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QUESNEL. LE « PROBLÈME ECCLÉSIASTIQUE
20 août 1096, qui condamnait V Exposition de la foi, de Barcos. Dans ce dernier mandement, l’archevêque de Paris déclare la doctrine de l’Exposition t fausse, téméraire, scandaleuse, blasphématoire, injurieuse à Dieu et dérogeant à sa bonté, frappée d’anathème et hérétique » ; il ajoutait que les auteurs de ce livre étaient des esprits inquiets et ennemis de la paix, dont l’orgueil ne cessait de s'élever, quoique abattu. L’ordonnance de 1695, au contraire, assure que le P. Quesnel avait ramassé dans ses Réflexions morales tout ce que les Pères avaient dit de plus beau et de plus touchant sur le Nouveau Testament et en avait fait un extrait plein d’onction et de lumière, que ce livre tiendrait lieu aux prêtres d’une bibliothèque entière. Or les deux livres, dont l’un est condamné et l’autre comblé d'éloges, contiennent la même doctrine ; les principes sont les mêmes, et parfois les expressions. La doctrine de Quesnel, patronnée par Noailles, évêque de Châlons, est conforme aux cinq propositions de Jansénius, tout comme celle de Barcos condamnée par Noailles, archevêque de Paris. C’est cela que soulignait le Problème, en faisant le parallèle des Réflexions et de l’Exposition de la foi ; il n’est pas possible d’accorder l'évêque de Châlons et l’archevêque de Paris, puisque les deux ouvrages sont si semblables qu’on ne peut censurer ou approuver l’un sans censurer ou approuver l’autre. « L’ouvrage, publié sans date et sans lieu, est d’autant plus dangereux, écrit Le Cendre, qu’il est composé avec un grand sens, qu’il n’y a ni injure ni emportement et que l’auteur semble ne prendre aucun parti. » L'écrit parut en 1698. Aussitôt, un problème se posa : quel était l’auteur du Problème ? Est-ce un jésuite, mécontent de l’approbation donnée par Noailles à l’ouvrage de Quesnel ? Est-ce un janséniste, irrité de la condamnation du livre de Barcos ? On pencha d’abord pour la première hypothèse. Dès le 13 décembre 1(198, Quesnel écrivait à Du Vaucel : « Vous admirerez, sans doute, l’insolence des auteurs du Problème ecclésiastique. Ce sont assurément les jésuites. On le sait de source certaine. » Correspondance, t. ii, p..'50-31. Le 17 janvier suivant, Quesnel écrivait au même correspondant : « Je sais le nom de l’imprimeur ; je sais le nom du jésuite qui le lui a mis en main et qui est de la domination de France. C’est le P. Souastre, mais il n’en est pas l’auteur. C’est le P. Doucin. » Ibid., p. 37. Le 28 mars, Quesnel redit que c’est un jésuite de Lille, du nom de Souastre : « Il est venu à Bruxelles et l’a mis entre les mains de celui qui l’a fait imprimer. » Ibid., p. 45. Quesnel se plaint qu’on n’ait infligé au P. Souastre qu’une punition insignifiante : une translation de Lille à Maubeuge, 20 janv. 1099, p. 59 ; si c’eût été un janséniste, il pourrirait à la Bastille, 6 févr. 1700, p. 80. Le cardinal de Noailles et d’Aguesseau l’attribuent au P. Daniel. Bécemment, M. Albert Le Boy, s’appuyant sur le principe is fecit cui prodest et sur des preuves intrinsèques, n’hésite pas à accorder la paternité de l’ouvrage au P. Doucin.
Le P. Quesnel, dans un écrit intitulé Solution de divers problèmes très importants pour la paix de /' fit/lise, lire du Problème ecclésiastique proposé depuis peu contre M. l’archevêque de Paris, duc et pair de France, avec le plaidoyer de M. l’avocat général et l’arrêt du Parlement, 2' éd., augmentée, Cologne, 1099, in-12, attribue le Problème aux jésuites, malgré leurs protestations et même à un jésuite qui s’est peint lui-même ; il a nié, mais on sérail bien simple d’en croire sur sa parole le laineux avocat des équivoques et des restrictions mentales. C’esl le P. Souastre. C’est à la doctrine de saint Augustin que les jésuites en veulent et c’esl dans saint Augustin qu’ils trouvent ce qu’ils appellent « la profession de foi des jansénistes ». Le P. Daniel se défendit d'être l’auteur du Problème dans une Lettre
à l’archevêque de Paris. On ne voulut pas croire à cette dénégation. Dans la Suite de la solution de divers problèmes pour servir de réponse à la lettre du P. Daniel à Mqr l’archevêque de Paris, Cologne, 1700, in-12, on propose un moyen original de prouver qu’il n’est pas l’auteur du problème. « Une personne assure qu’elle a de quoi vous convaincre et que jusqu'à ce qu’elle l’ait fait, elle veut bien demeurer en prison, pourvu que vous vous rendiez vous-même prisonnier, pour soutenir votre innocence et répondre si vous le pouvez, à ses preuves. » Bref, les historiens favorables aux jansénistes attribuent le Problème aux jésuites : les jésuites, acharnés contre Noailles, saisissent toutes les occasions de le perdre, depuis que Noailles, récemment arrivé à Paris, a déclaré vouloir rester indépendant des Jésuites et n'être pas leur « valet ». M. Alb. Le Boy a prétendu démontrer doctement que l’auteur du Problème doit être cherché parmi les jésuites, à cause « de leur inextricable embarras devant cet obstacle historique » et, d’autre part, l'écrit a été imprimé à Bruxelles, par les soins du P. Souastre ; c’est le témoignage de Dorsanne, le secrétaire de Noailles, de Ledieu, secrétaire de Bossuet, et de Bossuet lui-même. Le P. d’Avrigny, dans ses Mémoires chronologiques et dogmatiques pour servir à l’histoire ecclésiastique depuis 1660 jusqu’en 1716, t. iv, p. 110-118, donne plusieurs versions différentes : le P. Souastre aurait l’ail imprimer le livre à Bruxelles, mais ce seraient des jansénistes qui lui auraient envoyé le livre pour lui tendre un piège et lui faire publier un libelle, sur le modèle du faux Arnauld ; la preuve qu’il donne de cette hypothèse, c’est que les moindres démarches du P. Souastre sont épiées depuis le moment où il a entre les mains le manuscrit du Problème encore secret. Le même auteur ajoute : lorsque dom Thierry de Viaixiies, en 1703, fut arrêté, on trouva, dans ses papiers, une copie manuscrite du Problème, et, d’après d’Aguesseau, il finit par avouer qu’il était l’auteur du libelle. Mais les amis de Viaixiies nient le fait de l’aveu, et Goujet, dans sa biographie de Viaixiies, ne cite pas le Problème parmi ses œuvres. Mathieu Petitdidier, janséniste ardent, fut également accusé d’avoir composé le Problème, en même temps qu’une Apologie des « Lettres provinciales » ; de même, deux bénédictins, dom Gerberon et dom Barthélémy Sénoque. D’ailleurs, dès le 23 janvier 1700, Quesnel écrivait à Du Vaucel : « On dit que Kerkré [Gerberon ] soutient que c’est un disciple de saint Augustin qui a fait le Problème. » Correspond., t. ri, p. 78. M. Vacant, dans une étude fort documentée, a montré qu’il y a dans le Problème des passages qui ne permettent pas de l’attribuer aux jésuites : beaucoup de traits sont empruntés à YHistoire abrégée du jansénisme, et l’auteur laisse entendre, en plusieurs endroits, que le jansénisme n’est qu’un fantôme, car personne n’a jamais soutenu les cinq propositions de Jansénius. Des documents, postérieurs à la période des polémiques, permettent de conclure, avec une grande vraisemblance, que l’auteur du Problème est un bénédictin, dom Ililarion Monnier, qui mourut le 17 mai 1707. C’est lui qui rédigea l'écrit, lequel fut imprimé à son insu. Renseignements inédits sur l’auteur du « Problème ecclésiastique », extrait de la Revue des sciences ecclé siastiques, mai, juill. et août 1890 (tirage à part, 1890, I' : i ris et Lyon).
Les questions dogmatiques soulevées par le Problème lui-même étaient fort embarrassantes. Les Lettres d’un théologien à un de ses amis, èi l’occasion du Problème ecclésiastique, adressé (i M. l’abbé Boileau, Anvers, 1700, in-12, ne répondent pas directement. La première, datée de septembre 1699, s’applique à montrer que le livre des Réflexions mondes n’a rien qui approche de la doctrine des cinq propositions sur