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    1. RELIGIEUX##


RELIGIEUX. DEFINITION

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et pour éviter la confusion qui pouvait en résulter, le IVe concile du Latran (1215) interdit la fondation de nouveaux ordres mendiants. Le IIe concile de Lyon (1274), voyant que ce décret avait pratiquement été méconnu, supprima tous les ordres fondés illégitimement depuis 1215 et non approuvés par le Saint-Siège ; il voua même à l’extinction la plupart de ceux qui avaient reçu cette approbation, à l’exception des quatre grands ordres susnommés.

Les ordres de femmes s’étaient développés parallèlement à ceux d’hommes ; on y suivait une règle analogue et les religieuses étaient soumises à la juridiction des prélats réguliers. Au xvie siècle, le pape saint Pic V, voulant enrayer la multiplication des instituts qui menaçait de jeter la confusion dans l’Église, ordonna, en 1566 et 1568, la suppression de toutes les congrégations de femmes érigées sans clôture et sans vœux solennels. Ces mesures étaient, au dire de Cajétan, trop radicales, cf. Suarez, op. cit., tract, vii, t. II, c. xvi, n. 4 sq. ; aussi ne furent-elles pas appliquées à la lettre : quelques instituts échappèrent. Bientôt une tolérance s’établit et les congrégations à vœux simples se multiplièrent sous la forme de tertiaires régulières à côté des grands ordres.

A partir du xviie siècle, on vit se fonder un bon nombre de congrégations absolument indépendantes des anciens ordres : frères de la Doctrine chrétienne, de saint Jean-Baptiste de la Salle, passionistes.rédemptoristes, etc. ; chez les femmes, les visitandincs, les filles de la Charité, pour ne citer que les plus illustres.

Les nouveaux besoins de l’Église avaient amené au xixe siècle une expansion considérable des instituts à vœux simples consacrés aux œuvres d’enseignement et de charité ; Léon XIII, par la Constitution Condilæ, 8 décembre 1900, régla les droits et devoirs respectifs des Ordinaires et des autorités religieuses dans les congrégations de droit diocésain ou de droit pontifical. Puis, afin de guider les fondateurs et les évêques dans l’érection de nouveaux instituts, la S. C. des Évêques et Réguliers publia un règlement ou Normæ (28 janvier 1901) concernant les nouvelles fondations. Après la promulgation du Code, qui est aujourd’hui la principale source du droit des réguliers, can. 492-672, de nouvelles Normæ ont été publiées (6 mars 1921) par les soins de la S. C. des Religieux, précisant la législation en cette matière complexe ; enfin, de nouveaux décrets, émanant de la même Congrégation viennent, à intervalles plus ou moins rapprochés, compléter et mettre à jour la discipline concernant la vie religieuse. Cf. Creusen, Religieux et religieuses d’après le droil ecclésiastique, 4e éd., p. 4, n. 3.


II. Définition et division. —

1° Définition des termes. - —

La signification des différents termes en usage pour désigner les diverses formes de la vie religieuse a fort évolué au cours des âges. Aussi constatait-on jadis des hésitations, parfois même le désaccord, chez les auteurs traitant cette matière. La jurisprudence ecclésiastique n’était d’ailleurs pas toujours logique avec elle-même et n’employait pas les mots dans un sens uniforme. Pour mettre fin à ces flottements qui souvent engendraient la confusion, le Code canonique a donné des différents termes en usage une définition officielle et précise qu’il n’est plus permis d’ignorer, et à laquelle désormais écrivains et commentateurs devront se tenir. Cf. can. 488.

1. Religion. —

Avant le Code, le mot religion (en latin religio, surtout si on y ajoutait le qualificatif formalis) était une appellation réservée aux familles religieuses à vœux solennels. Le terme institut avait au contraire une portée générale et servait à désigner n’importe quelle famille religieuse, soit à vœux simples soit à vœux solennels. Aujourd’hui, les deux tenues sont synonymes et ont tous deux une signification générique ; on les emploie indifféremment l’un pour l’autre, du moins en français. Le Code définit une religion : « une société, approuvée par l’autorité ecclésiastique légitime, dont les membres, conformément aux lois propres de cette société, émettent des vœux publics, perpétuels ou temporaires — ces derniers devant être renouvelés quand le temps est écoulé — et tendent ainsi à la perfection évangélique. » Cette définition convient également à l’institut religieux, expression plus couramment employée en français que le terme religion, encore qu’elle ne se trouve pas dans le Code.

2. Le titre d’ordre religieux est réservé aux religions dans lesquelles les membres, ou seulement quelques-uns d’entre eux, selon les règles ou constitutions, émettent des vœux solennels. Le fait que, dans un institut, certains religieux ne prononcent que des vœux simples (par exemple dans la Compagnie de Jésus), ne l’empêche pas d’être un ordre au sens strict. C’est d’ailleurs une règle imposée par Pie IX, 19 mars 1857, à tous les ordres d’hommes, et par Léon XIII, 3 mai 1902, à tous les ordres de femmes, que tous les sujets émettent, avant la profession solennelle, une profession simple et même temporaire.

Un institut dans lequel ne sont émis que des vœux simples, soit temporaires, soit perpétuels, est à proprement parler une congrégation ; on dit habituellement congrégation religieuse, pour la distinguer des congrégations romaines. On se gardera également de confondre cette expression avec la dénomination de congrégation monastique, qui sert à désigner « le groupement ou réunion d’un certain nombre de monastères indépendants sous un même supérieur ». Ces groupements affectent les monastères eux-mêmes en tant que personnes morales et non les religieux en tant qu’individus ; leur but est de conserver la régularité de l’observance et d’éviter le relâchement grâce aux visites faites par le supérieur de la congrégation, sans préjudice de l’autonomie des maisons particulières. Ainsi sont organisées les anciennes congrégations françaises d’ursulines, par exemple celle de Bordeaux, etc. De même les congrégations bénédictines du Mont-Cassin, de Solesmes, de Beuron ; ces dernières sont, de plus, unies en une fédération sous la présidence d’un abbé-primat qui réside à Rome.

3. Une religion est dite exemple lorsqu’elle est soustraite à la juridiction de l’Ordinaire du lieu. L’exemption appartient de droit commun à tous les ordres religieux d’hommes et de femmes, pourvu que, s’il s’agit de femmes, les moniales soient soumises à des supérieurs réguliers. Can. 615 et 488, 7°. Cependant les moniales de France et de Belgique, qui n’ont plus les vœux solennels, ne jouissent pas de l’exemption. Les simples congrégations religieuses ne sont pas exemptes de droit ; certaines d’entre elles bénéficient pourtant de l’exemption, en vertu d’un induit ou d’une concession spéciale : de ce nombre sont les rédemptoristes, les passionistes, etc.

4. Les instituts religieux sont de droit pontifical ou de droit diocésain. Sont de droit pontifical ceux qui ont obtenu du Saint-Siège l’approbation, ou du moins le « décret de louange ». Ceux qui, érigés par les évêques, n’ont pas obtenu ce décret sont dits de droit diocésain.

5. On appelle religion cléricale ou « institut de clercs » une religion dont la plupart des membres sont prêtres ou se destinent à la prêtrise ; sinon, la religion est dite laïque. Il faut remarquer cependant que le nombre des religieux clercs ou laïcs ne suffit pas à lui seul à déterminer le caractère d’un institut ; on tient compte pratiquement de la prépondérance donnée aux uns ou aux autres dans le gouvernement : ainsi, une religion garde le titre de « cléricale », même si les prêtres ou les clercs y sont moins nombreux que les frères laïcs, pourvu que