Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 14.2.djvu/266

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

J033

SIDOINE APOLLINAIRE

2034

    1. SIDOINE APOLLINAIRE (Saint)##


SIDOINE APOLLINAIRE (Saint), évêque de Clermont-Ferrand, de 471 à IS7 environ. — Sidoine Apollinaire (Calas Sollius Modestus Apollinaris Sidonius). naquit à Lyon le 5 novembre 131 nu 132. Il appartenait à l’tme îles premières familles du pays. Son grand-père avait été préfet du prétoire des Gaules sous le règne île rhéodose et c'était par la conversion de cet aïeul que le christianisme était entré dans la famille. Sous alentinien III, son père avait été revêtu de la même dignité. Le plus brillant avenir semblait donc réservé à Sidoine. Après avoir achevé des études aussi complètes que possible, celui-ci épousa en effet, vers 152. une jeune fille originaire d’Auvergne, Papianilla, dont le père. Havius F.parchius Avitus, devait être, quelques années après, élu empereur par les députés de la noblesse gauloise réunis à Beaucaire. Le 1 er janvier 456, il fut chargé de prononcer devant le Sénat romain le panégyrique île son beau-père ; et ce beau morceau de rhétorique connut un tel succès qu’il valut à l’orateur les honneurs d’une statue de bronze, sur le forum de Trajan. Peu après, Avitus était d’ailleurs renversé, et n’avait d’autre ressource pour obtenir la vie sauve que d’accepter le siège épiscopal de Plaisance. Sidoine, qui s'était compromis pour lui. se hâta de faire sa cour au nouvel élu et de prononcer un second panégyrique en sa faveur : moyennant quoi, il entra fort avant dans les bonnes grâces de Majorien.

Il se retira cependant sur ses terres. Pendant quelques années, de 461 à 405, il y mena la vie tranquille et confortable d’un grand propriétaire foncier, avec sa femme et ses trois enfants. La politique ne tarda pas à le rappeler. Après l’assassinat de Majorien et de son successeur Sévère, Sidoine dut, une fois de plus, prononcer le panégyrique de leur successeur, Anthémius, 1 er janvier 468, et son éloquence lui mérita la dignité de préfet de Rome, puis, à sa sortie de charge, le titre de patrice.

Sans doute espérait-il jouir en paix des années qui lui restaient à vivre lorsque, dans des conditions mal connues, il fut appelé en 471 ou 472 au siège épiscopal de Clermont. Rien ne l’avait préparé à l’exercice de ses fonctions. Mais, une fois élu, il eut à cœur de se rendre digne de la confiance de son peuple et de ses collègues, et il se montra à la hauteur des circonstances dilliciles où il dut exercer son ministère. Dès 474, les NYisigoths, conduits par l’arien Euric, envahirent l’Auvergne ; Sidoine commença par organiser la résistance. Lorsque, malgré la vaillance des Auvergnats et les protestations de l'évêque, la province fut tombée entre les mains des barbares et que leur victoire eut été reconnue par un traité régulier, il dut même payer son courage de l’exil ; pendant quelque temps, il fut interné dans la forteresse de I.ivia, près de Carcassonne. Il fut cependant rendu à la liberté et put même reprendre ses fonctions épiscopales. Il finit par mourir en paix vers 487 ou 489, laissant après lui le souvenir d’un grand évêque.

L'œuvre littéraire de Sidoine Apollinaire comprend vingt-quatre poèmes et cent quarante-sept lettres réparties en neuf livres. Ses poèmes sont tous antérieurs à son épiscopat : ce sont, outre les trois panégyriques d’Avitus, de Majorien et d' Anthémius, rédigés en pompeux et solennels hexamètres, des écrits de circonstance : épithalames, billets de demandes ou de remerciements, lettres versifiées, etc. Sidoine fait preuve, dans ces poèmes, de beaucoup d’habileté, d’une connaissance très exacte de la prosodie et de ses règles et même d’un véritable sentiment poétique. Il ne craint pas d’employer les mètres les plus rares et les plus dilliciles a manier, se conduisant peut-être, en agissant ainsi, comme un bon écolier plutôt que comme un maître : il emprunte aussi idées et expres DICT. DE 1IIÉOL. CATHOL,

sions à Claudien, à Stace, à Virgile. Mais, lorsqu’on a

lait la part de tout ce qu’il y a de scolaire dans ses vers, il faut bien reconnaître que la technique ne suffit pas à en expliquer le charme. Sidoine Apollinaire n’est pas un grand poète assurément. Il est cependant plus qu’un versificateur, et pour l’apprécier à sa juste valeur, il n’est que de le comparer à Yenance Fortunat : l'évêque de Clermont est Infiniment supérieur à celui de Poitiers.

Plus importantes sont les lettres de Sidoine. Lorsque celui-ci fut élevé à l'épiscopat, il renonça à la poésie, craignant, disait-il, que la réputation du poète ne souillât en quelque chose la rigidité du prêtre. Mais il continua à écrire à ses nombreux correspondants, et il lui arriva même, à plus d’une reprise, de mélanger sa prose de quelques morceaux en vers, comme s’il avait voulu prouver que son talent demeurait intact. Ces lettres, recueillies à la prière des destinataires euxmêmes, forment neuf livres, comme nous l’avons dit, publiés successivement vers 469, 472, 474-475 (1. V-VII), 476 (1. VIII), 479 (1. IX). Il ne faut pas chercher dans les lettres de Sidoine, même dans celles qui sont postérieures à l'épiscopat, l’expression des croyances ou des doctrines théologiques de l’auteur. L'évêque de Clermont n’est ni un prédicateur, ni un théologien, ni un moraliste. Il reste avant tout un honnête homme. Aussi l’intérêt fondamental de sa correspondance est-il de nous faire connaître la période où elle a été écrite. « Sans les lettres et les poèmes de Sidoine, l’histoire politique et sociale de la Gaule, à cette époque, serait pour nous presque vide de faits. » Ajoutons qu’il en serait de même de l’histoire littéraire : sans doute faut-il se garder ici de prendre à la lettre tous les éloges que Sidoine adresse à ses correspondants. A l’en croire, il semblerait que la Gaule de son temps fût peuplée d’orateurs, d’historiens, de poètes, de dramaturges, etc. La réalité est bien plus modeste. Cependant, grâce à Sidoine, nous connaissons un certain nombre d’hommes instruits et distingués qui vivaient de son temps, et cela est bien quelque chose.

Les lettres de Sidoine Apollinaire nous parlent encore de quelques écrits qu’il avait rédigés ou qu’il avait en projet, mais dont nous ne savons rien de précis. D’abord une traduction latine de la vie d’Apollonius de Tyane, par Philostrate, traduction qui n'était pas de lui, semble-t-il, mais qu’il aurait revue et améliorée. Epist., VIII, iii, 1. Puis des contestatiuncula', qu’il avait envoyées à l'évêque Mégéthius, Epist., VII, m, 1 : nous ignorons ce que désigne au juste cette expression. On a pensé autrefois à des préfaces liturgiques, en se souvenant du sens qu’a parfois le mot contestritio, et aussi de l’affirmation de saint Grégoire de Tours qui parle d’un livre constitué par lui de missis ab eo (Sidonio) compositis : si ces missæ sont des textes destinés à être lus au cours de la messe, il sera naturel, en effet, d’entendre ces conlestatiunculæ comme désignant des préfaces. Cependant on a pensé aussi qu’il s’agissait de sermons et nous savons, en elïet, que Sidoine avait envoyé à l’archevêque Perpétue de Tours un sermon qu’il avait prononcé à Rourges. Epist., VII, ix, 1. Il est difficile, entre les deux hypothèses, de se prononcer. Enfin, Sidoine fait part, dans sa dernière lettre, Epist., IX, xvi. du projet qu’il a conçu d'écrire des hymnes en l’honneur des martyrs, à commencer par saint Saturnin de Toulouse. Il est probable que ce projet n’a pas été mis à exécution.

Les œuvres de Sidoine Apollinaire ont été éditées |>ai Sirinond. Paris, 161 I ; c’est cet le édition que reproduit P.L., i. i.viii. lue édition beaucoup meilleure a été pr< parée par Chr. Luetjohann, Gaii Solii Apollinaris siiimni eptstolse ri inriiiiiin, dans Mon. (jenn. hist., Auct. antlquiss., t. vin.

T,

XIV.

65.