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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 13.1.djvu/242

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PIIOBABILISME. AVÈNEMENT, VASQUEZ


ment sur les intentions du texte que nous avons analysé. On y remarquera avec quel soin est circonscrite cette moindre probabilité légitime : si elle était réputée moins probable par la plupart des docteurs, reconnue par tous comme probable sans qu’aucun ou presque la tînt comme plus probable, il ne serait plus permis de la préférer. De plus, distinction omise chez Médina et qui fera son chemin dans le probabilisme, sont exceptés de la permission les médecins et les avocats, lesquels, ou dans le traitement de leurs malades ou dans l’information de leurs clients, doivent s’inspirer de la sentence que pour leur compte ils estiment plus probable ; mais l’exception n’est étendue ni aux juges, ni aux conseillers non rémunérés. L’auteur sait donc bien que dans sa thèse générale il tolère d’agir selon l’opinion des autres, indépendamment de la propre opinion du sujet. Mien plus, il va Jusqu’à déclarer expressément qu’on peut agir à rencontre de celle-ci. Reproduisons ce texte, des plus significatifs, où se touche du doigt le divorce de l’action et de la conviction intérieure qui fut notre principal grief contre Médina, où apparaît en même temps le premier gauchissement de la distinction du spéculatif et du pratique, détournée déjà dans un sens réflexe, comme dira le probabilisme :

Proinde vir doctus, cum judlcat banc opinionem esse minus probabilem, simul cognoscit lllam reputail probabl lion-m ab iiliis il’ict issiinis, |udicatque quod r<Mie Ipse <l< < pitur et rectlus Judicanl : >iii qui ÛTam censent veriorem. Krgo niliil lnordinatum faciel si, pnetermissa opii quam ipse probabillorem reputat, sequatur aliam quam alil doctissimi reputant esse magii probabilem, quamvii illi non apparent illa major probabilltas ; confonnatur enim tpse tune consensui aliorum doctorum. l-.x quo sequitur non esse UJicitum per se loquendo lacère contra propriam <>pi nioHeni, non deposita propria opinione ; quod quldem non est facere contra conscientiam, quia practlce |udica1 se posse secpii opinionem quai plaçai doctissimis vlrls, licel ipsi spéculative displiceal. Née ei necessai lum est quod pi « . priiun sensum prseferat circa opinionem moralem aliorum doctorum placitls.

Nf’esl ce poinl purement exprimé ce qui scia un trait constant du probabilisme ? Le consentement « les

auteurs est substitué a la convie I ion du sujet SOUS les

espèces de la déférence envers les doctes et de la mo destie intellectuelle, on risque d’j faire bon marche de la première vertu de l’intelligence, qui n’est poinl la modestie, niais l’attachement à la vérité, Celle la n’est une vertu que comme garante de celui ci. Elle ne l’est plus si on l’entend comme l’indifférence conçue a l’en droit de ce que l’on pense. Nous voilà désormais dans un monde bien éloigné de celle théologie médiévale que nous avons d’abord considéré)

Autre témoignage de l’intérêt pris au problème, dans M.-B. Salon, ermite de Saint uguslin. professeur à Valence, auteur de Controuersiæ de fuatitia ri jure atque de contracliluis, Valence, 1581. Voir son comnicn taire sur IIMI » 3, q. LXin, a. 2. controv. 2 : il est d’ailleurs curieux que l’auteur n’y nomme pas Médina (cf. Ternus, op. cit., p. 29). Témoignage d’une adhésion importante et, semble-t-il, tout naturellement acquise, dans Dom. Banez, successeur de Médina dans la chaire de Prime. Il rencontre le problème au cours de son commentaire sur la IIo-lI* (édité en 1584), q. x, a. 1. Venise, 1602, col. 194. Banez a établi que l’infidèle à qui l’Évangile prêché apparaît comme plus croyable que les autres religions est tenu d’y adhérer sous peine de péché, d’infidélité. Sur quoi ces réflexions :

Quod si quis respondeal licitum esse homini sequi <>pinlonem probabilem etsi si t minus probabills, ergo non tenetur homo ex duobus credibilibus credere quod est magis credihile ; dicimus ad hoc opiniones esse in duplicl ciifYcrcn-Ua. Qusedam enim versantur circa actionem aliquam exei cendam, ut an aliquis contractus si t licitus vcl lllieitus ;

quædam vero versantur circa res, an scilicet aliquid ita sit. an liax domus sit propria vel aliéna. I Ji< iruus ergo et deopinionibus prions generis verum est posse hominem sequi probabilem opinionem relicta probabiliori. Caterum de opinionibus secundi generis non est universaliter verum quod possit homo sequi opinionem minus probabilem, maxime quando potest sequi aliquod periculum contra honorem Dei aut utilitatem proximi.

Un autre trait est ici apparent : le licite et l’illicite conçus comme un ordre en soi. indépendant de la réalité, et donc soustrait au régime de la vérité.. Il est vrai qu’on ne juge pas du licite comme d’une chose : nous l’avons expliqué plus haut. Mais on ne peut se dispenser de juger du licite en relation avec l’ordre des choses, sous peinede concevoir l’activité morale sur un tpe purement juridique, Isolée de la nature et du réel. El c est bien ainsi qu’an fond tend à se la représenter le probabilisme.

2° Vasquez. Peu après Médina, Gabriel Vasquei débat avec ampleur, au même endroit « lu commentaire de la Somme, le problème de la conscience. Sa contribution est remarquable. Ce théologien est aussi le premier que nous rencontrions de la Jeune Compagnie de Jésus, dont le rôle en cette histoire sera bientôt prépondérant. A ce doubletitre, nous devons observer ses dires. Nous tenons de l’auteur lui même qu’il en » Igna i, i l p « - d’abord pendant quatre années, . « partir de 1579, au coi !, :., - « le la Compagnie à Alcala ; il reprit la plupart « hces matières pendant pus de « h un années au Colle-’romain ion il fut l « - successeur du jeune

Su. ne-L. qui avait expose eut re autre s sujet s t., I II

enfin, il y revint, dans hmême collège d’Alcala, ..près son séjour de Rome. L’impression « hl’ouvrage eut lieu en 1597, sous le titre- ci, - Comment/tria m disputa tiona m /- /Pstim. theol. s. Th..teL

l’étude ehla conscience va des disputes l.’'

LXVII, elistribuee selon les théinese « Ulsae Tes ; ii, la

conscience ei de son obligation ; de la conscience pr « > bable ; < ! « la conscience « huite-use- ; de la conscience scrupuleuse. Sur hsecond, la question « ! < Vasque la suivante- : ’.nielle opinion embrasser relativement aux actions a faire pour a « >ir un droit Jugement de conscience ? l’Instar « t<- Henri et, - Gand, il p. la réponse selon deux énonces. Intéressant le premier l’homme Instruit, hsecond l’illettré. Quant au pre mier, la rédaction de la thèseprincipaleest Importante et pour ses allusions historiques et pour la justlflca tion théorique qu’elle i

Verara l| Itui existbno sententiam quam sequitur Barth. Médina m art. e, hujui qwst., |amque m s, -i>, , iis, t multo aillecommunia tint, nempe viro docto licitum « -^s, contra tuam opinionem quam probabillorem arbltratui operari ecundum opinionem aliorum etst oplnlo aliorum sit minus tuta <-i sue. judiclo inmiiprobabilis, dum Uun< a ratkme « ’probabilitate destituta non s>t. Pis]. i . e. m. i. i.

Venise-. 1608, p. :  ! ’: <.

Confirmant notre Interprétation’i « - Medma, Vasques

admet donc unesorte de dualité clic/ lesujet moral fidèle a sa propre opinion, à laquelle il estime être attachées plus de chances îlevérité, il agira néanmoins selon une opinion d’emprunt a laquelle il ne croit pas. mais qui a pour clic de jouir auprès d’autres esprits

d’une sérieuse probabilité. Tout le soin de l’auteur, en

Ce qui suit, est de justifier cette situation. Sans doute. il en convient, un même esprit ne peut a la f « >is adhérer a une opinion et a son contraire en vertu des seuls principes intrinsèques, ceux qui établissent la pre mière vraie fondant du même coup la fausset, d< l’autre : mais, fidèle à sa propre opinion intrinsèquement justifiée, ne peut il Juger probable l’opinion contraire en vertu de l’autorité des docteurs qui la

défendent ? lai même temps que l’on tient pour intrinsèquement justifiée cette proposition, par exemple : « Oui choisit le moins eliune a l’exclusion du plus digne