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2181 PISTOIE SYNODE DE). L’ASSEMBLÉE DE FLORENCE, SESSIONS 2182

malignes, parce qu’il parlail avec insistance des vérités

obscurcies de la saine doctrine, et il lui enjoignait de se rétracter. L'évêque condamné essaya de se disculper (27 novembre 1786), affirma la pureté « le ses inten lions et déclara qu’il lui élail impossible de rétracter son Instruction pastorale tout entière, puisqu’elle contenait des vérités dogmatiques incontestables ; il demandait qu’on voulût bien lui indiquer les erreurs qir’il avait commises, et qu’il étail prêl à les rétracter dès qu’elles lui seraient connues, l’n second bref (2 février 1787) fut envoyé par le pape. Ce bref, écrit de Potter, était plus violent que le premier et rempli des plus fortes injures non plus contre l'évêque de Cbiusi seulement, mais contre tout le corps épiscopal de Toscane, contre son gouvernement, contre le prince qui en était le chef et qu’on supposait imbu d’opinions hétérodoxes. N’espérant plus se faire rendre justice parla cour de Rome, le prélat, personnellement insulté, communiqua toute l’affaire au grand-duc. > Pamilini, évêque de Chiusi, demanda que toute l’affaire fût remise à l’assemblée des évêques, « car c'était la méthode canonique pour juger la doctrine et la personne de l’un d’eux ». Une dépèche du duc à son commissaire à l’assemblée soumit à l’examen et au jugement des évêques réunis V Instruction pastorale de Pamilini, sa lettre au pape et les deux brefs de Pie VI. Ve session (2 mai). — Au début de la ve session, tenue le mercredi 2 mai, Ricci lut un long mémoire sur les droits inaliénables des évêques à la juridiction pleine et absolue dans leurs diocèses, droits que les conciles n’ont ni voulu, ni pu restreindre, mais qu’ils ont seulement expliqués par leurs canons. Il raconta l’histoire des réserves pontificales, en des termes que l’historien de l’assemblée de Florence, Tanzini, a conservés et qui méritent d'être rapportés, parce qu’ils montrent nettement les thèses jansénistes en face de Rome.

Ricci remontait jusqu’aux origines de l'Église. Les évêques sont les successeurs des apôtres ; ils jouissent de la même autorité et les rapports de l'épiscopat et de la papauté sont ceux des apôtres avec saint Pierre. Les apôtres, dans les provinces où ils se trouvaient, prêchaient l'Évangile, faisaient des constitutions, imposaient des peines, accordaient des dispenses sans demander aucun pouvoir à Pierre. Ainsi, l’autorité de Pierre ne supprimait point, ne limitait point celle des apôtres. Toutes les autorités dérivaient de Jésus-Christ et la primauté appartenait à Pierre. Ainsi le pape est le premier dépositaire de la foi, le premier gardien des canons de l'Église, et c’est en cette qualité qu’il a le droit de s’informer si les évêques remplissent exactement leurs devoirs et exercent fidèlement le ministère qui leur a été confié par Jésus-Christ. Ils ont tous les pouvoirs pour paître le troupeau qui leur est confié, pour procurer le bien spirituel de leurs fidèles, sans que personne puisse les supprimer ou les restreindre. Le pape peut corriger celui qui abuse de ses pouvoirs et peut le priver de sa juridiction ; il peut le suspendre et le dégrader, mais il ne peut dépouiller l'épiscopat, car ce serait détruire ou altérer l’essence de cet office et de ce ministère, tel qu’il a été établi par Jésus-Christ. De la même manière, pour un motif canonique, le pape peut être déposé, sans que le primat perde ses prérogatives. Aux premiers siècles, les évêques ont exercé l’autorité épiscopale dans toute sa plénitude, et les canons n’ont point été faits pour la détruire, mais pour la régler. On ne trouve, dans les premiers siècles, aucune réserve générale et perpétuelle, stipulée par les conciles en faveur du pape, ni aucune limitation du pouvoir des évêques, prescrite par les papes eux-mêmes. On communiquait au premier siège les cas les plus compliqués .et les plus intéressants ; on l’instruisait des circon stances heureuses et malheureuses dans lesquelles se trouvaient les Églises dispersées : on L’invitait a y prendre intérêt. L'Église de Rome communiquait de même ses affaires aux autres Églises, et principalement

aux plus illustres et aux plus respectables. Comme elles ne formaient en commun qu’un seul corps et une seule famille sous un même chef suprême et invisible, qui est Jésus-Christ, tout devenait commun a toules. Les communications adressées a Rome étaient naturellement les plus fréquentes, parce que l'Église de cette ville était incontestablement la plus considérable. Cela ne prouve aucunement un droit de réserve, d’ailleurs démenti par le fait même, puisqu’on remarque que les anciennes décrétâtes ne sont que de simples avis ou des conseils.

Rome elle-même ne prétendait pas avoir droit à prendre un ton législatif. Les papes étant consultés, ou éclaircissaient des doutes ou prescrivaient des règles à observer non pas en alléguanl leurs propres lois ou réserves, mais en se référant toujours à l’autorité de la tradition, à laquelle ils reconnaissaient qu’ils étaient eux-mêmes soumis. Dès qa’iN s'écartaient de ces principes, ou qu’ils cherchaient à en abuser, les autres Églises réclamaient contre cette irrégularité et elles y apportaient librement remède.

Il est incontestable que l’esprit de législation et de domination ne naquit qu’après les Fausses décrétâtes et encore ne fut-ce ni immédiatement, ni tout à la fois, car, le plus souvent, les décrets même d’Innocent III et d’Alexandre III retinrent, longtemps après cette époque, le caractère de simples consultations. La fréquence de ces consultations, l’ignorance universellement répandue partout ailleurs qu'à Rome, la justesse et la convenance des réponses et, plus que tout le reste, les circonstances politiques du temps, firent qu’on mit en pratique les conseils du pape. De là vint l’habitude de les regarder comme des lois ; les papes eux-mêmes, accoutumés désormais à ne rencontrer nulle part de résistance et croyant peut-être de bonne foi qu’ils en avaient le droit, allèrent jusqu'à prétendre que toutes les affaires de la catholicité étaient soumises à leurs décisions, qui étaient sans appel.

Mais il n’y a rien de plus ordinaire que de voir une autorité absolue et illimitée donner dans tous les excès ; aussi cela ne manqua pas d’arriver également à la puissance des papes. Les abus et la violence du despotisme romain excitèrent des murmures et la jouissance du pouvoir, chez les papes, ne fut jamais ni pacifique, ni tranquille. Les concordats d’Allemagne et de France, les pragmatiques sanctions, ce qu’on appelle les libertés de l'Église gallicane, sont autant de preuves des réclamations qui turent faites contre les attentats de la cour de Rome, et autant de remparts élevés par les évêques et les nations, pour tâcher de mettre à l’abri une partie du moins de leurs droits primitifs et inaliénables. Les conciles de Constance et de Bâle voulurent couper le mal dans sa racine ; celui de Trente tenta de rendre aux évêques quelques débris de leur autorité, pour autant que la prépondérance de Rome voulut bien le lui permettre. Toutes ces tentatives ont été inutiles et Rome, surtout par la création de ses nombreuses congrégations, s’est ouvert tant de voies pour multiplier les réserves, qu’arrivées maintenant à l’infini, elles laissent à la disposition des évêques à peine une ombre du pouvoir qui formait primitivement l’essence du caractère épiscopal.

L’est en vain qu’on voudrait, pour justifier la perte faite par l'épiscopat, alléguer la prescription ou la cession tacite ou expresse faite par les évêques d’une partie de leurs droits. Les évêques ne peuvent garder le silence sur cette exorbitante limitation de leurs pouvoirs, qui les empêche de remplir leurs devoirs