Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 13.2.djvu/409

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

2231

    1. RELIGION##


RELIGION. METHODE ETHNOGRAPHIQUE, RÉSULTATS 2232

sans religion, en pénétrant dans leur intimité. Ces tribus ont des conceptions qui ne peuvent être qu’historiquement apparentées à celles des primitifs de l’Amérique du Xord. Elles ne vivent que de la chasse et de la pêche. Elles sont d’ailleurs pénétrées de quelques éléments de cultures postérieures à la leur.

b. — C’est en Asie et en Australie que nous transporte le 3e volume de l’Origine… Die Religionen der Urvôlker Asien und Australien. Munster. 1931, xlv1111.135 p. L’auteur y étudie : 1. les Pygmées asiatiques : Andamanais, Semang et Pygmoïdes, Sakaï de la presqu'île de Malacca, Négritos des Philippines ; 2. les Arctiques : Samoyèdes, Toungouses du Xord, Koriaques, Aïnu, Esquimaux ; 3, les primitifs australiens : Kurnai, Kulin. Yuin-Kuri et YVirachyuri-Kamilaroi. « Puluga, le Dieu des Andamanésiens est élernel, toutpuissant, sachant tout, même le secret des cœurs, législateur qui punit ou récompense, en ce monde ou en l’autre, les actes moraux de l’homme ; il est le créateur du premier homme et de toutes choses. Les indigènes croient en lui, le respectent, , lai rendent grâce. » Mais ils ne lui donnent pas le nom de Père. Op. cit., p. 144 sq.

Le P. Schebesta a vécu deux ans parmi les Sakaï et les Semang de la péninsule de Malacca et rendu compte de ses observations en 1926 et 1927. Un indigène lui disait au sujet de Ta-Pedu, le Grand Père Dieu : « Tu vois cette montagne là-haut. Elle est bien loin d’ici, les autres montagnes aussi. Pedu est entouré de toutes les cimes, toutes sont proches de lui, comme les cabanes de notre village, Ta-Pedu les traverse de part en part et voit tout. » P. 161. Ces tribus connaissent la prière, le sacrifice du sang et celui des prémices. P. 160 et 219. « Ta-Pedu est bon, disent parfois les Djihai. il s’occupe de nous, c’est lui qui nous donne notre nourriture. » P. 251. Si, dans une partie de la péninsule, il y a deux dieux, c’est que les Sakaï ont pénétré comme un coin dans le territoire Semang et les deux peuples ont associé leurs dieux. Si en certains endroits il y a une femme de l’Etre suprême c’est qu’une civilisation matriarcale a contaminé un milieu plus primitif.

En 1923, S. S. Pie XI envoya le P. Vanoverbergh chez les Négritos des Philippines dont les idées religieuses étaient encore inconnues. Le P. Vanoverbergh avait été quinze ans missionnaire à Lucon, il connaissait bien les langues du pays et a pu entrer dans l’intimité de ces primitifs. Ceux-ci s’adressent ainsi à Bayagan : « O notre Père, dont le vrai nom est inconnu de qui te prie, au-dessus de qui il n’y a rien, à qui on parle seul… aie pitié de moi, arrête la pluie, car nous sommes bien pauvres et n’avons pas d’abri. » P. 312 sq. Ils prient sans cesse « mais du fond de leur cœur, sans formules, avec les mots de leur choix ». Ibid.

Les Aïnos de Yéso (grande île Xord du Japon), de Sakhaline, des Riu-Kiu appellent Dieu Tantu le Soutien, le Tuteur ou mieux encore Schinda, le Berceau, parce que, ont-ils dit à Batchelor : « Comme un enfant dans le sein d’un berceau est nourri, se repose à l’abri du danger, ainsi les hommes sont élevés et nourris dans le sein de Dieu : il est leur créateur, leur soutien, celui qui maintient l’univers, qui conserve et nourrit toute l’humanité. » 1°. 4 12 sq. Dieu est aussi Turau, l’inspirateur de la prière. Quand les Aïnos n’ont plus de cerfs pour se nourrir ils le prient ainsi : « O Dieu, qui habites au plus haut des cieuxl () ToutPuissant ! O Dieu notre aïeul I Nous sommes dans la famine. Nous t’en prions, envoie-nous quelques cerfs. Il n’y en a plus un seul dans le pays des Aïnos, et les hommes vont mourir, tous les habitants du pays ont beaucoup prié, et tu n’as pus répondu. () I)ieu, entendsnous et envoie nous du gibier, < I'. 158, Les Aïnos sont des " arctiques ». Leurs congénères ont les mêmes croyances. Les Samoyèdes dont la religion est origi nale puisqu’ils n’avaient jamais vu de missionnaire avant la venue des explorateurs, croient à Num qui habite l’air, d’où il envoie le tonnerre et la pluie. Num voit tout ce qui se passe sur la terre, il est le rémunérateur du bien et du mal. Il est bon, puissant, créateur. On ne peut pas le représenter car il n’a pas de forme. Mais les Samoyèdes en parlent comme du ciel lointain et admettent des esprits auxquels Num a confié les diverses régions de son domaine.

Chez les Australiens vraiment primitifs — les fameux Aranda appartiennent à la sixième et dernière culture du pays — la foi à l'Être suprême est très nette. Dès son premier ouvrage sur l’Origine de l’idée de Dieu, paru en 1910, le P. Schmidt avait longuement utilisé les observations faites par Howitt chez les Kuniaï (État de Victoria, à la pointe sud-est du continent, jusqu'à la mer). Ce n’est qu’après un séjour de vingt ans parmi ces indigènes que ce voyageur put assister à une cérémonie d’initiation de jeunes gens et qu’on nomma devant lui Mungan Xgana. Au cours de cette cérémonie on révèle.aux initiés, comme un secret a garder jalousement, l’histoire suivante : « Autrefois il y avait un Grand Être, appelé Mungan Ngana, qui vivait sur la Terre et enseignait aux Kurnaï d’alors à faire leurs outils, fdets, armes, bateaux, bref, à pratiquer tous les métiers. Mungan Xgana eut un fils appelé Tundun, qui se maria, et qui fut le père de l’ancêtre des Kurnaï. » Ce Mungan, « Notre Père », est le gardien, le juge, le vengeur de l’ordre social, et tout dépend de lui. S’il a un fils on ne lui connaît pas de femme.

c. — Le quatrième volume de l’Origine de l’idée de Dieu traite des religions des peuples primitifs de l’Afrique : Die Religionen der Urvôlker Afrikas, 1933, xxx11821 p. Ici le P. Schmidt utilise, en plus de ses précédents travaux sur les Pygmées, les enquêtes plus récentes du P. Trilles sur les Pygmées du Gabon, du P. Schumacher sur les Pygmoïdes Butwa, du D r Lebzelter sur les Boshimans et du P. Schebesta sur les Pygmées Ituri et les Pygmoïdes Bacwa. Il étudie : 1. l’ensemble des Pygmées et Pygmoïdes de l’Afrique centrale ; 2. des peuples plus évolués : les Boshimans, les Hottentots et les énigmatiques Bergdama ; 3. les rapports des religions des Pygmées africains avec celles des Pygmées asiatiques.

L’année même où le P. Schmidt publiait le t. iv de son Ursprung, le P. Schebesta éditait à Leipzig Die Dambuli, die Zwerge vom Congo (Les Bambuti, les nains du Congo), un vol. de 270 p. avec 89 photographies. Le P. Schmidt avait d’ailleurs pu utiliser les notes du P. Schebesta. Le P. Schebesta est un témoin particulièrement autorisé : élève du P. Schmidt.il a reçu une sérieuse formation scientifique en ethnologie, il a derrière lui l’expérience d’une première exploration dans la péninsule de Malacca, il a séjourné parmi les Bambuti de janvier 1929 à septembre 1930, partageant leur misère et gagnant leur confiance. De plus il s’agit là d’une population peu susceptible d’avoir subi des influences extérieures, car leurs huttes sont « cachées au plus profond de la forêt de ITturi » [c’est l’impénétrable forêt équatoriale dont les nôtres ne peuvent pas nous donner une idée, elle est située au nord-ouest des grands lacs d’Afrique, entre le Congo et son affluent nord le Vêlé, il y a d’autres Bambuti dans les hautes vallées du Kassaï et d’autres affluents sud du Congo, voir la carte, p. 598 du 4e vol. de V Ursprung, 1935]. Déplus « les Pygmées n'évitent pas seulement les lieux où habile le blanc, mais le sentier même où il circule. S’il en surprend un groupe, il peut être sûr que, rapides comme l'éclair, ils vont s’enfoncer dans la brousse ». P. 12. Leur culture est la culture primitive de la cueillette, parmi eux les Bahango ne savent pas allumer le feu, celui-ci éteint, ils vont le demander aux Nègres. 1'. 73 sq. Ceux-ci les croient athées et souriaient de la