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    1. SPIRITISME##


SPIRITISME. LES FAITS MODERNES

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un de ses plus persévérants propagateurs, l>ien plus, son prophète : nous voulons parler d’Allan Kardec. Il s’appelait de son vrai nom Léon-Hippolyte-Denizart Rivail. Il naquit, l’an 1804, à Lyon, la cité positive et mystique. Il fut élevé en Suisse, à l’école de l’istalozzi d’Yverdon, dans un milieu protestant fortement imprégné de scientisme. De sa naissance il garda le goût du rêve. De son éducation il emporta le culte de la science, la foi dans la valeur moralisatrice de l’instruction, la tendance à ramener l’idéal religieux à la mesure de la raison. C’est en 1851 que Rivail, raconte-t-il lui-même, entendit parler pour la première fois des tables tournantes par un ami, M. Portier, magnétiseur. L’année suivante, mai 1855, il assistait à une séance médianimique. Dès lors, il est tout entier au spiritisme. Il se met à écrire les réponses reçues. Plus de dix médiums lui prêtent leur concours. Pour Rivai ! lui-même, on peut se demander si jamais il tenta de se mettre en relation avec les esprits. Le 18 avril 1857 paraissait la première édition du Livre des esprits. Les révélations avaient marché bon train : moins d’un an s’était écoulé depuis l’annonce de la mission ; il n’y axait pas deux ans que l’on communiquait avec l’au-delà. L’Évangile de la doctrine nouvelle avait paru. Il était signé Allan Kardec. C’est que, dans l’intervalle, Rivail avait appris qu’il avait jadis vécu en la personne d’un vieux barde celtique de ce nom. En 1012, l’ouvrage atteignait sa 52e édition. Tout l’essentiel se trouvait lixé dès 1857. Les éditions postérieures ne devaient apporter que des modifications secondaires.

D’autres ouvrages suivirent, qui expliquaient, précisaient, complétaient Le Livre des esprits. C’étaient Le Livre des médiums ; L’imitation de l’Évangile selon le spiritisme, devenue bientôt L’Évangile selon le spiritisme ; Le ciel et l’enfer ou la justice divine selon le spiritisme ; La genèse ; Qu’est-ce que le spiritisme ? Le spiritisme à sa plus simple expression ; Le résumé de In loi des phénomènes spiriles ; Le caractère de lu révélation spirile. En outre, le 1 er janvier 1858, était lancée la Revue spirile, qui vit toujours ; et, en cette même année 1858, était fondée la société spirite de Paris.

Allan Kardec se lit le missionnaire du nouvel évangile à travers la France. Chose notable, il était francmai on. Là où il se rendait, il trouvait l’appui des frères qui déjà, sans doute, avaient préparé sa venue. Et voici qu’en France comme aux États-Unis, une société secrète travailla à la diffusion du spiritisme. En France, la franc-maçonnerie pouvait dire qu’elle reprenait les traditions des ancêtres.

Après la mort du maître, le représentant le plus en vue de la conception kardéciste lut Léon Denis, né et fixe à l’ours, décédé en 1927. Durant quarante-cinq ans, il se fit le commis-voj ageur en France, et même à l’étranger, des doctrines spirites. Lui aussi faisait partie de la franc-maçonnerie et en garda l’esprit toute sa vie. L’œuvre de Léon Denis est plus copieuse que riche. Les volumes qu’il a écrits : Après la mari, exposé de la doctrine des esprits ; Christianisme et spiritisme ; Dans l’invisible, spiritisme et médiumnité ; L’au-delà et la survivance de l’être ; La grande énigme, Dieu et l’univers, se commentent ou même se répètent.. Il met dans ses li rcs plus de couleur et de vie que son ninil re, mais aussi de la déclamation et une passion moins maîtresse d’elle-même. In trait profond distingue ses Ouvrages, comme ceux de la plupart des écrivains spi rites contemporains, d’avec les livres d’Allan Kardec. CYst la rareté des recours précis a l’autorité des esprits. Le Livre des esprits n’est guère qu’un recueil de réponses venins d’outre tombe, llan Kardec a même le soin, dirons nous le scrupule ? de marquer par des guillemets ce qui est leur texte littéral, (liez Léon 1 icnis, se glisse, de loin en loin, comme toute honteuse,

une courte citation des esprits. On rappelle parfois. pour mémoire, qu’on écrit avec l’aide et l’inspiration des « guides de l’espace ». Quelque part, il avertit cpie certains détails lui ont été « communiqués par un esprit élevé dont la vie a été mêlée à celle du Christ ». La première édition de Christianisme et spiritisme portait en dédicace : « A l’Esprit de Jérôme, mon maître vénéré. » Ces mots ont disparu des éditions suivantes. Il semble qu’on en ait rougi comme d’une puérilité.

Les apparitions du cercle de Willermoz, que nous avons rapportées, étaient, en somme, assez anodines. Et il semble bien qu’elles ne se manifestaient qu’au médium, que les assistants devaient croire sur parole. Dans l’entourage d’Allan Kardec et de ses disciples on ne signale rien de très impressionnant. Les apparitions ne pourraient-elles avoir un caractère plus sensationnel, et se rendre visibles aux profanes ?

Les premières tentatives en ce sens eurent lieu à Moravia, dans l’État de New— York, en 1871. Dans une salle obscure ou à demi éclairée, on entendait des voix, le piano résonnait sous un contact invisible, les assistants étaient touchés par des mains mystérieuses, des étoiles lumineuses se promenaient dans l’air. Pieu plus, à l’ouverture de deux rideaux tendus, derrière lesquels se tenait le médium, l’esprit, blanc fantôme, se montrait à l’assistance, sous la clarté d’une ampoule électrique. Le dispositif fit fortune ; et partout les séances, sauf quelques légères variations, se déroulèrent selon ce même programme et ce même scénario.

Les manifestations les plus célèbres furent produites par le médium miss Florence Cook en présence de William Crookes. Ce sont les expériences de matérialisations typiques par excellence. Les livres spirites ne cessent d’y renvoyer. Le renom de William Crookes. mathématicien, chimiste, physicien, astronome, membre de la société royale de Londres était, d’ailleurs, de nature à leur donner devant le public une autorité hors de pair. Les séances se tinrent du commencement de 1874 au 21 mai de la même année. Miss Cook se disait en communication avec un esprit du nom de Katie King. Cet esprit appartenait à une certaine Anne Morgan, qui s’était désincarnée à l’âge de vingt-trois ans, au commencement du règne de Charles IL Miss Cook, derrière le rideau, entre dans un sommeil profond. On entend des plaintes et des sanglots. El voici que devant l’ouverture du rideau, à la lueur de la lampe électrique, apparaît une forme blanchâtre, un visage de fantôme. Comme miss Cook l’a annoncé, ce ne peut être que l’esprit de Katie King devenu visible grâce au fluide que miss Cook lui a prêté. William Crookes remarque bien : Autant quc je pouvais voir à la lumière un peu indécise, ses traits ressemblaient à ceux de miss Cook. » Mais il ne se laisse pas ébranler par cette constatation, non plus que par le fait qu’à aucun moment (et ceci est vrai pour toute la suite) les deux personnages, à savoir le médium miss Cook et Katie King réincarnée dans le lluide de miss Cook, ne se montrent ensemble. Tout le récit qu’a fait William Crookes lui-même de ces expériences témoigne d’une crédulité candide (d’ailleurs non exceptionnelle chez les hommes de science en dehors de leur spécialité), aussi bien que d’une docilité touchante à l’égard de toutes les exigences de miss Cook. C’est elle qui dirige

toutes les expériences et en dicte les conditions au savant.

Depuis, les manifestations spirites se sont diversifiées : Crayon qui COUVre de caractères une ardoise sous l’action de l’esprit ; médium qui Fébrilement remplit de son écriture des feuilles de papier sans avoir

conscience de ce qu’il écrit, ou porte successivement un indice sur les lett rcs d’un alphabet lesquelles toi nient

des phrases a son insu. Puis ce sont « les manifestai ions