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l’Espagne après an séjour de cinq ans. Il avait enseigné toute la Prima pars de la Somme théologique à Yalladolid ; à Rome ses cours eurent pour matières des questions des deux parties de la Seconda et de la Tertio. Certains cahiers d'élèves qui seront mentionnés plus loin nous ont conservé des spécimens de cet enseignement que reproduisent aussi les traités imprimés De spe et De charitate.

2. A Mcala (1585-1593). — Suarez vint remplacer à Alcala le P. Gabriel Vazquez, qui le remplaça luimôme à Home, et il y enseigna la Tertio pars avec un succès qui aboutit à la publication de son premier volume sur cette partie de la Somme. C’est à cette époque que Suarez se montra partisan de la science moyenne dont il était précédemment l’adversaire. Stegmiiller, Zur Gnadenlehre des ju.tgen Su/irez. in-8°, Fribourg-en-B., 1933, p. 34 ; Dumont, Liberté humaine et concours divin d’a/>rès Suarez, in-8°, Paris, 1936, p. 165..Mais, lorsque Vazquez, au bout de six ans, revint de Rome à Alcala, la rivalité difficilement évitablc et quotidiennement excitée des deux grands théologiens, tous deux de même valeur et de très dissemblables caractères, finit par aboutir, pour Suarez. sur sa demande et selon son choix, au départ pour Salamanque.

3. Premières publications.

A part la suppléance d’un professeur absent pendant la première année « le son séjour à Salamanque, Suarez n’y enseigna point. mais se consacra entièrement à la publication de ses ouvrages : deuxième et troisième volume sur la Terlia pars de la Somme, revision et augmentation du premier déjà paru, préparation des Disputationes metaphysiae ; voir plus loin. Désormais Suarez n’a qu’un désir, celui d’achever d'écrire et de publier sa théologie ; mais à ses nombreuses années d’enseignement il va être obligé d’en ajouter encore bien d’autres et son travail d'écrivain sera lui-même trop souvent conduit tout autrement que selon ses vues, force lui étant de tenir compte des circonstances et des démêlés où cellesci l’engagent. Aussi, malgré les splendides résultats d’un prodigieux labeur, il mourra sur sa tache, sans avoir public tout ce qu’il avait rédigé, ni achevé toutes les rédactions ou revisions qu’il voulait faire encore.

4° Le docteur de Colmbre (1597-1617). — 1. Première période (1597-1603). Les controverses « De auxiliis ». — Appelé à Coîmbre par la volonté expresse de Philippe II, Suarez, qui était allé prendre le titre de docteur à l’université d'Évora, s’efforça de remplir ses obligations de professeur sans ralentir la composition « le ses ouvrages. L’année qui le vit arriver à Coîmbre vit paraître ses Disputationes melaphysicse ; mais c’est aussi vers ce temps que les débats entre dominicains et jésuites sur la question De auxiliis [lassaient d’Kspagnc à Home, et Suarez fut appelé à écrire sur la grâce avant de pouvoir continuer ses travaux sur la Terlia l>ars. l.e volume Opuscula theologica ne représente

qu’une partie de son activité dans les controverses ; eu effet, « acteur de second ordre seulement, si on en juge par les apparences, il l’est en réalité de premier ordre, si on lient compte de l’influence qu’il exerça par ses écrits et par ses conseils. » De Scorraille, op. cit., t. i. p. 350. On trouve, du reste, parmi les théologiens jésuites qui discutèrent à Rome, Yalencia qui l’avait eu pour répétiteur, ibid., p. 63, Arrubal qui avait été

son élève, ibid., p. 2 17, Salas et Los CobOS, jadis ses collègues, en butte avec lui aux mêmes oppositions a Salamanque ibid., p. 325, et surtout La Bastida sur lequel son influence es1 assez connue, ibid., p. 16 l. Elle allait mettre à profit un rapprochement accidentel.

2. Affaire de la confession à distance (1604 I nut>). — (.'est une condamnation portée par le Saint Office qui occasionna ce rapprochement. Suarez en effet gagna

Rome en 1604, dans le dessein de justifier son interprétation d’un récent décret de Clément VIII, interprétation condamnée par le Saint-Office (31 juillet 16031, et avec l’espoir d'épargner à son De pœnitentia la suppression de la section où se trouvait l’interprétation erronée. Il ne réussit « qu'à faire confirmer plusieurs fois la sentence portée contre lui et à lui donner plus de notoriété ». Cf. de Scorraille, op. cit., t. Ut, p. 102 ; long récit documenté et exposé doctrinal de cette affaire, ibid., p. 52-116. Noir aussi plus loin. I.a condamnation, qui mortifia beaucoup Suarez, ne semble pourtant pas lui avoir fait grand tort aux yeux de Paul V devenu pape pendant le séjour de Suarez à Rome. Ce séjour avait duré plus d’une année pendant laquelle Suarez vécut près de ses confrères de Rome au temps des dernières Congrégations De auxiliis sous Clément VIII et jusqu'à leur reprise sous Paul V.

3. Dernière période (1606-1617). La fin du professorat et l’affluence des écrits. — Le désir qu’avait Suarez, rentré à Coîmbre au début de 1606, d’achever la rédaction d’une théologie basée sur la Somme, fut contrarié de différentes manières, mais on peut dire que, tout compte fait, il n’y eut guère de changé que la forme de ses ouvrages. Car la première des entraves apportées à son travail d'écrivain venait de ses obligations de professeur, prolongées à plusieurs reprises par le roi et terminées seulement en 1615 ; or, les cours enseignés se transformaient en livres publiés. Les traités De Deo, De angelis, De legibus. De gralia, sont avant tout le fruit de l’enseignement. Suarez fut aussi conduit par les circonstances et se rendit à certaines demandes à lui adressées ; les controverses sur la grâce ont été déjà signalées ; un désir de son recteur de Coîmbre fut l’occasion première du De legibus ; le traité Dcfensio fidei est une apologie contre le roi d’Angleterre, Jacques I", réclamée par le Saint-Siège ; l'énorme De religione, qui traite de l'état religieux en général et de la Compagnie de Jésus en particulier, répond à une demande du P. général Aquaviva. Sans compter le grand nombre de consultations, rapports, conseils, donnés par Suarez pour satisfaire aux demandes des prélats espagnols ou de son entourage et qui pourraient constituer un juste volume. Mais désormais il n'était plus question pour Suarez de commenter la Somme de saint Thomas comme il l’avait fait dans ses premiers ouvrages. Aux quatre tomes sur la Terlia pars, il n’a joint que le volume De censuris, sans même entreprendre l’ultime volume sur les sacrements qu’il avait pourtant annoncé au début et qu’il aurait écrit volontiers, de Scorraille, op. cit., t. ii, p. 156 ; voir le t. iii, In tertiam, argumentum totius operis ad lectorem, (.'(lit. Vives, t. xx, p. x. Quant au changement dans le type des ouvrages, le voici : Suarez publie ses cours sans les amplifier aussi abondamment et se contente d’une simple table donnant la concordance des questions de saint Thomas ; ou bien, s’il écrit encore un livre immense, il en fait purement et simplement un traité de sa façon. Il reste que le travail peut toujours s’encadrer dans la Somme de saint Thomas. Voir plus loin. Suarez mourut à Lisbonne où il mettait sa science cl son renom au service de l'Église pendant un conflit de l’autorité ecclésiastique avec l’autorité civile, l’affaire dite de l’interdit de Lisbonne ; cf. de Scorraille, op. cit., t. ii. p. 331. Le bref de félicitations envoyé de Home à cette occasion ne parvint qu’après sa mort qui eut lieu le 25 septembre 1617. C’est un bref précédemment donné ; celui qui répondit en 1607 au traité, resté d’ailleurs pour lors inédit, De inimunitatc ccclesiastica contra Ycnctos, qui avait formulé le titre gardé par la postérité au Doctor crimius en qualifiant Suarez de théologien éminent et pieux.

II. Œuvres, l" État général. - Suarez laissait un certain nombre d’ouvrages tout préparés pour