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    1. RÉVÉLATION##


RÉVÉLATION. NOTION GÉNÉRALE

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l’homme ; aussi faut-il que ce dernier qui accepte la vérité perçoive que c’est Dieu qui parle.

La révélation, qui est la transmission d’une connaissance, tend naturellement à être un enseignement et un témoignage. Elle est, en effet, un acte qui aide et enrichit l’intelligence et lui permet de perfectionner ses acquisitions antérieures. C’est ce qui ressort de maints passages scriptur aires, Le prophète l’affirme, qui écrit : Dominus dédit milii linguam eruditam, ut sciam sustentare eum, qui lassus est verbo ; erigit mane, mane eriqit milii aurem, ut uudiam quasi nmgistrum. Is., l, 4.

Le Christ, de son côté, est appelé Maître et accepte que ce titre lui soit donné par ses contemporains : < Jésus ayant achevé ce discours, le peuple était dans l’admiration de sa doctrine. Car il les enseignait comme ayant autorité, et non comme leurs scribes et comme les pharisiens. » Matth., vii, 28 ; Marc, i, 22 ; Luc, iv, 32.

La révélation est aussi un témoignage en ce sens que toute personne qui parle est un témoin de ce qu’elle énonce. Une vérité est acceptée à cause des raisons intrinsèques qui militent pour elle, ou parce que l’on reconnaît l’autorité de celui qui la présente. Celui qui enseigne les sciences mathématiques, par exemple, expose les arguments par lesquels il s’elforce de montrer l’évidence interne des vérités proposées. La démonstration doit valoir par elle-même et déterminer la science chez les disciples. Mais, quand il s’agit d’un fait d’ordre historique ou moral, dont l’auditeur ne fut pas témoin oculaire, il n’en est plus de même. Pour en admettre l’existence avec certitude, l’autorité de celui qui parle entre en jeu. Autrement dit, pour donner son assentiment au récit, l’auditeur tiendra compte de la science et de la véracité du témoin. L’autorité est parfaite, si celui qui parle est à même d’exiger, en vertu de son droit propre, qu’il soit entendu et cru vrai dans ses affirmations. C’est le cas de Dieu dans la révélation, puisqu’il est non seulement Maître et Seigneur de toutes choses, mais aussi la Vérité absolue ; son témoignage dépasse la certitude que fournit la connaissance humaine, et entraîne l’adhésion ferme aux vérités révélées, que celles-ci soient accessibles à la raison ou non. L’assentiment du sujet est motivé non par l’évidence interne de la vérité proposée, qu’il peut ne pas percevoir, mais par l’autorité souveraine de Dieu : c’est un acte de foi dont la certitude est entière, car, ainsi que l’affirme saint Thomas : De his ergo, quæ expresse per spiritum prophétise prophetu cognoscit, maximum cerlitudinem habet, et pro certo habet quod hœc sunt diuinilus sibi revelata… Alioquin si de hoc ipse cerlitudinem non haberet ftdes quæ dictis prophctarum innititur, certa non esset. Sum. theol., l & -™, q. clxxi, a. 5.

Sur ces derniers points l’accord ne s’est pas encore fait entre les théologiens. Les uns, insistent davantage sur le magistère. C’est l’avis entre autres de H. Garrigou-Lagrange, qui écrit : Revelutio divina est jormaliter locutio Dei ad hominem, per modum magisterii. R. Garrigou-Lagrange, De revelatione, t. i, p. 152. Les autres mettent au premier rang l’attestation divine. C’est l’opinion de G. Wilmers qui veut surtout montrer que la locution divine n’est pas un magistère proprement dit, qui vise à la science, mais un témoignage divin en faveur de la vérité proposée. Il définit, en effet, la révélation locutioncm non docentem sed attestantem. G. Wilmers, De religione revelata, p. 48. Tel semble aussi être l’avis de C. Pesch, qui définit la révélation en ces termes dans ses I’nvlectiones : Qusevis autem reuelatio dejiniri potest : veritutis per diuinam teslificationcm manifestatio, t. i, Ge -7e édit., 1924, n. 151, bien que dans son Compendium il insiste surtout sur le côté de l’enseignement : Reuelatio divina stricte dicta est locutio Dei, qua Deus ex iis quæ cognoscit, quædam cum hominibus communicat, ut homines eu propter auctoritatem Dei loquentis credant. Compendium, t. i, 2e édit., 1921, n. 54. Voir aussi L. Lercher, Instit. theol. dogmat., t. i, n. 39.

Le désaccord cependant semble plus apparent que réel, car malgré les diversités d’expression et les préférences personnelles, tous les auteurs considèrent en dernière analyse la révélation comme la parole de Dieu, qui enseigne et qui atteste. Dieu enrichit la conscience de celui à qui il s’adresse de connaissances nouvelles, en même temps il donne à cette acquisition un caractère absolu de certitude.

Cet acte de foi, par lequel le prophète perçoit l’origine divine des vérités qui lui mit été dévoilées et grâce à quoi il donne son adhésion entière, ne peut être émis que sous l’influence d’une lumière intérieure spéciale. Avant de dire ce qu’elle est, il paraît utile de parler des modes de la révélation.

4. Les modes de la révélation. —

Comment Dieu communique-t-il son esprit aux hommes ? De quatre manières différentes, répond saint Thomas : par les sens extérieurs, par l’imagination, par un influx direct sur l’intelligence ou par une lumière spéciale (intelligible). Sum. theol., IIMI 35, q. ci.xxiii, a. 2. A l’article suivant (a. 3) le Docteur angélique résume ainsi ces données : Prophelica reuelatio fit secundum quatuor : sciliect secundum in/luxum intelligibilis luminis, secundum immissionem intelligibilium specierum, secundum impressiunem vel ordination, *m imagibiliatn formarum, et secundum expressionem formarum sensibilium ; voir aussi Sum. œnt. gent., I. III, c. ci.iv. et les discussions soulevées par ce texte dans Pesch, Compend., t. i, n. ôii sq. ; et Garrigou-Lagrange, De revelatione, t. i, p. 165 sq.

a) Parfois eu effet, des Formes sensibles sont produites extérieurement par Dieu, et se présentent au prophète. L’inscription, que vit Baltasar pendant le festin qu’il donnait, entre dans cette catégorie. Elle était tracée par des doigts de main humaine « qui écrivaient en face du candélabre sur la chaux île la muraille du palais royal ». Dan., v, .">-(>. Le prophète Daniel seul fut a même d’en donner l’interprétation. Ibid., 17-2N.

Pour agir sur les sens. Dieu a recours à des moyens divers. Voir A. Poulain. Des grâces d’oraison, 9° éd., 1914, p. 327 sq. Saint Thomas discute de cette question dans la Somme, III a, q. lxxyi, a. 8. Mais, pour éviter de donner dans l’illusion et l’hallucination, il faut que soient fournies des preuves en faveur de l’action divine qui s’est manifestée sur les sens.

b) La révélation se fait aussi par l’imagination. Dieu utilise parfois les formes Imaginatives, visuelles, auditives ou autres, qui dérivent de ce qui tombe sous les sens, mais en leur donnant une orientation inattendue. D’autres fois il imprime des formes entièrement nouvelles sans que les sens n’interviennent : ce cas existerait si à un aveugle de naissance on imprimait dans l’imagination les ressemblances des couleurs. L’Écriture sainte fournit un certain nombre d’exemples du premier mode. Jéréinie volt « une chaudière, qui bout, et elle vient du côté du septentrion..1er., i. l.’i, c’est-à-dire que l’invasion chaldéenne doit verser ses fléaux du côté de la Judée. Le prophète Anios perçoit trois tableaux par lesquels sont annoncés les châtiments qui vont touiller sur Israël : l’invasion dis sauterelles, la destruction par le feu et la ruine par la guerre. Le Jugement d’Israël est proche ainsi que l’annonce la vision de la corbeille remplie de fruits mûrs. Amos, vu, vin. Ézéçhiel a également des visions : les plus marquantes sont celles du char et des chérubins, Ez., i, et celle des ossements desséchés qui reprennent vie et signifient la résurrection du peuple choisi. Ez., xxxvii,