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    1. RUSSIE##


RUSSIE. LE RETOUR A LA TRADITION

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t. n. p. 47-90 ; le même, Svjatitel Filaret Moskovskii, ego zizn i dèjalelnost na moskovskoi kathedrê po ego propovêdjami (1821-1867 gg.), Kharkov, 1894. C’est à ce Philarète que les partisans des nouvelles écoles de Russie font appel ; tandis que la théologie officielle reconnaîtra uniquement le Philarète du Catéchisme.

Une fois les livres à tendance prokopovienne proscrits, on éprouva un besoin urgent de textes théologiques répondant aux exigences du Saint-Synode, ou mieux de son procurateur. Comme exemple, il suffit de rappeler les cours de l’académie de Kiev, où la théologie fut enseignée, de 1830 à 1838, par l’archimandrite Innocent (Borisov), qui devint métropolite de Moscou, et par son disciple Dimitri Muretov. Dans leurs cours de dogmatique, ces professeurs suivent l’œuvre de Dobmayer, Systema theologiæ catholicæ, Solisbacii, 1807, tandis que pour la morale ils continuent de se servir des Institutiones de Buddée. M. -F. Jastrebov, Y isokopreosvjascennii Innokentii (Borisov), kak professor bogoslovija Kievskoi dukhovnoi akademija, dans Trudij, 1900, t. iii, p. 522-566 ; le même, Vysok. Dimitrii Muretov. Bibliograficeskaja zamètka, dans Trudtj 1899, t. ii, p. 85-112. Pour remédier à ce manque de textes théologiques, le professeur de Moscou Pierre Ternovskij publia dans cette ville, en 1838, un compendium de théologie, trop bref et superficiel : Bogoslovie dogmaticeskoe, ili prostrannoe izlozenie ucenija vêri pravoslavnoi katholiceskoi Cerkvi, et le comte Protasov ne cessa de stimuler les professeurs des académies à donner un cours plus digne et plus complet. Le premier traité de théologie qui parut fut le manuel d’Antoine (Anfiteatrov), recteur de Kiev, Dogmaticeskoe bogoslovie pravoslavnoi katholiceskoi voslocnoi Cerkvi, Kiev, 1848, dont les éditions se multiplièrent à Kiev, Moscou et Saint-Pétersbourg. Antoine se servit largement des auteurs catholiques, surtout des Institutiones theologicæ de Libermann, des Prœlectiones theologicæ du P. Perrone, et du Theologiæ cursus completus de Migne. Mais l’œuvre d’Antoine, au jugement du métropolite Philarète, n’était pas « assez puissante ». A. Nadezdin, Istorija S. Peterburgskoi prav. dukhovnoi seminarii, Saint-Pétersbourg, 1886, p. 365 sq. Voir sur cet auteur les deux volumes de l’archimandrite Serge, Antonii Anfileairov, arkhiepiskop Kazanskii i Svjazkii, Kazan, 18851886.

Mais à cette époque était déjà sur le point de paraître le plus célèbre des manuels théologiques russes, celui de Macaire (Bulgakov), élève de Kiev, recteur de l’académie de Saint-Pétersbourg, ensuite évêque de Tambov, de Kharkov, de Lithuanie, et enfin métropolite de Moscou, où il siégea de 1879 à 1882, année de sa mort. Sa vie a été écrite en deux volumes par Th. Titov, Makarii Bulgakov, mitropolit Moskovskii i Kolomenskii, Kiev, 1895, 1903. Parmi ses biographes plus récents, voir A.Vertelovskij, Ocerk ïizni i dêjatelnosii Makarija, mitropolila Moskovskago, dans Vêra i razum, 1917, t. i, p.’93-124, 232-249, 435-446, 718731.

Macaire a laissé de précieux travaux historiques sur l’académie de Kiev, sur le schisme des starovières et douze volumes sur l’Église russe jusqu’à 1667. Mais sa célébrité est fondée sur ses travaux théologiques, l’introduction, Vvedenie v pravoslavnoe bogoslovie, Saint-Pétersbourg, 1847 ; la dogmatique, Pravoslavnoe dogmaticeskoe bogoslovie en 5 volumes, Saint-Pétersbourg, 1849-1853 ; et la synopsis, Rukovodstvo k izuceniju khristianskago pravoslavno-dogmaticeskago bogoslovija, Saint-Pétersbourg, 1869. Les deux premières furent traduites en français : Introduction à la théologie orthodoxe, Paris, 1857 ; Théologie dogmatique orthodoxe, Paris, 1859-1860. Le Compendium eut une édition allemande, Moscou, 1875, et une grecque, Athènes, 1883.

Dans son ouvrage sur Macaire, op. cit., p. 19 sq., Titov recueille les témoignages d’admiration que rendirent à celui-ci ses contemporains, à commencer par le vieux professeur de Kiev, Innocent Borisov ; mais il ne manqua pas d’écrivains qui en jugèrent autrement, et leurs sentiments sont de plus en plus partagés par les modernes. Le P. G. Florovskij, Puti russkago bogoslovija, p. 222 sq., adopte l’opinion défavorable de Khomjakov et applique à la théologie de Macaire ce qu’Hilarion Platonov disait naguère de ses œuvres historiques : « La dogmatique de Macaire a toutes les apparences d’un livre théologique ; mais ce n’est pas de la théologie, c’est seulement un livre. » Paroles trop sévères, mais qui ont un certain fondement dans le caractère que Florovskij appelle « bureaucratique » de l’ouvrage de Macaire, trop attentif aux textes, aux petits détails, et pas assez aux vérités et aux grandes lignes de la théologie.

Macaire n’est certainement pas un auteur génial ; son œuvre n’est pas originale et tous aujourd’hui constatent qu’elle relève de VHistoire des dogmes de H. Klee et des traités théologiques du P. Perrone, auquel elle emprunte même les citations, d’une façon parfois inexacte. On ne peut cependant pas nier que les manuels de Macaire aient des qualités didactiques et se recommandent par la clarté et la précision, deux qualités qui sont peut-être peu goûtées par les censeurs modernes. Quant à l’autre accusation portée contre lui, que sa théologie n’est pas orientale, on pourrait la porter aussi contre ses prédécesseurs, qui tous furent tributaires, en des proportions variables, de la culture occidentale. Pour ce qui est de la doctrine, l’auteur garde fidèlement l’enseignement des livres symboliques, principalement du Grand catéchisme de Philarète.

A côté de Macaire, il faut placer Philarète (Gumilevskij ) archevêque de Cernigov. Philarète, qui déplorait dans le manuel de Macaire « un manque de logique et de profondeur dans l’argumentation », avait dicté un cours quand il professait à l’académie de Moscou. Quand il fut promu au siège de Riga en 1848, il fut prié par Protasov de publier ce cours, mais ce fut seulement en 1854 qu’apparut, à Cernigov, le premier volume de son Pravoslavnoe dogmaticeskoe bogoslovie ; le second volume suivit en 1865, un an avant la mort de l’auteur. Le livre de Philarète, que de nombreux auteurs, avec N. Glubokovskij, Russkaja bogoslovskaja nauka, Varsovie, 1928, p. 40, préfèrent à tous les autres, s’inspire lui aussi des auteurs catholiques Brenner, Klee et Perrone ; il a les mêmes tendances et contient les mêmes opinions que la théologie de Macaire, mais Philarète parle d’une manière plus moderne et plus hardie, qui révèle des vues plus élaborées et plus personnelles. Ceci n’a rien de surprenant, si l’on se rappelle que Philarète comme érudit n’a peut-être pas son pareil parmi les théologiens et les patrologues russes, comme on peut le constater dans ses œuvres Obzor russkoi dukhovnoi literaturi, Cernigov, 1859, 2 vol., et Istoriceskoe ucenie ob otsakh Cerkvi, Cernigov, 1859, 3 vol. Sur Philarète, cf. S. Smirnov. Filaret arkhiepiskop Cernigovskii, Tambov, 1880.

Macaire et Philarète donnèrent une règle de conduite aux nombreux auteurs de manuels et de compendiums de théologie dogmatique : Justin Poljanskij, Jean Sokolov, Alexis Gorodkov, Eugène Popov, Métrophane Jastrebov, Serge Nikitskij, N. Anickov, A. Kudrjatsev, P. Gorodtsev, N. Malinovskij, I. Vinogradov, etc., parmi lesquels ressort en premier lieu le manuel de Nicolas Malinovskij, recteur du séminaire de Podolsk, Pravoslavnoe dogmaticeskoe bogoslovie, 4 vol., t. i, Kharkov, 1895 ; t. ii, Stauropol, 1903 ; t. iii, et iv, Serghiev-Posad, 1909, et le compendium en 2 tomes, à l’usage des séminaires : Ocerk pravoslavnago