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R É S U R R E ( : T I N. L’É V A N G I L E

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Cette double tendance, universalisme, restriction aux seuls justes, trouve une explication plausible, que confirme la littérature rabbinique plus récente, dans l’universalisme de la résurrection en ce qui concerne les fils d’Israël, tous étant considérés comme appartenant au peuple saint et juste. Les gentils sont envoyés à la géhenne, soit pour un temps après lequel ils sont réduits à néant, soit « pour les générations des générations ». Cf. Bonsirven, op. cit., p. 479-480 :

Nous discernons dans la littérature rabbinique, écrit Bonsirven, une tendance qui ne nous surprendra pas : assurer à tous les Israélites le bénéfice de la résurrection ; tendance qui se manifeste de plusieurs manières. D’abord par la discussion sur l’âge que doivent avoir les enfants israélites pour pouvoir revivre : nous assistons à une surenchère caractéristique : R. Meïr admet à ressusciter ceux qui répondent amen à la synagogue (Is., xxvi, 2) ; R. Siméon ben Rabbi, ceux qui commencent à parler (Ps., xxii, 31) ; les rabbins de Babylone, tous les circoncis (Ps., lxxxviii, 1(>) ; les rabbins palestiniens et R. Hiia ben Abba, tous les enfants déjà nés (Ps., xlix, 6) ; et enfin R. Éléazar, même les avortons (Is., xlix, 6). Op. cit., p. 480.

Être enseveli en terre d’Israël est un gage de résurrection parmi les justes. Les autresterres sont impures ; y être enseveli, c’est mourir deux fois, ce qui prive de la résurrection. Aussi les Juifs mourant hors de Palestine y faisaient-ils transporter leurs corps, ou tout au moins le faisaient-ils ensevelir au bord de la mer, afin qu’au jour de la résurrection, Dieu creusât des souterrains, par lesquels les corps des justes, inhumés hors de Palestine, rouleraient comme des outres jusqu’en Israël, où Dieu leur rendrait leur àme et leur vie. Voir les textes dans Bonsirven, p. 481. Toutefois la moralité ne perd pas absolument ses droits ; si la résurrection est, en principe, le privilège des fils d’Israël, elle est cependant refusée à certains pécheurs d’Israël. Mais ces restrictions ne font guère que confirmer le principe : tous les Israélites retourneront à la vie.

Il semble bien d’ailleurs que cette résurrection, universelle pour Israël, ne soit qu’un acte du règne messianique futur. Elle apparaît bien comme l’acte initial de ce règne, permettant à tous les Juifs, morts avant la venue du Messie, de participer aux félicités de la restauration nationale. Si cette note messianique n’est explicite que dans quelques apocryphes, notamment dans lien., li, 1 ; lxi, 5 ; Test. Juda, xxv, 1 ; Zabulon, x, 2, 3 ; Benjamin, x, 6, 7 ; et s’affirme quelque peu dans IV Esd., vii, 32, elle est sous-jacente implicitement dans les autres textes où s’affirme une note universaliste. Quoi qu’il en soit, il ne semble pas qu’on puisse admettre, dans la littérature juive, l’idée d’une double résurrection, la première introduisant les seuls justes aux félicités messianiques, la seconde faisant comparaître tous les hommes jusqu’au jugement dernier. Cf. Castelli, // Messia secondo gli ebrei, Florence, 1874, p. 283 ; H. Strack et P. Billerbeck, Kommentar zum Neuen Testament aus Talmud und Misdrasch, Munich, 1922-1928, t. iii, p. 827.

Mode de la résurrection.


Pour les Juifs, contemporains des premiers chrétiens, les modalités de la résurrection posaient de multiples problèmes.

Problème de l’auteur. Cet auteur est Dieu, vivificateur des morts, comme l’appellent les prières les plus anciennes de la recension palestinienne et de la recension babylonienne. Semonc esre, 2 ; cf. Talmud, Sanh., 113 a. Dieu seul, en clïet, détient la clef des sépulcres et ne la livre à personne. Id., Ta’anil, 2 a : Midras Tanhuma, recension éditée par Buber, Wilna, 1913, Wayésé, 10, i, p. 155 ; Midras sur les psaumes, ps., lxxviii, 5, édit. de Buber, Wilna, 1891, p. 346 ; MidraëRabba, Gen., 73, 3, édit. citée, p. 848 : l >eut., 7, 6. A Dieu sont attribuées toutes les actions qui concourent à la résurrection : Dieu vivifie, IV Esd., v, 45 ; il formera de nouveau, Stjbil., iv, 181 ; il commande,

Bar. (édit. syr), xxi, 23 ; l ; cf. Ps. Sal., iii, 16 ; Talmud, Berakhoth, 00 b ; Sanhédrin, 108 a ; Pesiqla Rabbathi, édit. Friedmann, Vienne, 1880, 3 b ; Midras Rabba, Gen., 26, p. 250. « Je te ressusciterai », dit Dieu dans l’Apoc. Mos.. xli, 3.

Problème des intermédiaires. Élie a détenu un moment la clef des sépulcres. Sanh., 113 a ; Midras sur les psaumes, ps., lxxviii, 5. Aussi aura-t-il encore quelque part dans la îésurrection dernière : Talmud, Sota, ix, 15. Quant au Messie, aucun texte authentique ne lui accorde d’intervention dans la résurrection des morts. Les textes suspects sont : MidraS sur Prov., viii, 9 et xix, 21 (édit. Buber, Wilna, 1893), et Pirqè de Rabbi Éliézer, édit. de Varsovie, 1879, 32.

Problème des modalités. La résurrection se fera, non en secret, mais ouvertement. MidraS Rabba, sur Eccl., vu, 1. Elle se fera au son de la trompette. Id., Levit., 24, 4 ; Targum de Jonathan, Ex., xx, 15. Cette trompette, dont il est question dans Matth., xxiv, 31 ; I Cor., xv, 32, 52 ; I Thess., iv, 16, tient une place considérable dans la littérature postérieure. Cf. F. Weber, Jùdische Théologie auf Grund des Talmud und verwandler Schrijlen, Leipzig, 1897, 2e édit., p. 369.

Problème de la réunion de l’âme et du corps. D’une part, les tombeaux et la terre rendront les restes humains ; d’autre part, les réceptacles des âmes restitueront leur dépôt. Doctrine commune tant aux apocryphes qu’aux écrits rabbiniques. H en., li, 1 ; Bar. (édit. citée), l, 2 ; xlii, 7 ; xxx, 2 ; xxi, 23 ; IV Esd., vu, 32 ; Test. (Levi), iv, 1 ; Talmud, Sanh., 92 a ; Targums de Jérusalem, i et ii, sur Ex., xv, 12 ; Berakhoth, 15b ; Midras Rabba, Eccl., v, 10 ; Pesiqla Rabbalhi, édit. cit., 109 b ; Midras R., Gen. (édit. cit., 12, 9, p. 109, etc. ». D’autre part, Dieu rend l’âme au corps ou restitue l’esprit retourné vers lui après la mort. Talmud. Berakhoth, 60 b ; Sanh., 108 a ; Pesiq. R., 3 b ; Midras R., Gen., 26, p. 250 ; cꝟ. 14, 7, p. 131 ; Sanh., x, 3. 29 bc. Dans ce dernier texte « rendre l’esprit signifie produire la résurrection. Nous laissons de côté certaines imaginations bizarres selon lesquelles Dieu ressusciterait les morts au moyen d’une rosée spéciale ou en faisant germer l’homme d’un os de la colonne vertébrale. Voir Bonsirven, p. 484.

Problème des ressemblances du corps ressuscité avec le corps actuel. — Le pseudo-Baruch professe une ressemblance complète : « La terre restituera les morts qu’elle a maintenant reçus pour les garder, ne changeant rien à leur figure ; comme elle les a reçus, elle les rendra… » Toutefois, après le jugement, « sera changée la ressemblance de ceux qui ont péché et aussi la gloire de ceux qui sont justifiés. Les premiers en pire ; les second en mieux : « les uns seront changés en la splendeur des anges, les autres en visions effrayantes et en formes apparentes. » Bar. (édit. syr), xlix-li, 5. Doctrine similaire chez les rabbins, avec cependant des raffinements de subtilités. Les morts ressusciteront tels qu’ils étaient au moment de leur sépulture, afin de pouvoir être reconnus ; ils ressusciteront avec leurs vêtements ; c’est folie de demander s’ils seront purs ou si l’on devra se purifier après les avoir touchés. Voir Midras R., Gen., 95, 1, édit. citée, p. 1185 sq., Talmud, Semaholh, îx, fin : Sanh., 90 b ; Midras R., Eccl., v, 10 ; Talmud, Nidda, 70 b. Cf. W. Bâcher, Die Agada der Tannaiten, i, Strasbourg, 1890, p. 179 sq.

III. LE NOUVEAU TESTAMENT.

1° L’enseignement du Christ. —

1. Dans les synoptiques. —

Les sadducéens niaient la résurrection future des corps ; ils vinrent même trouver Jésus pour lui poser à ce sujet une question embarrassante : si une femme se marie successivement à sept frères, de qui sera-t-elle femme au jour de la résurrection ? Matth., xxii, 23-28 : cf. Marc, xii, 18-23 ; Luc., xx, 27-33. Sur la négation sadducéenne, voir aussi Act., xxiii, 8 ; Josèphe, De