelque chose de naturel. Dans l’homme déchu, c’est une suite du péché originel, qui ne présente aucun caractère peccamineux, au moins dans l’homme régénéré par le baptême. L’homme déchu n’a pas perdu le libre arbitre et demeure capable de produire des actes moralement honnêtes. Kamen viery, éd. de Kiev, 1730, p. 891-1016. De Kiev, cette doctrine orthodoxe pénétra aussi dans le reste de la Russie. Elle s’y maintint pendant la première moitié du xviie siècle.

Infiltrations luthériennes.

A partir de 1763,

l’influence de Théophane Procopovitch († 1736), qui avait professé la dogmatique à l’Académie de Kiev de 1711 à 1716, devint prépondérante. Procopovitch, dès le temps de son professorat, avait adopté la plupart des thèses de la théologie luthérienne sur les sources de la révélation, l’état primitif de l’homme, le péché originel, la grâce et la justification. Accusé d’hérésie, il échappa à toute condamnation et obtint même l’évéché de Pskof, grâce à la protection de Pierre le Grand, dont il était le théologien favori. L’influence de ses leçons, restées manuscrites et n’embrassant qu’une partie des traités de la théologie dogmatique, fut neutralisée, pendant toute la première moitié du xviiie siècle, par celle de son rival, Etienne Javorskii, dont la Pierre de la foi fut éditée officiellement dès 1728. Mais, dans la seconde moitié du xviiie siècle, on commença à s’inspirer d’abord de son plan, puis de ses doctrines. Ses leçons, éditées en traités séparés, de 1773 à 1779, furent publiées à Leipzig de 1782 à 1784 par Samuel Mislavskii, devenu métropolite de Kiev († 1796), de manière à former un cours complet de dogmatique suivant le plan qu’il avait tracé lui-même dans ses Prolégomènes. Et, comme des traités étaient incomplets, que d’autres manquaient entièrement, Samuel Mislavskii, qui était pour son compte tout dévoué aux doctrines du luthéranisme allemand, ne trouva rien de mieux que de suppléer à ce qui manquait par des emprunts directs faits aux Loci theologici de Jean Gerhard (Francfort, 1657) et à la Theologia didactico-polemica de Jean-André Quenstedt (Wittenberg 1685). Pour ce qui regarde la doctrine du péché originel, Procopovitch n’avait laissé que quatre chapitres d’un Tractatus de statu hominis corrupti, que Semenov Deniciev avait publiés pour la première fois à Moscou en 1776. Ils reparurent dans le t. n de la Christiana orthodoxa theologia de l’édition de Mislavskii, augmentés de dix nouveaux chapitres, tirés presque littéralement de Gerhard et de Quenstedt. On devine, dès lors, la doctrine qui y était contenue. Ce n’était ni plus ni moins que la théologie classique des luthériens allemands du xviie siècle. Le péché originel y est ainsi défini :

Peccatum originale nihil aliud est quam a peccato Adami in omnes ejus posteros derivata et propagata justitiie originalis privatio « habilus quidam infusus continue ) transgrediendi legem diuinam.totum homincm et omnes vires ejus occupans. Itaque, non in solo reatu seu obligatione ad pœnam propter Adamum nobis imputata, sed etiam in qualitale uitiosa positiva ratio originalis peccati consistit. Clirisliana orthodoxa theologia, t. ii, Leipzig, 1783, p. 466.

Cet habitus infus n’est pas autre chose que la concupiscence mauvaise, qui constitue un prcti péché, digne de la mort temporelle et éternelle, aussi bien dans les baptisés que dans les infidèles, sous quelque