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personnages au milieu desquels une représentation de femme occupe une place prépondérante et dont les gestes, les attitudes et le :, attributs suggèrent l’identification avec l’Astarté syrienne. Ne serait-ce pas dés lors ce sanctuaire d’Astarté qui aurait reçu les trophées de la victoire sur Saiil, « vieux sanctuaire cananéen, maintenu en vénération par les pharaons des XIXe et XXe dynasties, ou temple érigé par l’un ou l’autre de ces pharaons à la déesse principale du lieu, ce temple d’Astarté demeura en exercice après l’effondrement de la suzeraineté égyptienne aux jours de Ramsès III. Les nouveaux maîtres de Beisân, ces Philistins dont les premières fouilles avaient déjà livré la trace, se substituèrent aux Égyptiens dans le culte à la divine maîtresse de céans. » Vincent, ibid., 1926, p. 120. Cf. Barrois, art. Beisan, dans Supplément au Dictionn. de la Bible, t. i, col. 950-950.
Un autre fait, plus important encore que celui de la prépondérance philistine, est la fondation d’un royaume hébreu par David. Ce qui rendit la chose possible, ce fut sans doute la défaite de l’ennemi héréditaire, le Philistin, ainsi que celle des autres peuplades voisines, mais ce fut surtout le fait que la puissance assyrienne, qui avec Téglatphalasar I er avait porté sa domination jusqu’en Syrie, traversait alors une période de décadence et n'était plus capable d’intervenir dans les affaires de la Syrie, parce qu’elle-même était rejetée au-delà del’Euphrate. Il en allait de même de l’Egypte. Les successeurs de Ramsès non plus que les rois de la XXIe dynastie n’avaient d’autorité sur les chefs syriens. Si jamais les circonstances furent propices à l'établissement d’un royaume groupant sous son autorité des peuples affranchis des puissants voisins du Sud et de l’Est, ce fut bien celui de l’avènement de David auquel ne manqua ni le secours divin, ni le concours de circonstances favorables.
Les lettres d’El-Amarna enfin, si précieuses pour la période précédente, nous prouvent combien les relations épistolaires étaient fréquentes entre les rois et les grands de la cour et, de ce fait, confirment l’exactitude d’un simple épisode rapporté aux Livres de Samuel : l’envoi d’un message de David à Joab par Urie. II Reg., xi, 14. La relation elle-même du voyage de l'Égyptien Wénamon vers 1100 pour acheter du bois en Phénicie est intéressante à rapprocher de ce qui est dit aux Livres de Samuel sur les relations commerciales entre David et Hiram, roi de Tyr. Cf. Desnoyers, op. cit., t. ii, p. 20-27.
V. Doctrines.
De la plus haute importance pour l’histoire d’Israël, les Livres de Samuel ne le sont pas moins pour sa religion, dont ils nous font connaître les croyances, au sujet surtout de la divinité, les pratiques cultuelles et aussi les espérances. Importantes en ellesmêmes par la connaissance qu’elles nous donnent de la religion d’Israël à une époque aussi ancienne, les données des Livres de Samuel le sont encore par la lumière qu’elles projettent sur l’ensemble de l’histoire de cette religion et particulièrement sur le jahvéisme ou la religion de Moïse, en confirmant la vérité de ses origines, tout en montrant la lente et progressive réalisation de l’idéal religieux mosaïque, aussi bien dans l’ordre des croyances que dans celui des institutions et du culte.
La religion d’Israël n’avait pas été sans subir quelque fléchissement durant la période des Juges, dans les croyances du moins et le culte du peuple, sous l’influence des religions cananéennes. Si de nouvelles révélations n’avaient point enrichi sa foi — - " la parole de Jahvé était rare en ce temps-là. I Reg., iii, 1 — elle avait toutefois traversé repleuve sans perdre les traits essentiels que lui avail donnes le législateur du Sinaï et
que s’efforçaient de maintenir les véritables fidèles du jahvéisme. La période qui marque un renouveau dans
la vie nationale par l’institution de la royauté verra également un renouveau dans la vie religieuse, suscité par des personnalités telles que Samuel et que David surtout, dont le nom domine non seulementlespremiers temps de la monarchie mais encore toute son histoire, politique et religieuse. Pour dégager les aspects essentiels de cette vie religieuse, nous rechercherons d’abord quelles idées on se faisait de la divinité, du messianisme et du prophétisme, et ensuite quelle était l’organisation du culte.
1° Dieu.
Le Dieu d’Israël c’est Jahvé. Par l’alliance conclue jadis au Sinaï, par l’octroi de la Terre
promise à son peuple choisi, il est le maître du pays et de ses habitants. Selon l’antique croyance, aussi bien des I Iébreux que des peuples païens, c’est dans ce pays qui lui appartient en propre et là seulement que le sacrifice, acte essentiel de son cullc, peut lui être olïert ; « Va-t-en vers des dieux étrangers », disent à David les hommes qui l’ont chassé du pays, afin qu’il ne puisse plus faire partie de l’héritage d’Israël. « Forcer quelqu’un à quitter le territoire de Jahvé, c’est le contraindre à servir d’autres dieux. De même, faire habiter le territoire de Jahvé par des étrangers, c’est les mettre dans la nécessité de rendre un culte à Jahvé (cf. IV Reg., xvii, 25). » I Reg., xxvi, 19. Dhorme, Les Livres de Samuel, p. 233. Exilés ou déportés, les Israélites se refusaient à offrir des sacrifices à leur Dieu, ne croyant même pas pouvoir chanter un cantique de Jahvé sur la terre étrangère. Ps. cxxxvi, 2-4.
Est-ce à dire que Jahvé était pour ses fidèles et pour David en particulier un dieu purement national et territorial ? Non certes, car ce n'était pas sa divinité qui était bornée par les frontières d’Israël, c'était simplement son culte. Réfugié chez les Philistins, David n’en continue pas moins à servir Jahvé qui, même en terre étrangère, reste son Dieu, aussi puissant qu’en son propre domaine. N’est-il pas, en elîet, le maître de la nature, déchaînant l’orage pour confondre les ennemis de son peuple, aussi bien que pour châtier l’infidélité de ses sujets ? I Reg., xii, 17-18 ; II Reg., xxii, 8-10. La désinvolture de David à l'égard de la statue de Milcom, le dieu des Ammonites (II Reg., xii, 30, d’après la traduction préférable du grec), montre assez qu il ne tenait pas Milcom pour un dieu véritable. Il ne faut pas en effet se méprendre sur la portée des termes employés pour désigner les divinités étrangères ; lorsque les Hébreux et ceux-là mêmes qui étaient fidèles adorateurs de Jahvé appelaient dieux Baal, Astarté, Milk et autres divinités païennes, ils « suivaient simplement une manière de parler identique à la nôtre, et ne songeaient pas plus que nous, en les gratifiant d’un nom qu’elles ne méritaient pas, à faire d’elles des êtres réels, ni à les doter fût-ce d’une simple parcelle, de la divinité, cette divinité incommunicable, que Jahvé seul possédait toute. « Desnoyers, op. cit., t. m p. 255.
Ce qui prouve bien encore que la puissance de Jahvé S'étendait au-delà des limites de son territoire, c’est qu’il est, selon l’expression fréquemment employée dans les Livres de Samuel qusqu'à onze fois), Jahvé des armées. Cette expression certes est employée à propos de puissance militaire, I Heg., xv, 2 ; xvii, 45 ; II Reg.v, 10, et même I Reg., xvii, 15 ; le sens en est clairement indiqué dans cette parole de David à Goliath : « … je viens contre lui au nom de Jahvé des armées, le Dieu des troupes d’Israël » ; l’arche, transportée au milieu des combats par les armées d’Israël, est l’arche de l’alliance de Jahvé des armées, dont dépend la victoire ; mais la même expression se rencontre encore dans un certain nombre de cas où il n’y a plus aucun rapport entre Jahvé et les troupes d’Israël et alors ne faut-il pas l’entendre au sens que lui donnent les prophètes. pour qui elle évoque surtout l’idée des armées célestes,