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- OUESNEL##
OUESNEL. LE « CAS DE CONSCIENCE »
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docteurs louchant te fait de Jansénius. — Entretien d’un docteur de la maison de Sorbonne avec un docteur ubiquiste, qui a signé la décision du cas de conscience touchant le fait de Jansénius. — Entretien d’un prélat avec le P. Alexandre, jacobin, l’un des quarante docteurs qui ont signé la décision du cas de conscience. — Attentat de quarante docteurs de Sorbonne contre l'Église dénoncé à tous les archevêques et évêques du royaume. Ces cinq écrits, attribues aux jésuites, furent publiés, en moins de trois semaines, à la fin de décembre 17(12 et au début de janvier 1703. Les évêques de Meaux et de Chartres, qui, dit l’Histoire du cas de conscience, p. 88, « partagent avec le métropolitain le gouvernement de son diocèse et sont peu soigneux de ce qui se passe dans le leur », se déclarèrent contre le cas de conscience et exercèrent leur influence sur Noailles, pour lui arracher une réprobation du cas. Un des signataires, probablement Dupin, adressa à Noailles, le 11 janvier 17(13, une apologie pour lui prouver qu’on ne peut condamner la décision des quarante docteurs sans détruire tout ce qui avait été l’ait au moment de la paix de Clément IX. Cependant, ce fut la débandade..M. Vivant, qui. le printemps liasse, mendiait des adhésions, invita les docteurs à souscrire la formule dressée par Noailles et conseillée par Bossuet, et il mit tant de zèle à cette nouvelle besogne qu’on l’appela « le maître à dessigner ». Le P. Noël Alexandre, dominicain, un des plus ardents signataires, fut l’un des premiers à désavouer sa signa ture et assura, dans une longue lettre à l’archevêque de Paris, le 8 janvier 1703, que, par sa soumission de respect et de silence, il avait entendu une soumission de son propre jugement au jugement de l'Église ; il déclara reconnaître (huis l'Église une infaillibilité de gouvernement et de discipline dans la décision des laits doctrinaux. D’autres docteurs reconnurent qu’on doit à l'Église non seulement un silence respectueux, mais encore une créance intérieure et un acquiescement d’esprit et de cœur. Vivant plaida si bien la nouvelle cause que tous les docteurs qui se trouvaient à Paris rétractèrent leurs signatures ; quelques-uns présentèrent une requête au cardinal de Noailles le 10 février 1703, et certains accusèrent le cardinal de trahison, car ils étaient convaincus que Noailles avait connu le cas de conscience et avait engagé à le signer, pourvu qu’on ne le compromit pas, et maintenant il exigeait un désaveu ! L’Histoire du cas de conscience, écrite en 1705, à un moment où Noailles combattait pour le jansénisme et où le calme était revenu, renouvelait cette accusation de trahison, comme aussi les deux grands défenseurs du jansénisme : Soanen, évêque de Senez, et Colbert de Croissy, évêque de Montpellier. Quoi qu’il en soit de ce fait, les docteurs rétractèrent peu à peu leurs signatures, il n’y en eut que deux qui refusèrent : Petitpied et Delan, et encore ce dernier se soumit-il. Petitpied, l’auteur de la décision, persévéra à la défendre, fut exilé à Beaune, puis se retira en Hollande, auprès de Quesnel (Le Roy, La France et Rome de l~oo à 17 1~>, p. 98-1 16, a raconté les divers incidents de la signature du cas de cous cience et des rétractations dans un sens tout janséniste).
Le cas de conscience avait été dénoncé à Rome et il fut condamné par un décret du 12 février 1703 ; ce décret fut adressé au roi, avec un bref du 13 février. Une lettre fut expédiée à Noailles. le 23 février : il y est dit que le cas de conscience < est tout rempli du poison de diverses doctrines dangereuses parce qu’on y soutient plusieurs erreurs déjà condamnées… ; on y professe qu’on aura toujours pour les constitutions îles papes un véritable respect intérieur, dans le temps même qu’on les viole, et on rompt tous les jours le silence, sous prétexte de le garder ». On s'étonne que des docteurs de Sorbonne l’aient approuvé. Dans sa réponse au bref que le pape lui avait adressé, Noailles constate avec joie l’effet particulier de la providence toute puissante de Dieu « qui lui a fait remettre le décret solennel de Rome le même jour que l’on publiait le mandement qu’il avait fait quelques jours auparavant ». Cette lettre est du Ci mars, et l’instruction pastorale de Noailles, portant censure du cas de conscience est du 22 février. Dans ce mandement, Noailles condamnait le cas de conscience. mais aussi « les libelles pleins d’aigreur et d’amertume qui ont été répandus dans le monde contre ceux qui ont signé le cas. On n’y voit point cette haine parfaite, qui n’exclut pas la charité, qui n’en veut qu’aux erreurs et point aux errants, qui ménage les personnes, sans épargner leur mauvaise doctrine. Aussi nous condamnons encore ces libelles comme injurieux, scandaleux, calomnieux et détruisant entièrement la charité et nous en défendons expressément la lecture… » Aussi Albert Le Roy a pu écrire ; « L’archevêque infligeait aux jésuites une nouvelle et rude volée de bois vert », et, selon lui, Bossuet aurait été l’inspirateur de cette ingénieuse diversion dont les jésuites payaient les frais.
Cependant, les jansénistes furent mécontents, comme le prouvent les Réflexions sur l’ordonnance du cardinal, publiées par l’Histoire du cas de conscience, t. i, p. 171-221. On y lit, en effet, que la vérité y est soutenue, que l’erreur y est combattue, que la mauvaise doctrine y est réfutée ; en un mot, on n’y reprend qu’un excès de zèle, fort excusable en ceux qui défendent une bonne cause… ; cette censure lit gémir tous les gens de bien, el elle ne lit que renouveler la doctrine de M. de Perélixe. si nettement réfutée dans le Traité de la foi chrétienne, par l’Apologie de PorlRoyal, I ra part., c, iii, iv, v, et par Le fantôme du jansénisme, c. xiii sq., car on n’est pas obligé de croire les faits décidés par l'Église d’une foi divine et humaine ». Cela est un dogme nouveau, opposé au sentiment de tous les théologiens catholiques, préjudiciable a l’unité de l'Église, scandaleux a l'égard des hérétiques, contraire à l’autorité du roi et au bien de l'Étal, et sujet enfin à une infinité d’inconvénients »,
I. i. p. 195-196 ; il suffit donc d’avoir une soumission de silence et de respect pour les faits déci les par l'Église, quoi qu’en dise Noailles, et il est constant que la paix de l'Église lut faite sur ce principe. Ibid., p. 107, 221, et à la tin du volume, p. 6-25 du Recueil de pièces : Considérations sur l’ordonnance. L’arrêt du Conseil d'État du roi, du."> mars 1703, est également discuté, par l’Histoire du cas de conscience, l. i, p. 1431 16 et 213-222 ; mais c’est surtout au décret de Rome du 13 février que l’historien s’attaque. Ibid.. t. i,
II. 147-150 et 222-220 : Ce bref, y lit-on, met le pape en possession d’une puissance que nous lui avons toujours disputée, en l'élevant au-dessus des conciles, en P établissant l'évêque universel de tous les diocèses de France et de toute l'Église, en dépouillant les évêques de l’autorité que Dieu leur a donnée et en les réduisant au joug de simples fidèles, ou tout au plus à la qualité de vicaires ilu pape. En effet, si le pape a le pouvoir de condamner un écrit imprimé à 300 lieues de Home, sans en être requis par personne et sans garder aucun ordre ni aucune forme canonique et d’obliger, sous peine d’excommunication, tous les chrétiens, les évêques, con.me les simples fidèles, de croire qu’il est justement condamné, il faut qu’il soif au-dessus de tous les conciles… » A la suite on trouve un Mémoire des nullités du lire/ de Clément XI, contre la décision d’un cas de conscience, faite par quarante docteurs de Sorbonne (ibid., p. 235-250) : il n’y a pas moins de dix nullités.
La plupart des évêques publièrent dans leur diocèse
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