Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 14.1.djvu/145

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

275

    1. RUSSIE##


RUSSIE. LE CONCILE ANTILATIN DE 1620

276

patriarche russe devait avoir le troisième rang, entre Alexandrie et Antioche et on avait cru que Jérémie avait promis de faire droit à ces revendications. Aussi Denys dut-il longtemps attendre son audience auprès du souverain. Il ne rencontra le patriarche Job que par hasard et longtemps après son arrivée. Pourtant, au bout de quelque temps, on trouva cette solution : un nouveau synode devait être convoqué à Gonstantinople, car le patriarche d’Alexandrie, « pape et juge œcuménique », avait manqué au premier, l’eut-ôtre avait-on appris à Moscou que Mélèce Pigas, le nouveau titulaire d’Alexandrie, ne ménageait pas ses critiques à l’égard de Jérémie qu’il trouvait trop autoritaire. Ce nouveau synode avait pour but de donner le troisième rang à Moscou. On dépêcha d’abondantes aumônes aux patriarches. Le 12 février 1593, un nouveau concile, bien moins nombreux que celui de 1590 fut réuni à Constantinople. Mélèce Pigas en fut l’âme. Il critiqua Jérémie, mais la même décision fut prise qu’en 1590. On reconnaissait le patriarche moscovite en lui donnant la cinquième place, après Jérusalem. Les légats de Mélèce furent jetés en prison dès leur arrivée en Moscovie.

Les sources principales sur l’Institution du patriarcat moscovite ont été éditées par A. -.la. Spakov. Fondation du patriarcat en Russie, Odessa, l’.)12 (Mém. de Vuniv. de Xovorossijsk ; fac. de droit, t. vt), ce sont les trois Greceskie statejnye spiski, n. 1, 2 et 3 ; il y a aussi le rituel composé par le diak Scelkalov et la lot Ire synodale écrite à Moscou. l’n autre appendice contient aussi la Kalhidrusis d’Arsène et le livre du diak Ermolajev. Une autre édition de la Kathidrusis d’Arsène, et le Chronographe de Hiérothée (ou Dorothée), ont été édités par K.-N. Sathas. Biofpapcx’ov iyj.f J !.-j.’7).-x -kiçi’i. toû Kv.-tJi-j.yPi-j’IepEjXiOii B, Athènes, 1870. L’épîtrc du concile de Constantinople célébré en 1590 a élé éditée par V. Regel, dans ses Analecla Ryzant.-Slav., Pétersbourg, 1891, p. 8.V91 ; en appendice, à la fin de l’ouvrage, on trouvera une table photographique contenant les signatures apposées à ce document. Les Actes du synode de 1593 ont été édités par Porphyre Uspenskij, dans Trudu, oct. 1865, p. 237 s(f. La lettre de Mélèce Pigas se trouve dans les Anal. Byzant.-Slav. de Regel, p. 92-115 ; ibid., les lettres de Joacbim d’Antioche et de Sophrone de Jérusalem.

Voir encore A. Dmitrievskij, Arsène, archevêque d’Élasson rt ses mémoires récemment découverts, dans Trudu, 1898-1899 ; li.-Th. Nikolævskij, Les relations des Russes avec Constantinople à propos du rang hiérarchique du patriarche moscovite (SnoSenija Russkikh…), dans Khr, C.len., 1880, n. 1 ; du même, Institution du patriarcal en Russie, ibid., 1X79-1880 ( Ucreidenie…). L’ouvrage de Spakov qu’on aurait désiré écrit avec un peu moins d’àprcté contre les prélats hyrantins peut presque suffire à lui seul.

Durant les années qui suivirent l’institution du patriarcat moscovite, se tint un concile qui passa un décret presque incroyable sur la matière de l’eucharistie. Il y avait disette de vin liturgique en Moscovie. On devait le faire venir « de chez les païens qui ne connaissent pas le vrai Dieu » ou l’acheter « chez les Latins qui ont rejeté la grâce de Dieu et sont tombés dans de multiples hérésies ». Les marchands mêlaient d’autres substances avec le vin qu’ils vendaient à un prix énorme et faisaient remarquer aux Moscovites que, sans eux. ils n’étaient même pas capables de célébrer leur liturgie. Il était impossible, ajoute le préambule du concile, de faire venir le vin de Grèce ou de Jérusalem à cause de. la distance ou de l’insécurité des chemins.

Il fallait supprimer cet abus. Le tsar (était-ce bien Théodore, ou plutôt l’esprit fertile de son ministre qui eut cette idée ?) décréta que dans son territoire on devait célébrer avec du vin extrait « de baies données de Dieu, non souillées par des païens et croissant dans son propre territoire ». Il communiqua son dessein à la tsaritsa, à ses boiars et aussi au patriarche -lob et à ses évêques. On décida d’enquêter à travers toute la Moscovie pour trouver les baies convenables. On s’arrêta aux cerises ! Le concile passa un décret ordonnant de choisir des hommes de confiance pour en extraire le « vin » et le préparer pour le culte. Le décret ajouta que Dieu, qui avait changé l’eau en viii, changerait ce vin en son Précieux Sang. Suivent une série de textes plus aptes à prouver la vérité du sacrement de l’eucharistie qu’à légitimer le vin nouveau. Voir V.-N. von Bene-Seviô, Un concile de Moscou de la fin du XVIe siècle, sur le vin d’Église (Moskovskij sobor…), dans Izv. Otd., t. xxii, 1917, p. 1-9.

XIII. Le concile de 1020 et i.a rebaptisation des Latins. Job n’était pas destiné à mourir sur le trône de Moscou. Les premiers titulaires de la dignité patriarcale furent entraînés dans la terrible tourmente révolutionnaire qui jeta la Russie du xviie siècle dans les convulsions les plus graves jusqu’à l’avènement de la dynastie des Hnmanov.

Après la mort du tsar Théodore Ivanoviô (le dernier des Hurikides de la famille d’Alexandre Nevskij), ISoris Godunov lui succéda comme tsar. Bientôt, un célèbre prétendant faisait son apparition en Pologne. Un jeune homme qui se disait Dimitri, fils d’Ivan le Terrible et de sa dernière épouse Marie Nagoj, échappé par miracle aux sieaires de Godunov, parlait de chasser l’usurpateur et de reconquérir le trône de ses aïeux. Dimitri, vrai ou faux, peu nous importe ici, fit en secret profession de foi catholique dans la résidence des jésuites de Cracovic et, puissamment aidé par la noblesse polonaise, partit pour Moscou. Le patriarche Job multiplia contre lui les anathèmes en disant que le véritable Dimitri était mort et que ce prétendant n’était qu’un défroqué du nom de Grégoire (GriSka) Otrepiev. Il en faisait même une question dogmatique, car, si l’on acceptait Dimitri, le dogme de la résurrection des morts était en danger.

Ces anathèmes n’arrêtèrent pas la marche du prétendant à travers un pays qui l’acclamait avec enthousiasme comme le fils de ses tsars. Bientôt Boris Godunov mourait, son fils Théodore Borisoviè le suivait prématurément dans la tombe. Dimitri arriva à Moscou, déposa le patriarche qui l’avait maudit et lui désigna un successeur (qui fut du reste élu aussi canoniquement que de coutume !) dans la personne de l’archevêque de Riazan, le Grec Ignace, qui dans la suite devait mourir catholique. Dimitri fut accueilli avec enthousiasme par toutes les classes de la société russe à la seule exception de Basile Sujskij (lui même prétendant au trône) et de ses amis qui conspirèrent contre lui dès le début. Pourtant sa cour polonaise pas toujours très discrète, la présence des jésuites qu’il avait introduits à Moscou, son mariage avec la fameuse Marina, qui, malgré son ambition démesurée, tenait énergiquement à sa religion catholique et l’affichait en pleine cathédrale de l’Assomption, lui aliénèrent une partie de la sympathie populaire. Il fut renversé par une émeute de palais et assassiné une semaine après son mariage. Ignace fut emprisonné et le nouveau tsar Basile Sujskij, se choisit un patriarche à sa dévotion dans la personne du métropolite I lermogène, un vieux soldat devenu métropolite de Kazan, d’esprit plutôt borné, mais légendaire en Hussie pour sa résistance, d’ailleurs très exagérée par l’historiographie officielle, aux autorités polonaises qui devaient dans la suite s’établir à Moscou, l’n nouveau » Dimitri Ivanoviè > apparut bientôt, d’au 1res prétendants se levèrent dans divers endroits et la Hussie, divisée, fut mise à l’eu et à sang, lai même temps que deux empereurs (Dimitri II et Basile Sujskij) il y eut aussi deux patriarches, car Dimitri avait fait venir à sa capitale de TuSino l’ancien boiar Théodore Homanov (le chef de la dynastie future des Homanov). tonsuré moine par Boris Godunov et devenu métropolite de Hostov sous le « premier » Dimitri. Sujskij et Dimitri furent déposés par leurs