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    1. PÉLAGIANISME##


PÉLAGIANISME. EN BRETAGNE

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a été ordonné que Pelage et Célestius, inventeurs d’une doctrine exécrable et corrupteurs de la vérité catholique, seraient expulsés de Home… Leur criminelle opiniâtreté dans l’erreur nous oblige à renouveler notre prescription, nous venons de décider que ceux qui, sachant en quel endroit de l’empire se trouvent Pelage et Célestius, auront négligé de les chasser ou de les signaler, seront punis comme complices. Il importerait que vous puissiez opposer votre autorité à l’attitude de certains évêques qui, persistant dans l’erreur, viennent en aide aux deux novateurs par un consentement tacite, ou refusent de les attaquer publiquement. Il faudrait que le dévouement de tous les chrétiens proscrivît cette hérésie jusqu’à ce qu’il n’en restâtplus aucune trace. C’est pourquoi, vous vous adresserez à tous les évêques leur enjoignant de rendre, à cet égard, témoignage de leur foi : ceux d’entre eux qui négligeraient de souscrire la condamnation de Pelage et de Célestius seront dépouillés de la dignité épiscopale, chassés pour toujours de leurs cités et retranchés de la communion de l’Église. » Inter August. epist., cci, t. xxxiii, col. 926.

Julien osa déclarer que le rescrit impérial était en sa faveur parce que les erreurs des manichéens avaient été proscrites. C’est alors qu’il composa son livre De constantise bnno contra perfidiam Manichœi.

Boniface fit appliquer l’édit impérial : Turbance se soumit, les autres furent déposés, Julien ne Je sera qu’en 421.

Cependant, le préfet de Rome, Volusien, oncle de Mélanie la Jeune (Piiotius, cod. lui) était païen et favorisait les pélagiens, ce qui permettait à Célestius de demeurer secrètement à Rome. Constance, associé à l’empire comme beau-frère d’Honorius, écrivit à Volusien, sans doute à l’instigation de Boniface, pour le forcer à exécuter les édits déjà portés (421).

Julien et ses compagnons allèrent se réfugier en Cilicie auprès de Tiiéodore de Mopsueste. Ce dernier jouissait d’une grande réputation en Orient, il écrivit un ouvrage en cinq livres, Contre ceux qui soutiennent que l’homme pèche par nature et non par volonté, voir ce qui est dit art. Péché originel, col. 356 sq. C’est à Mopsueste que Julien aurait composé le Commentaire sur le Cantique (ci-dessus, col. 703).

Garnier a conjecturé qu’apprenant la mort de l’empereur Honorius (août 423) et du pape Boniface (septembre 422), Julien serait rentré en Italie à la fin de 423, P. L., t. xlviii, col. 294. Mais les preuves qu’il apporte à l’appui sont extrêmement faibles ; il n’y a guèie plus de fond à faire sur un concile tenu en Cilicie, après le départ de Julien, où celui-ci aurait été condamné par les évêques de la province, y compris Théodore. Cette affirmation ne repose que sur une phrase peu claire de Mercator, et personne que lui ne connaît ce concile. Rejut. Theodori, 3, P. L., t. xlviii, col. 216. Quoi qu’il en soit, on retrouve le groupe pélagien à Constantinople où il paraît bien qu’Atticus (t octobre 425) a sévi contre lui. C’est ce qui ressort d’une lettre du pape Célestin à Nestorius, sans qjc l’on puisse rien dire sur les suites de cette action, car peu de temps après on entendra parler d’un nouveau séjour, dans la ville impériale, de Julien et de son groupe (Florus, Oriontius, Fabius) ; et Célestius lui-même s’y trouve sans doute en 429. Voir ci-dessous.

II. LE PÉLAGIANISME DANS LES GAULES ET EN

Bretagne. — Nous en constatons les traces par ce décret de l’empereur Valentinien adressé à Amacius, préfet des Gaules, et daté du 9 juillet 425 : « Pour ce qui regarde les divers évêques qui suivent les erreurs de Pelage et de Célestius, comme nous avons lieu de croire qu’ils se corrigeront, nous ordonnons qu’ils soient sommés de le faire par l’évêque Patrocle ; et si, dans vingt jours après la sommation, délai que nous

leur accordons pour délibérer, ils ne renoncent pas ; i leurs erreurs pour rentrer dans la foi de l’unité catholique, qu’ils soient chassés des Gaules. » Texte dans P. L., t. xlviii, col. 409.

1° Le moine Léporius. - Il faut rapprocher de ce décret, du moins Garnier l’a conjecturé, cf. P. I… t. xlviii, col. 412, l’étrange cas du moine Léporius. (Voir son article.) Ce moine, originaire de Gaule (de Bellay ou de Trêves), dépassa les erreurs de Pelage en les combinant aveedes erreurs christologiqucs. D’après Cassien, il disait que Jésus-Christ n’était en naissant qu’un pur homme, qu’il avait acquis la divinité par le mérite de ses travaux et en récompense de ses souffrances ; qu’il avait vécu sans aucun péché non par l’union de la divinité, mais par la force du libre arbitre ; qu’il avait été fait Christ à son baptême et Dieu après sa résurrection ; qu’il n’était point venu pour donner aux hommes la grâce de la rédemption, mais pour leur montrer seulement l’exemple d’unevie sainte ; qu’il ne fallait pas l’honorer pour lui-même comme étant Dieu, mais comme ayant mérité, par ses vertus, d’avoir Dieu en lui. Il concluait que les autres hommes pouvaient, eux aussi, par eux-mêmes, et sans le secours de Dieu, vivre sans aucun péché et obtenir tous les autres avantages auxquels Jésus-Christ était parvenu. Sur l’exactitude de ce signalement doctrinal, voir Léporius, col. 435 sq.

De telles erreurs le firent chasser de Gaule : arrivé en Afrique, il fut reçu charitablement, instruit et converti par Aurèle et quelques autres évêques, Augustin surtout. Ce trait éclaire le cœur et les procédés de ces rudes Africains, que l’on serait parfois tenté de trouver âpres dans la polémique, mais qui joignaient à une ardente haine de l’erreur un amour profond pour les âmes et ceci nous fait conjecturer que, s’ils n’ont pu ramener à la foi catholique des adversaires comme Pelage, Célestius et Julien, c’est que ceux-ci unissaient à un grand orgueil un attachement excessif et coupable à leurs propres idées.

Léporius, une fois converti, envoya sa rétractation aux évêques des Gaules. Gennade, De vir., 59, dit qu’ayant d’abord suivi le dogme des pélagiens, il demanda pardon de son erreur par cette lettre, rendit grâces à Dieu de l’en avoir tiré, corrigeant en même temps les mauvais sentiments qu’il avait eus sur l’incarnation. Il semblerait donc qu’une grande partie de la lettre devait être contre les pélagiens. Or, la lettre publiée par Sirmond ne concerne que l’incarnation, à moins de voir un désaveu du pélagianisme dans cette humble finale : « Voilà quelle est notre foi. Voilà le changement et la conversion qu’il a plu au Très-Haut d’opérer en nous. C’est là ce que nous croyons. C’est là ce que nous suivons par la miséricorde de Dieu, et non par le mérite de notre propre sagesse, afin que nous ne nous glorifiions point en nous-même. » Cette lettre dont on a attribué la composition à Augustin lui-même — ce qui est loin d’être évident — fut signée aussi par Domnin et Bon, sans doute les deux compagnons de Léporius. Les quatre évêques, Aurèle, Augustin, Flurenliuse ! Secundinus adjoignirent une lettre pour recommander le pénitent à Proculus et à Cyllenius. Ils n’attendirent pas leur réponse pour l’admettre à la communion. Il semble que Léporius demeura en Afrique et fut même promu au sacerdoce.

Le pélagianisme dans la Bretagne insulaire.

Il

faut mentionner la mission de Germain d’Auxerre. envoyé par le pape Célestin en Bretagne pour lutter contre certains restes des erreurs pélagiennes. Un évêque nommé Fastidius avait été initié, au cours d’un voyage en Sicile, à la doctrine de Pelage. Aidé d’un certain Agricola, fils de l’évêque Sévérien, il se mit à la répandre. Le diacre romain Palladius informa Célestin du danger. Germain d’Auxerre passa la mer à la