Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 13.2.djvu/768

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
2949
2950
ROSMINI. INFLUENCE


1° les vestiges des divines perfections qui resplendissent dans les créatures sont nécessaires aux bienheureux : 2° ces mêmes vestiges rassemblés dans l’exemplaire divin sont la partie même de cet exemplaire accessible aux bienheureux ; 3° ces vestiges sont le sujet des louanges que les bienheureux rendent à Dieu. La première assertion revient à nier le caractère même de la gloire essentielle des élus. Voir ici Gloire, t. vi, col. 1393. La seconde assertion nie l’existence même de la gloire essentielle, telle que la conçoit l’Église. La troisième assertion, prise en son sens affirmatif, est pleinement catholique ; mais, pour autant qu’elle exclurait le sujet de louanges éternelles que les perfections divines présentent elles-mêmes aux élus, qui trouvent dans leur connaissance immédiate la source de leur béatitude essentielle, elle serait hérétique et condamnée d’avance par la bulle Benedictus Deus et le Décret Pro Grœcis, cités plus haut. Cf. Trutina, n. 289-292, p. 410-410.

40. Se dunque non polea (Dio) eomunicare si slesso tolalinenle ad esseri finili, neppure medianle il lume di gloria ; riinune a cercare in che modo egli poteva rivelnre loroe eomunicare la propria essenza. C.erlo in quel modo che alla naturel délie intelligenze create è conforme ; e queslo modo è quello pel quale Iddio ha con esso loro relazione, cioè corne cret.lore loro, corne provisore, corne redentore, corne santificalore. Ibid., n. 677.

Cnm Deus non passif, née

per lumen gloria’, total iler se

communicare entibus flnilis,

non potuil essenliam suam

comprehensoribus reuelare et

communicare nisi eo modo,

qui finilis intelligentiis sit

accommodatus : scilicet Deus

se illis manifestât quatenus

cum ipsis relationem habet,

ut eorum crcalor, provisor,

redemptor, sanctificaior.

Comme Dieu ne peut,

même par la lumière de gloire,

se communiquer totalement

aux êtres finis, il n’a pu révé ler et communiquer aux coni préhenseurs son essence que

de la seule façon qui soit

accommodée aux intelli gences finies : Dieu se mani feste a elles en tant qu’il a

avec elles des relations,

comme leur créateur, leur

providence, leur rédempteur,

leur sanctificateur.

On sait comment la théologie résout la difficulté qui arrête ici Rosmini. Dieu, incompréhensible, est vu entier par les bienheureux, mais n’est pas vu totalement, lotus non lotaliter. S. Thomas, In IIIum Sent., dist. X IV, q. i, a. 2, qu. 1, ad 2°™ ; cf. Sum. theol., I a, q.xii, a. 7, ad2um ; Conl. genl., t. III, c. lv. Voir ici Intuitive ("Vision ;, t. vii, col. 2380 sq. Mais est-ce bien l’incompréhensibilité divine qui arrête ici le théologien italien ? N’est-ce pas plutôt la logique de son système qui l’induit en erreur ? « Confondant à tort la vision béatifique avec une communication entière et adéquate de l’infini au fini, et considérant à bon droit celle-ci comme impossible, Rosmini en conclut que le seul mode possible de révélation et de communication de l’essence divine à l’intelligence créée est la manifestation intuitive que Dieu nous fait, par la lumière de gloire, de ses relations avec nous comme créateur, providence, rédempteur et sanctificateur. En quoi Rosmini ne semble pas plus d’accord avec son système général qu’avec la doctrine catholique. N’a-t-il pas craint, en se montrant jusqu’au bout conséquent avec lui-même, d’aboutir à des conclusions trop clairement et trop audacieusement panthéistiques ? Ou bien, ayant déjà concédé à l’homme, dans l’état de nature et de grâce, toutes les intuitions imaginables, n’en a-t-il plus trouvé d’autre à lui donner dans l’état de gloire ? Je ne sais, mais en tout cas sa vision béatifique est d’une extrême médiocrité. » J. Didiot, op. cit., p. 438. Cf. Trutina, n. 293-298, p. 416-423.

Les annexes du décret.

L T ne lettre du cardinal

Monaco, secrétaire du Saint-Oifice, communiquait le décret et les 40 propositions condamnées à l’épiscopat catholique. Elle se terminait ainsi : Præcipue vero eni teris ut mentes adolescenlium, eorum pnrserlim qui in spem Ecclesiæ in seminariis aluntur, germana catholic ; c Ecclesise doctrinae puris fontibus sanctorum Patrum, Ecelesiæ doctorum, probalorum auttorum, æ præcipue angelici docloris S. Thom.se Aquinatis hausta imbuantur. Bon avertissement à ceux qui prétendaient trouver en Rosmini un interprète autorisé de saint Thomas. A ce document, il faut ajouter une lettre de Léon XIII, en date du 1 er juin 1889, à l’archevêque de .Milan, complétant et précisant le sens et la portée de la lettre du 25 janvier 1882, dont nous avons parlé plus haut. Voir col. 2928. Le pape explique qu’il a demandé alors de faire le silence, afin de calmer les ardeurs et de peur que le zèle pour trouver la vérité ne soit une occasion de manquer à la charité et à la justice..Mais il s’était proposé, pour répondre aux vœux réitérés de nombreux théologiens et même d’évêques, de soumettre à un examen attentif les écrits de Rosmini. Cet examen a abouti à la censure promulguée dans le décret Posl obitum, qu’il a confirmé de son autorité souveraine. D’aucuns ont voulu opposera l’autorité du Saint -Office l’autorité du pape : malgré son désir d’extrême bienveillance, le pape se sent obligé de réprouver avec force pareille attitude injurieuse à lui-même et au Saint-Siège ; et il demande à l’archevêque de veillera obtenir de son clergé et de ses fidèles une entière obéissance. Voir le texte de la lettre Lilleris ad te, dans Trutina p. 448-450.

Enfin le Père général de la congrégation de la Charité. Luigi Lanzoni, en date du 2 février 1890, publia une protestation de pleine et filiale soumission, en son nom et au nom de sa congrégation, au décret Postobilum, « net senso appunto che fu dichiarato dal Santo-Padre nella sua lettera ail’arcivescovo di Miluno del l giugno 18X9°. Le texte de cette déclaration dans Trutina, p. 451.

IV. Conclusion : l’influence du rosminianis.me.

— En dehors de l’Italie, l’influence de Rosmini et de ses idées philosophiques fut à peu près nulle. Mais, en Italie, cette influence fut considérable sur une quantité de prêtres et de laïcs, philosophes, savants, hommes de lettres et hommes politiques. Citons pour mémoire Manzoni, Tommaseo, A. Ravneri, Minghetti, Peyretti, qustavo Cavour (Frammenti filosofici, Turin, 1841), A. Pestalozza, Tardilti, P. Paganini, V. Garelli, R. Bonghi, Rulgarini. Aug. Moglia, etc. Plusieurs de ses admirateurs théologiens ont voulu défendre l’orthodoxie de Rosmini et montrer son accord avec saint Thomas. Nous avons déjà cité W. Lockhart, dans sa Vie d’Antonio Rosmini-Scrbali, trad. Segond, et surtout A. Trullet, Examen des doctrines de Rosmini, trad. de Sacy ; mais l’œuvre la plus considérable qui ait été tentée en ce sens fut celle de Mgr Maria Ferré, évêque de Casale, Degli uniuersali seconde la teoria Rosminiana confronta colla dottrinu di san Tommaso d’Aquino, 9 volumes, Casale, 1880-1888. Pour défendre Rosmini contre les attaques dont il était l’objet, se fondèrent en Italie un certain nombre de revues (qui d’ailleurs ne durèrent pas) : La Sapienza, rivista di filoso/iae di lettere, Turin, 1879 ; Il Rosmini, enciclopedia di scienze e lettere, Milan, 1887-1889 ; // nuovo Rosmini, periodico scieniifico et letterario, Milan, 1889-1890 ; Il nuovo Risorgimento, rivista di filosofla, scienze, lettere, educazione e studii sociali, Milan, 1892 ; Rivista rosminiana. depuis 1906. « La condamnation à Rome des quarante propositions de Rosmini, en 1888, mit apparemment fin aux débats… Le caractère trop aprioriste de cette spéculation, I’innéisme qu’elle place à son point de départ, le discrédit qui s’est attaché à l’ontologisme en général, le succès toujours grandissant de la philosophie positive, la reconnaissance plus éclairée de la part qui revient à l’expérience dans le développement même de