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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.2.djvu/148

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PIK X. L’ACTION SOCIALE
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pas d’étonner quelque peu après les actes si hardis posés en ce domaine par son prédécesseur. Cette attitude, disons-le. lui a été partiellement imposée par la turbulence de divers éléments, surtout italiens, et par l’alliance, assez surprenante à première vue, contractée par ceux-ci avec les modernistes. On exagérerait à peine en disant que l’attention de Pie X a été d’abord attirée sur le modernisme par les bruyantes sympathies que lui ont témoignées les démocrates chrétiens d’Italie.

1° L’action populaire en Italie. - Les directives données par Pie X dans la question sociale ont d’abord été provoquées par la.situation très spéciale faite, en matière politique, aux catholiques italiens. La règle du non expedit, posée par Fie IX. strictement maintenue par Léon XIII, avait eu pour résultat d’écarter les catholiques, en tant que tels, de l’activité proprement politique, (le n’était donc pas en constituant un groupe au Parlement que les catholiques préoccupés d’action sociale pouvaient faire aboutir leurs revendications en la matière. Leur initiative devait se limiter à peu près exclusivement à des œuvres d’assistance ou de bienfaisance, tout au plus devait-elle faire naître, si possible, des unions soit patronales, soit ouvrières permettant d’assurer un fonctionnement meilleur des rapports entre le capital et le travail. Suite dernier point, d’ailleurs, il semble que les résultats aient été assez minimes. Si active que fût l’Œuvre des congrès, qui centralisait toutes les associations catholiques d’Italie, il paraît bien qu’elle déployait surtout ses efforts dans le sens du » paternalisme », du patronage de la classe ouvrière, de l’assistance charitable aux déshérités de la fortune.

A cette forme limitée de l’action sociale se résignait mal, dans les dernières années de Léon XIII, un petit groupe de jeunes dont l’abbé Murri apparut bientôt comme le chef, et qui s’efïorçait d’orienter les efforts des catholiques italiens dans le sens proprement démocratique. Il s’agissait moins, au dire de ce groupe. d’être bienfaisant à l’endroit des classes déshéritées que de préparer celles-ci, sinon à la conquête définitive du pouvoir, du moins à une ample participation à l’activité politique. La formation d’un parti catholique social, avec toutes les conséquences que cela Implique, coalition avec d’autres partis, formation d’un groupe parlementaire, apparaissait comme le terme désiré. Ceci n’allait à rien de moins qu’à introduire au sein de l’Œuvre des congrès une scission d’abord latente, mais qui finirait un jour pai éclater.

Or, c’est contre cette tendance démocratique, laquelle avait déjà inquiété les derniers jours de Léon XIII (encyclique Graves de communi). que Pie X sera amené à prendre position dès les premiers mois de son pontificat. Xon qu’il fût retenu plus que de raison par la formule du non expedit : tout en maintenant sur ce point l’attitude de ses deux prédécesseurs, il ne laissa pas de poser le principe que des exceptions pourraient être apportées à la règle, par l’autorité ecclésiastique, quand il s’agirait, à des élections législatives, de faire triompher le candidat du parti de l’ordre. contre celui de la révolution. Ce qu’il redoutait avant tout, c’était précisément les collusions entre

démocrates chrétiens. et ceux qu’à l’imitation de l’Allemagne on appelait en Italie les démocrates sociaux. autrement dit les socialistes. Et c’est tout particulièrement, semble-t-il, au concept proprement démocratique que s’adressent ses blâmes.

La chose est déjà visible dans une lettre du 6 novembre 1903, adressée au comte Grossoli, un des dirigeants de [’Œuvre des congrès, où les éloges à l’adresse de l’œuvre se tempèrent de quelques rappels a l’ordre. Plie éclate dans le motu proprio « Fin dalla prima », du 18 décembre de la même année, qui édicté

un a règlement fondamental de l’action populaire chrétienne ». Les 19 articles de ce règlement essaient de donner un schéma général de ce que doit être la « démocratie chrétienne ». Le mot, en effet, est encore conservé, mais il est aisé de voir qu’il recouvre un concept tout différent de celui que préconisaient les éléments catholiques avancés. La démocratie chrétienne y est en effet définie « une action bienfaisante en faveur du peuple ». Cette action, qui doit s’interdire toute ingérence politique, doit demeurer en très stricte dépendance de l’autorité ecclésiastique. L’article 11 montre très exactement à quelles œuvres elle doit s’appliquer : œuvres d’assistance patronale et de secours mutuels, assurances privées, patronages pour enfants, mais aussi corporations d’arts et métiers. Quelques articles du règlement insistent sur les mesures de précaution que doit prendre, à l’égard de l’activité de l’Œuvre des congrès, l’autorité ecclésiastique. Bref, tout est calculé pour que les démocrates chrétiens se rendent compte qu’ils ne peuvent jouer. d’aucune manière, un rôle politique, surtout un rôle politique autonome.

Des méfiances plus graves encore, et qui témoignent que le pape sent devant lui une résistance concertée, se manifestent dans un bref de Pie X au comte Albani, président du 2e groupe de l’Œuvre des congrès, en pleine possession de la confiance du Saint-Siège (19 mars 1904). Aux éléments modérés de l’Œuvre on signale l’activité inquiétante des gens enclins à courir après les nouveautés et dont les intentions sont au moins douteuses. — Puis éclate, comme un coup de tonnerre, à la veille des élections législatives, une circulaire du secrétaire d’État, en date du 28 juillet 190L D’ordre du souverain pontife, le cardinal, considérant le manque d’entente qui règne au sein de l’Œuvre des congres et tout spécialement au sein du conseil permanent, dissout l’œuvre en tant que telle, ne laissant plus subsister que le 2e groupe dont le comtelledalago-Albani sera, de fait, l’unique animateur. Les organisations locales, soit diocésaines, soit régionales passeront sous la direction immédiate de la hiérarchie ecclésiastique. Les congrès généraux sont pratiquement supprimés ; les congrès régionaux deviennent en réalité des sortes de conférences présidées par des ecclésiastiques, où l’on ne donnera pas, en général, la parole aux laïques, si respectables et si pieux qu’ils soient (voir n. 6, § 3 du règlement). Malgré les affirmations qui terminent la lettre et suivant lesquelles ces mesures ne doivent pas être interprétées comme « un retour en arrière », il était trop évident que l’action catholique populaire perdait complètement ses traits distinctifs.

Bruyamment, les démocrates chrétiens protestèrent et essayèrent de se grouper en une fédération autonome, en marge de l’Œuvre des congrès ainsi reconsti tuée. Ils annoncent la tenue à Bologne d’un congrès pour le mois de mars 1905. Dès le 1er mars, dans une lettre au cardinal Svampa, Pie X proteste vivement contre l’indiscipline, voire la rébellion des démocrates chrétiens autonomes, interdit aux catholiques de prendre part au congrès, menace des peines canoniques les ecclésiastiques qui s’y feraient inscrire. Et toute cette agitation le détermine à publier l’encyclique // ferma proposito sur l’action catholique, adressée le. Il juin 1905 aux Ordinaires d’Italie. C’est ici qu’il convient, en même temps que dans l’encyclique sur le Sillon, de chercher la doctrine sociale de Pie X. L’action sociale, dit le pape, n’est, à tout prendre, qu’un des aspects de l’action catholique ; entendons par ce dernier vocable, qui cherche dès lors à se préciser, l’action des laïques catholiques coopérant avec la hiérarchie pour promouvoir, dans la société, un renouveau religieux. Il s’agit, en somme, « de replacer Jésus-Christ dans la famille, l’école, la