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    1. SATISFACTION##


SATISFACTION. ABOUTISSE M K NT DE I/ÉVOLUTION

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gences purement disciplinaire ; mais cette conception est précisément celle que le même raisonnement a fait écarter par les théologiens de l’Eglise : l’indulgence ne dit pas seulement rémission au for humain ; elle dit aussi rémission au for divin : Remissio, écrit saint Thomas, remissio quæ fit quantum ad forum Ecclesise valet etiam ad forum Dei. Secus enim], Ecclesia, hujusmodi indulgenlias faciens, magis damni/icarel quam adjuvaret, quia remitteret ad graviores pœnas, scilicet purgatorii, absolvendo a pœnitentiis injunctis. In I Vum, dist. XX, q. i, a. 3, sol. 1 ; voir, de même saint Bonaventurc : In IV" iii, dist. XX, p. ii, a. un., q. il.

c) Influence sur la théologie de la satisfaction. — La notion précise et définitive des indulgences ainsi rappelée, il est facile de se rendre compte comment elle a aidé la théologie à préciser aussi la notion de satisfaction. Elle y a contribué en faisant ressortir le parallélisme et donc la distinction du for ecclésiastique et du for divin, autrement dit, du for externe et du for interne ; mais une autre distinction également accentuée par la pratique des indulgences a aidé plus encore à cette œuvre de dégagement : la distinction entre la rémission du péché lui-même et la rémission de la peine temporelle, qui peut encore lui rester due.

Les indulgences, en effet, ont ici leur présupposé fondamental. Elles n’ont jamais été conçues comme visant le péché lui-même. Leur objet propre et unique est la vindicta, la peine temporelle, dont, même après le pardon, le pécheur peut rester passible de la part de Dieu et de l’Église. Or, cet objet, nous savons comment elles l’atteignent : en éteignant, au for divin, la peine correspondant à la satisfaction dont elles font remise au for ecclésiastique. C’est donc que cette satisfaction est ordonnée elle-même à l’extinction de cette peine, et ainsi en apparaît le but et le sens propre : quoique destinée à la. réparation du péché en général, elle vise en particulier à obtenir la rémission de la peine temporelle dont le pardon peut laisser subsister la dette.

Cette conception plus étroite de la satisfaction nous avait paru résulter du fait général que l’accomplissement de la pénitence ecclésiastique pût être, en des circonstances exceptionnelles, omis ou renvoyé après l’absolution ; mais elle est manifestement aussi à la base de la conception des indulgences.

À boutissement de l’évolution.

l. La satisfaction

et les autres actes du pénitent. — L’évolution de l’idée de satisfaction peut être considérée comme achevée. La théologie scolastique l’acceptera telle qu’elle ressort de la pratique des indulgences. On continuera à parler de la satisfaction pour le péché en général : en ce sens, comme il a été dit plus haut (col. 1 137), on l’identifiera avec la vertu de pénitence. Mais, quand on l’opposera à la contritio cordis et à la confessio oris comme « partie de la pénitence ». ce qu’on y verra surtout, ce seront les œuvres dites de pénitence destinées à compenser les peines temporelles dues au péché ou, plutôt, à obtenir de Dieu qu’il en accorde la remise.

Le triptyque pénitentiel dont fait ainsi partie la satisfaction est foi t ancien. Aux mots près, il se découvre dans la formule attribuée à saint Grégoire le Grand que nous avons citée plus haut (col. llT.’o : Convcrsio mentis, confessio oris et vindicta peccati. On le reconnaît équivalemment dan. saint Pierre Damien. La verbosité (le ce dernier lui fait distinguer dans la conversion sept étapes, dont la troisième est la ilolor cordis, la quatrième la confessio oris, la cinquième la maceralio carnis et la sixième la correctio operis. Serm., i.vm, P. /… I. cxi.iv, col. 831-833 ; mais, quand ii se résume, lui aussi les ramène à trois : Confltens pastori suo pwitalem cordis, veritatem oris, maceationem carnis débet exhibere. Serm., i.xix, ibid.,

cl. OUI li.

Les - maîtres », à l’école, seront plus concis et plus uniformes. Ils répéteront tous à leur manière ce que prêchait Raoul Ardent à la fin du xi° siècle : Aclio pirnitentise fit in corde, ore et opère : corde per contritionem, ore. per confessionem, opère per satisfaclionem. Ilom., i, 40, P. L., t. clv, col. 1810 A. Ces trois actes, expliquera Anselme de Laon, correspondent aux trois manières dont se commet le péché, cogitatione, verbo, opère. Ils en son ! comme le remède approprié. Le premier est cordis contritio ; le second quasi emphstrum est ons confessio, Tertium est injunctse satisfaclionis diliyens expletio. Sententise Anselmi, viii, édit. Bliemetmeder, dans les lieitrâge : ur Gesch. der Philos, des M ittelalters, de Bâumlcer, t. xviii, fase. 2-3, p. 121. Aussi le groupement contritio cordis, confessio oris, satisfactio operis, restera-t-il consacré. Gratien, dans son Décret, le suppose établi, quand il pose la question par laquelle s’ouvre son traité De pœnilentia : Utrum sola cordis contritione et sécréta satisfactione, absque oris conjessione, qnisque possit Deo salisfacere ? Édit. Friedberg, p. 1159. Pierre Lombard écrira de même : In perfeclione pienilentitB tria consideranda sunt, scilicet compunclio cordis, confessio oris, satisfactio operis, t. IV, dist. XVI, e. 1, édit. de Quaracchi, t. ii, p. 839, et son énumération sera le point de départ des questions, articles ou chapitres que ses commentateurs consacreront à chacun de ces actes du pénitent.

2. Le but spécial de la satisfaction : la peine du purgatoire. — Or, ce. que ces commentateurs diront de la satisfaction en particulier montrera qu’ils la considère nt comme spécialement ordonnée à la rémission de la peine temporelle. Ils la montreront singulièrement qui met à l’abri des châtiments du purgatoire.

Dès le iiie siècle, nous avons entendu saint Cypricn noter que, malgré la réconciliation reçue au moment de la mort, l’omission de la pénitence ecclésiastique laissait exposé à de longues peines qui retarderaient l’entrée au ciel (supra, col. 1112). Cette pensée, où se manifestait déjà la foi au dogme à venir, avait toujours été se précisant dans l’Église. L’idée des peines à subir après la mort était restée en connexion avec celle d’une pénitence ou d’une satisfaction Insuffisante : Sec tibi blandiaris, disait saint Pierre Damien au pécheur, nec tibi blandiaris, si graviter peccantt levior pœnilentia… diealnr, cum in purgaloriis ignibus perficiendum sit quidquid hic minus feceris. Serm., lui, P. L., t. cxliv, col. 831 A. (.’était clairement assigner à la pénitence ou à la satisfaction imposée par le prêtre le but même que poursuivent les.bâtiments du purgatoire : s’acquit 1er envers Dieu pour la peine restant duc au péché déjà remis. Ainsi l’entendail bien Abélard, lorsqu’il incitait en garde contre les inconvénients d’une satisfaction trop légère : Magnum hinc incommodum psenitentes incurrunt, cum, mate [inde] conftsi, gravioribus poenis, postmodum plectentur, unde hic per leviores satisfacere potuerunt. Ethica, c. xxv, P. L., t. clxxviii, col. 672 C.

Ainsi surtout l’avait entendu le traité De vera et falsa psenitentia, auquel son attribution à saint Augustin devait valoir si longtemps une si grande autorité. Le pécheur y était formellement prévenu que, si une pénitence sincère suffisait, même au moment de la mort, à assurer le pardon du péché, elle ne mettait pas pour autant à l’abri de toute peine, non tamen promittimus quod évadât omnem peenam. Qui aura ainsi omis de faire de dignes fruits de pénitence, aura d’abord, à son entrée dans l’autre inonde, à être purifié par le feu du purgatoire, prias purgandus est igné purgationis. A chacun, par conséquent, de réagir contre son péché pendant la vie, s’il ne veut pas en être châtié après la mort : car certains péchés mortels, pour être devenus susceptibles de pardon grâce à la pénitence, per pmnilentiam fiunt venialia, n’ont pas été pour