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sens exact des textes du Nouveau Testament sur lesquels il pense pouvoir fonder la révélation « lu dogme du purgatoire. Il est enfin nécessaire de préciser le mus et la portée « le certains textes qui semblent exclure un état intermédiaire entre le ciel et l’enfer pour les anus séparées de leurs corps.

Ces textes, dit Suarez, loc. cit., n. 38, contiennent deux affirmations. La première est qu’après cette vie il n’y a plus possibilité de mériter ou « te satisfaire par ses œuvres propres, mais il faut subir la jusle sentence du juge, que cette sentence concerne l’enfer ou le purgatoire, peu importe. Ainsi doit être compris Eccl., ix,

10 : « Il n’y a plus ni œuvre, ni science, ni sagesse, dans le séjour des morts où tu vas. » La seconde est qu’après cette vie il n’y a que deux termes ultimes vers lesquels se dirige l’humanité responsable de ses actes : le paradis et l’enfer, ce qui ne veut pas dire qu’avant ce terme ultime du paradis, une expiation 'préparatoire ne sera pas à subir. Ainsi doivent être compris Eccl., xi. 3 ; Mattb., xxv, 34, 41 ; Marc, xvi, 16. Cf. Bellarmin, op. cit., c.xii, p. 86. Si les adversaires insistent et proposent certains textes qui semblent promettre la récompense aux justes immédiatement après la mort, sans aucune attente, par exemple Ps., cxxvi, 2, 3 ;

Il Cor., v, 1 ; Apoc, xiv, 13 ; Joa., v, 24, il faut répondre que l'Écriture, en aucun de ces textes, ne parle d’une récompense immédiate : elle sous-entend toujours la condition d’une justice parfaite au moment de la récompense, si digni sunt vel perfecte purgati. Cf. saint Augustin, In Joannem, tr. xlix, n. 10, P. L., t. xxxv, col. 1751. Suarez fait observer que ces textes n’ont pas tous besoin d’une semblable explication. Au sens littéral le ps. cxxvi ne regarde pas la récompense de la vie future ; saint Paul, dans II Cor., v, 1, invite à l’espérance d’une demeure éternelle, sans préciser le moment où on pourra l’habiter ; l’Apocalypse ne vise que les parfaitement justes et, pour les autres, qui ont encore quelque expiation à offrir, il est déjà exact de parler de repos, puisqu’ils sont certains de leur béatitude éternelle. Au canon de la messe nous prions pour les âmes du purgatoire, qui reposent dans le Christ et dorment du sommeil de la paix. Suarez, loc. cit., n. 3940. Saint Augustin avait proposé ici une autre explication : le cas visé serait celui des martyrs, De civitateDei, t. XX, c. ix, n. 2, P. L., t. xli, col* 674 ; cf. Lépicier, op. cit., p. 264. Enfin, Joa., v, 24, doit s’interpréter d’une récompense future, mais non nécessairement immédiate. Lépicier, op. cit., p. 265.

2. Au point de vue patristique, les textes objectés comportent certaines assertions relatives à l’impossibilité, dans l’autre vie, de faire pénitence et d’offrir à Dieu des satisfactions. Saint Cyprien, Contra Demetrianum, n. 25, Hartel, t. i, p. 370 ; saint Jérôme, Comment, in Amos, t. III, c. ix, 5, P. L., t. xxv, col. 1141 D ; saint Jean Chrysostome, In Epist. I ad Cor., hom. xxviii, n. 2, P. G., t. lxi, col. 234 ; saint Augustin, Enchiridion, c. lxviii (simple doute sur cette possibilité), voir ci-dessus, col. 1222. Ces textes doivent s’interpréter d’une manière générale comme les textes similaires de l'Écriture. On peut cependant trouver à chacun d’eux une explication particulière. Voir Lépicier, op. cit., p. 265-266. Bellarmin répond simplement qu’en déclarant qu’après la mort il n’y a plus de pénitence ni de satisfaction possible les Pères entendent parler de la satisfaction, de la pénitence qui précède la justification : « Les Pères, en effet, font mention expresse d’une double satisfaction : une qui précède la justification, et par laquelle Dieu est apaisé de congruo, par laquelle il est incliné à la rémission de la faute ; l’autre qui suit la justification et par laquelle réparation est faite à Dieu de condigno pour la peine encore due. » Op. cit., c. xiii, p. 89. Par là nous rejoignons les objections dogmatiques.

3. Au point de vue dogmatique, en eifet, les protestants insistent surtout sur le fait que le Christ a suffisamment satisfait pour nos péchés et que c’est faire injure à sa passion que d’exiger encore de notre part une satisfaction nouvelle, soit en ce monde, soit en l’autre. Cf. ci-dessus, col. 1267. Ils invoquent surtout Heb., x, 1 1. Bellarmin répond à l’objection dans le traité du purgatoire. Sans doute les mérites du Christ sont assez grands pour effacer toute faute du pécheur et toute peine duc à ces fautes, « mais, pour être efficaces, ces mérites doivent nous être appliqués ; cette application se fait par les sacrements et par les actes de l’homme. Dieu a voulu en effet qu’après le baptême les mérites du Christ soient appliqués par la contrition et la confession, jointes à l’absolution du prêtre, pour la rémission de la faute ; qu’ils soient appliqués par les œuvres satisfactoires de l’homme, pour la rémission de la peine temporelle. Lorsque la faute est remise, la peine éternelle qui lui était due se change en peine temporelle, la justice exigeant que le péché soit puni en quelque façon. » Op. cit., c. xiv, p. 92. Dans les développements donnés par Bellarmin à cette idée fondamentale, on retrouve les principes qui ont guidé le concile de Trente dans l'élaboration du c. xiv, de la vie session et du c. n de la xive session. Voir ici, t. viii, col. 2178 sq. ; t.xii, col. 1090. Dans le sacrement de pénitence la rémission des péchés se fait d’une manière moins libérale et moins plénière que dans le baptême : le pécheur justifié doit encore ordinairement expier quelque peine, soit en ce monde, soit en l’autre. S’il est vrai d’affirmer que l’homme ne peut plus mériter au purgatoire, il est faux que toute satisfaction doive être méritoire : « Celui qui paie une dette parce qu’un arrêt du juge l’y force satisfait à ses créanciers bien qu’il soit contraint. » Op. cit., c. xiv, p. 92. Aussi, pour marquer ce caractère contraint de l’expiation temporaire d’outre-tombe, la plupart des théologiens posttridentins emploient-ils l’expression de satispassion. Mais la plupart réfutent l’objection dogmatique des protestants dans le traité de la grâce, au chapitre de la justification, ou dans le traité de la pénitence, à la question du reatus panse.

La certitude d’une dette de peine, que laisse subsister la rémission de la coulpe, détruit par sa racine même une des principales objections des Orientaux. Voir col. 1254. L’objection proposée en premier lieu par Bessarion (voir col. 1252) a retenu l’attention de quelques théologiens modernes. Billot a bien montré qu’il n’y a aucune parité entre le bien léger des damnés et le mal léger des élus. Le mal léger des élus ne supprime pas leur mérite du ciel et n’exige qu’une expiation temporaire. Le péché mortel, au contraire, mortifie toutes les actions méritoires accomplies par le pécheur avant sa faute : les bonnes œuvres ne sont méritoires qu’en raison de l’ordination à la récompense éternelle que leur confère la volonté divine ; or, cette ordination n’existe plus dans les œuvres mortifiées, et par conséquent celles-ci ne sauraient exiger, avant la peine éternelle, une récompense temporaire. Billot, op. cit., p. 97-98. Cf. saint Thomas, In /V"™ Sent., dist. XXI, q. i, a. 1.

On trouve à peu près les mêmes objections réfutées, dans Perrone, loc. cit., col. 844-847.

II. LES PEINES SU PURGATOIRE.

Les théologiens sont bien obligés de convenir que la question des peines est beaucoup plus obscure que celle de l’existence du purgatoire.

Tous sont unanimes à reconnaître que la foi n’est ici engagée que sur deux points : le purgatoire comporte des peines (c’est la définition même du purgatoire), et ces peines ne se feront plus sentir à aucune âme après le jugement dernier. Par conséquent, la peine purificatrice ne sera, pour toute âme, que temporaire. Bel-